L'utilisation de drones et de nouvelles tactiques dans le conflit qui oppose l'Ukraine à la Russie ne passe pas inaperçue. Selon le commandant suprême allié Transformation de l'OTAN, on assistera à une période d'innovations martiales.Image: Imago / Keystone / AFP
Ce commandant de l'Otan veut imiter l'Ukraine: «il faut s'y mettre»
Les récents succès opérationnels et militaires de l'Ukraine contre la Russie ne manquent pas d'ingéniosité, ce qui inspire les autres pays européens et surtout l'Otan. Selon le commandant Pierre Vandier, on assistera à une modernisation des conflits armés, avec de nouvelles technologies.
La «créativité» de l'Ukraine, illustrée par son attaque menée sur les bombardiers nucléaires russes à l'aide de drones à plus de 4000 km de ses frontières, peut être une source d'inspiration pour les armées occidentales, estime l'un des principaux responsables militaires de l'Otan.
L'amiral français Pierre Vandier, un ancien chef d'Etat-major de la marine française, appelé en septembre 2024 à conduire la transformation de l'Alliance, a commenté l'opération de l'Ukraine:
«Un très, très beau coup. Ce qu'ont fait les Ukrainiens en Russie, c'est un cheval de Troie»
Cet ex-pilote de Rafale et commandant du porte-avions Charles de Gaulle ne tarit pas d'éloges à l'égard des services de renseignement de l'Ukraine. Mais, ajoute-t-il, cette mission démontre aussi à quel point l'innovation et l'adaptation sont essentielles pour vaincre sur le champ de bataille.
L'amiral Pierre Vandier, commandant suprême allié Transformation (SACT) de l'Otan.Image: Photo par AHMET SERDAR ESER / ANADOLU / Anadolu via AFP
Une innovation permanente
Vandier, qui occupe, aujourd'hui, le poste de commandant suprême allié pour la transformation de l'Otan (SACT) explique son point de vue sur l'évolution des conflits armés:
«Aujourd'hui, on reprend une ère dynamique, où il faut que les armées soient le fruit de la planification lourde, mais aussi de la planification adaptée.»
«On va voir en fait une innovation permanente où, de semaine en semaine, de mois en mois ou d'année en année, on va être capable d'inventer des choses qu'on n'avait pas prévues»
Un monde «devenu dangereux»
«Le temps est vraiment un paramètre essentiel. Il faut aller vite», particulièrement dans un monde devenu «plus dangereux», souligne-t-il.
Face à la menace russe croissante, l'Alliance atlantique a entériné cette semaine de nouveaux objectifs pour ses capacités de défense, afin de s'assurer qu'elle sera en mesure de repousser une attaque de la Russie, y compris dans les quatre ou cinq ans qui viennent.
Le secrétaire général de Vandier, Mark Rutte, a pour sa part rappelé que:
«D'ici à 2029, les Russes pourraient être en mesure de réussir une attaque contre l'Otan»
Il faut donc s'y préparer, et mettre «en échec» son adversaire avant même que la guerre ne commence, assure l'amiral Vandier avant de souligner:
«Quand vous dites, je me défends, vous avez les armes pour vous défendre. Quand vous dites que vous dissuadez, vous avez les armes pour dissuader. C'est ça qui doit empêcher la guerre, qui doit faire que l'adversaire ne se dit pas, "demain matin, je vais gagner".»
De nouvelles façons de faire la guerre
Si quelques drones ukrainiens peuvent clouer au sol une quarantaine de bombardiers russes, alors pourquoi investir dans ce type d'armement lourd? Vandier répond:
«Il n'y a personne dans le milieu militaire qui vous dira qu'on peut se passer, on va dire, des objets traditionnels. En revanche, on est certains qu'on a besoin des nouveaux objets pour les accompagner, dont les drones.»
Plus de 70% des pertes sont provoquées par des drones sur le champ de bataille ukrainien, rappellent les militaires de l'Otan. Mais s'ils sont indispensables, ils ne peuvent pas tout faire, relèvent-ils.
L'opération toile d'araignée de l'Ukraine avait porté un coup dévastateur à la flotte aérienne russe, jusqu'en Sibérie.Image: MAXAR
Vandier, basé à Norfolk aux Etats-Unis, poursuit son explication.
«Aujourd'hui, vous ne traverserez pas l'Atlantique avec un drone de 10 mètres de long. Vous ne trouverez pas des sous-marins facilement avec ce genre d'outils. Mais s'ils accompagnent vos grosses plateformes, vous allez pouvoir faire beaucoup mieux, pour beaucoup moins cher.»
Avant d'ajouter, en soulignant notamment l'importance des robots et de l'intelligence artificielle:
«Le gros enjeu, c'est de faire rentrer de nouvelles technologies et de nouvelles façons de combattre, à la lumière de ce qu'on a pu voir en Ukraine»
Cette transformation des capacités militaires de l'Alliance, que celle-ci ambitionne d'augmenter d'au moins 30% au cours des prochaines années, aura un coût très significatif, chiffré en centaines de milliards d'euros.
«Toutes les armées modernes vont avoir des capacités pilotées et des capacités non pilotées, car c'est beaucoup plus intéressant de faire amener des munitions par un robot terrestre que par une escouade de soldats qui peuvent se prendre un obus sur la figure à n'importe quel instant.»
L'effort budgétaire «est important» mais «tout à fait réaliste», affirme cependant l'amiral Vandier, avant de marteler:
«Aujourd'hui, on a tous les outils. On a l'ingénierie. On a le savoir-faire. On a la technologie. Donc, il faut s'y mettre»
Comme nous voulons continuer à modérer personnellement les débats de commentaires, nous sommes obligés de fermer la fonction de commentaire 72 heures après la publication d’un article. Merci de votre compréhension!
«Trump a désavoué ses propres négociateurs sur le dossier suisse»
Comment le Conseil fédéral peut-il convaincre Donald Trump d’abaisser les nouveaux droits de douane? Pour l’ancien diplomate de haut rang Thomas Borer, la Suisse doit acheter des armes, du pétrole, du gaz et du bœuf américains – et ses négociateurs doivent faire preuve de créativité.
Le président américain Donald Trump a décrèté des droits de douane de 39% sur les importations en provenance de Suisse. Comment a-t-on pu en arriver là? Thomas Borer: On est toujours plus malin après coup! Début avril, la Suisse faisait partie du cercle restreint des pays qui visaient un arrangement rapide avec les Etats-Unis. Nous pensions être sur la bonne voie. Il aurait sans doute été judicieux d’être parmi les premiers à conclure un accord avec Donald Trump.