La conférence du Bürgenstock (NW) a accouché d'un premier cap avec la volonté à terme de dialoguer «avec toutes les parties». Le plus dur commence, convaincre la Russie de s'associer au dispositif. Cette étape se confrontera à la réalité militaire sur le terrain.
«Pour la première fois, nous avons parlé au plus haut niveau de paix en Ukraine», a affirmé dimanche après-midi, au terme d'une séance plénière, la présidente de la Confédération Viola Amherd. Mais la question de «comment et quand impliquer la Russie» reste ouverte, a-t-elle ajouté au terme de la conférence qui aura rassemblé le plus grand nombre de chefs d'Etat et de gouvernement jamais observé en Suisse.
Parmi la centaine de délégations, ceux-ci étaient près de 60, dont presque tous ceux du G7 et plusieurs pays du sud. Au final, la déclaration du Bürgenstock est soutenue par 84 pays et institutions. En l'absence de la Chine, aucun membre du groupe des BRICS, un groupe de pays plus proche de Moscou, ne figure parmi eux, alors que le Brésil avait annoncé qu'il viendrait en observateur et que ni l'Inde, ni l'Afrique du Sud n'ont parlé en plénière.
Dans la déclaration finale, les participants veulent «des étapes concrètes» à l'avenir pour associer «toutes les parties», soit la Russie. «Nous pensons qu'atteindre la paix exige l'implication et le dialogue entre toutes les parties», affirme le texte. Elle insiste sur l'intégrité territoriale de l'Ukraine, incontournable pour Kiev.
Le terme «agression russe» n'y figure pas, mais le projet renvoie à deux résolutions de l'Assemblée générale de l'ONU qui en parlent. Les participants demandent la sécurisation de la centrale nucléaire de Zaporijjia et considèrent «inadmissibles» les menaces nucléaires.
Pour garantir la sécurité alimentaire, ils veulent également une navigation «libre» et «entière» et un accès aux ports de la mer d'Azov et de la mer Noire. Les quelque 20'000 enfants déportés doivent être rapatriés de Russie et les prisonniers de guerre et les détenus civils libérés.
Il faudra désormais des pas supplémentaires. Berne est prête à continuer à «jouer un rôle actif» dans ce processus «long et plein de défis», selon Mme Amherd. Avec cette première étape, la Suisse confirme la nouvelle tendance de ses bons offices, le lancement d'initiatives qui ne peuvent être acceptées dans un premier temps par certaines des parties à un conflit. A quelques mois de la seconde présidence suisse du Conseil de sécurité de l'ONU, elle aura été au centre de l'attention internationale.
Pendant deux jours, le ton était loin d'être unanime à la conférence. Les dirigeants occidentaux ont réitéré de vibrants soutiens à l'Ukraine, notamment la vice-présidente américaine Kamala Harris venue avec un paquet de 1,5 milliard de dollars d'assistance, auquel se sont ajoutés plus de 100 milions de la Norvège.
Mais des pays comme l'Arabie saoudite, le Ghana ou la Turquie auront clairement répondu à l'éléphant dans la pièce. Une paix durable ne pourra être atteinte sans la participation de la Russie et celle-ci passera par la Chine.
Une rencontre «entre amis» ne suffit plus, selon le message relayé par plusieurs présidents africains. Mais aussi par celle de Slovènie qui estime que la Russie devra être présente dès le second sommet.
Face à ces appels à dialoguer avec la Russie, les exigences vendredi du président Vladimir Poutine, que l'Ukraine renonce à rejoindre l'OTAN et aux quatre régions annexées par Moscou dans l'est de ce pays, ont été ciblées par les dirigeants occidentaux présents. Une proposition de paix «stupide», selon les termes du Premier ministre Mark Rutte, probable futur chef de l'Alliance atlantique.
«Vous auriez dû être ici. Nous avons besoin de la participation de la Russie», a-t-il lancé dimanche au président russe. Tout en ajoutant que les règles communes de la communauté internationale valent pour tous.
Tout au long du week-end, un important dispositif de sécurité aura encadré la conférence. Des milliers de soldats et de nombreux représentants des polices fédérale et cantonales auront été actifs. (tib/ats)