Le média d'investigation russe Novaïa Gazeta n'a jamais oublié son employée, Anna Politkovskaïa, tuée par balles à Moscou le 7 octobre 2006, dans sa cage d’escalier. Ce jeudi, il commémore le quinzième anniversaire de sa mort.
Cet assassinat, dont la date coïncide avec l'anniversaire du président Vladimir Poutine, avait provoqué une onde de choc en Russie et à travers le monde.
Politkovskaïa était particulièrement connue dans les pays occidentaux pour ses critiques du Kremlin et du dirigeant de la Tchétchénie, Ramzan Kadyrov.
Ce jeudi, à l'occasion des cérémonies d'hommage devant les locaux du journal, Novaïa Gazeta a réclamé la réouverture de l'enquête. En effet, les «commanditaires ont officiellement échappé à la responsabilité pénale».
Les faits sont désormais prescrits et le (ou les) commanditaires toujours non identifiés du crime ne peuvent plus être poursuivis.
A ce jour, seuls les exécutants du crime ont été condamnés. On ignore encore qui sont les commanditaires.
En 2014, à la suite de huit ans d’enquête, cinq hommes ont été reconnus coupables d'avoir organisé, exécuté ou participé à l'assassinat.
Ils ont écopé de lourdes peines de prison. Parmi eux, le Tchétchène Lom-Ali Gaïtoukaïev, qui s'était occupé de l'organisation logistique du crime. Il est décédé en 2017 en prison.
Un verdict qui n'a pas assouvi la soif de justice du journal. «Justice n’a pas été faite», avait martelé en 2016 Sergueï Sokolov, rédacteur en chef adjoint de Novaïa Gazeta.
La commémoration intervient dans un contexte difficile pour les médias indépendants, l'opposition et les ONG critiques du Kremlin. La pression est particulièrement forte depuis l'arrestation d'Alexeï Navalny, principal détracteur de Vladimir Poutine, au début de l'année.
Créée en 1993, Novaïa Gazeta fait partie des victimes de ce contexte. Le journal d'investigation indépendant a creusé des sujets qui lui ont valu les foudres d'hommes puissants et sans scrupules.
Il s'est particulièrement intéressé aux agissements de groupes de mercenaires russes ou aux persécutions des minorités sexuelles en Tchétchénie.
Novaïa Gazeta est régulièrement la cible d'intimidations, d'attaques et de meurtres. Depuis 2000, six de ses journalistes ont été assassinés.
En 2018, une tête de chèvre et une couronne mortuaire avaient été envoyées au siège de la rédaction en guise d'avertissement.
Le journal, qui paraît trois fois par semaine, est codétenu par sa rédaction, l'homme d'affaires Alexandre Lebedev et le dernier dirigeant soviétique Mikhaïl Gorbatchev. (mbr/ats)