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Ukraine: «La défense antimissile, c’est un peu une légende»

People receive medical treatment at the scene of Russian shelling, in Kyiv, Ukraine, Monday, Oct. 10, 2022. Two explosions rocked Kyiv early Monday following months of relative calm in the Ukrainian c ...
Kiev frappée par des missiles russes. Des civils blessés. 10 octobre 2022.Image: AP

Attaques contre Kiev: «La défense antimissile, c’est un peu une légende»

L'Ukraine doit impérativement renforcer sa défense antiaérienne. Des missiles sol-air américains et allemands vont lui être livrés. watson fait le point avec l'expert Alexandre Vautravers, rédacteur en chef de la Revue militaire suisse.
12.10.2022, 05:4912.10.2022, 09:17
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Lundi matin, 83 missiles russes ont frappé l'Ukraine, faisant 19 morts et 105 blessés, selon les autorités du pays. Kiev, la capitale, a été particulièrement touchée. Sur les plus de 80 missiles tirés, 43 auraient été abattus par la défense aérienne ukrainienne. Rédacteur en chef de la Revue militaire suisse et expert de la guerre en cours en Ukraine, Alexandre Vautravers répond à watson sur l'enjeu central que représente la défense aérienne pour les forces de Kiev.

Vidéo: watson

De quel armement sol-air les Ukrainiens disposent-ils?
Alexandre Vautravers:
On sait assez précisément ce dont l’Ukraine disposait comme défense antiaérienne avant le conflit. Elle bénéficiait d’un important réseau de missiles sol-air à longues portées, soit environ 60 km, des Buk-M1, des S-300, de facture soviétique et d’une technologie datant des années 1980. A l’époque, ces armements étaient jugés très performants. Après l’indépendance de l’Ukraine, sans doute ont-ils été modernisés avec des technologies locales. S’agissant des missiles sol-air à courte portée, on peut relever quelques faiblesses en termes numériques.

«Les Ukrainiens n'en ont pour l'heure pas assez»

Les missiles sol-air à longue portée sont prévus pour la destruction d’avion et de missiles?
Ces missiles à longue portée sont conçus, et c’est paradoxal, pour ne pas être employés. Leur but est de dissuader l’aviation adverse de pénétrer votre espace aérien. La grande couverture radar de ces armes et leur longue portée ont un très fort effet dissuasif. Leur mission, c'est d’intercepter des avions volant à haute ou moyenne altitude. Mais, moyennant un maillage serré du territoire, ce qui suppose le déploiement d’un nombre important de systèmes de défense antiaérienne, ils peuvent aussi détruire en vol un missile balistique à courte portée, ainsi que des missiles de croisière volant relativement bas.

Quels sont jusqu’ici les missiles sol-air livrés par des pays de l’Otan à l’Ukraine?
Ils sont de deux catégories. Première catégorie, des missiles portatifs, chacun étant porté et actionné par un soldat. Plusieurs milliers de ces missiles, appelés MANPADS, ont été livrés. Ils ont une courte portée, de 5 à 7 km. Ils sont essentiellement conçus pour intercepter des hélicoptères et des avions volant à basse altitude.

«La probabilité d’atteindre des missiles avec des MANPADS est très faible, principalement en raison de la vitesse insuffisante de ces derniers»

Quelle est la deuxième catégorie de missiles sol-air?
Elle est en train d’arriver en Ukraine. Ce sont des missiles à moyenne portée, qui ont principalement pour but de défendre des unités mobiles mécanisées, véhicules blindés ou artillerie, évoluant dans le terrain.

«Contrairement aux missiles sol-air à longue portée d'ancienne génération, ce sont des systèmes très agiles, qui peuvent se déplacer et se mettre en batterie en l’espace de quelques minutes. Leurs cibles principales sont des avions volant à moyenne ou basse altitude»

Ce sont notamment les missiles Iris-T que doit livrer l’Allemagne à l'Ukraine?
Exactement. Ce système a une portée de bouclier de 20 kilomètres de hauteur et de 40 kilomètres de largeur.

Idem pour le système NASAMS, promis par les Américains?
Oui, c’est de la même famille de missiles.

Il est beaucoup question jusqu'ici de missiles conçus pour intercepter des hélicoptères, des avions, des drones pénétrant dans l'espace aérien ukrainien. Mais ces jours-ci, l’Ukraine a besoin de systèmes antiaériens capables de détruire des missiles de croisière lancés depuis parfois plus de 1000 km. Les a-t-elle, ces systèmes?

«La défense antimissile, c’est un peu une légende. Un missile de défense sol-air ne fera pas la différence entre un avion et un missile, mais il lui sera beaucoup plus facile d’intercepter un avion qu’un missile»

Aujourd’hui, le nombre de systèmes de défense antiaérienne qui ont été spécifiquement conçus pour intercepter des missiles, il y en a très peu. Les seuls missiles véritablement développés dès l’origine pour ce but bien précis, ce sont des missiles à courte portée, extrêmement rapides. Les Britanniques en ont un, le Sea Wolf, développé dans les années 1980, utilisé pendant la guerre des Malouines avec beaucoup de succès. Il y a aussi le Iron Dome israélien, qu'Israël met en action lors d'attaques de roquettes.

Le président ukrainien Zelensky a apporté lundi ces précisions: «Sur les 84 missiles russes tirés contre l'Ukraine, 43 ont été abattus. Sur les 24 drones russes, 13 ont été abattus.» Les Ukrainiens ont donc bel et bien intercepté des missiles.
Cela montre bien que l’aviation russe fait très attention. Les missiles de moyenne ou longue portée tirés lundi sur l’Ukraine sont des missiles de croisière, lancés depuis l’extérieur du territoire ukrainien. Ceux qui ont été détruits en vol l'ont été par des missiles sol-air ukrainiens. Mais ce que ne disent pas les Ukrainiens, c’est combien de missiles sol-air il a fallu tirer pour pouvoir abattre 43 missiles de croisière russes. Peut-être était-ce le double. Peut-être aussi que les Ukrainiens exagèrent leur taux de réussite.

Pensez-vous qu’à l’avenir, les Ukrainiens seront capables de repousser ces agressions venues du ciel?

«Jusqu’ici, la guerre aérienne menée par les Russes a été un peu étrange. On dirait qu’il n'y a pas de synchronisation entre les opérations aériennes et celles menées au sol»

On peut s'attendre à une concentration de forces terrestres russes dans le sud du pays, vers Kherson, une ville occupée par les Russes, mais autour de laquelle les Ukrainiens pressent de toute part. Pour en revenir aux bombardements, il y a très certainement, chez les Russes, la volonté d’étendre le front aux arrières, dans le camp ukrainien. Lundi, outre des cibles civiles, les Russes ont visé les camps d’entraînement, les casernes, les dépôts logistiques, les gares ou les points de rassemblement de matériels de guerre occidentaux. C’est pour cela qu’ils cherchent à frapper l’ouest de l’Ukraine, où ces matériels arrivent. Pour les Russes, ce sont là des cibles lointaines et l’efficacité de leurs frappes est très faible.

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