Le groupe Meta a annoncé mardi la création de «Comptes Adolescents», censée mieux protéger les utilisateurs mineurs des dangers liés à Instagram, une application accusée par de nombreuses associations et autorités de nuire à la santé mentale des plus jeunes.
«C'est une mise à jour importante, conçue pour que les parents aient l'esprit tranquille», résume Antigone Davis, vice-présidente du groupe californien chargée des enjeux de sûreté.
En pratique, les utilisateurs âgés de 13 à 15 ans auront désormais des comptes privés par défaut, avec des garde-fous sur les personnes qui peuvent les contacter et les contenus qu'ils peuvent voir.
Les adolescents qui veulent un profil public et moins de restrictions – parce qu'ils désirent devenir influenceurs, par exemple – devront obtenir la permission de leurs parents. Et ce, qu'ils soient déjà inscrits ou nouveaux sur la plateforme.
«C'est un changement fondamental (...) pour nous assurer que nous faisons vraiment les choses bien», souligne la responsable. Les adultes pourront superviser les activités de leurs enfants sur le réseau social et agir en conséquence, y compris en bloquant l'application.
La maison mère de Facebook, Instagram, WhatsApp et Messenger, durcit en outre son règlement sur l'âge. Antigone Davis remarque:
Désormais, si un adolescent essaie de modifier sa date de naissance, «nous allons lui demander de prouver son âge».
La pression monte depuis un an contre le numéro deux mondial de la publicité numérique et ses concurrents.
En octobre dernier, une quarantaine d'Etats américains ont porté plainte contre les plateformes de Meta, leur reprochant de nuire à la «santé mentale et physique de la jeunesse», à cause des risques d'addiction, de cyberharcèlement ou de troubles de l'alimentation.
De Washington à Canberra, les élus travaillent sur des projets de loi pour mieux protéger les enfants en ligne. L'Australie devrait ainsi bientôt fixer entre 14 et 16 ans l'âge minimal pour utiliser les réseaux sociaux.
Meta refuse pour l'instant de contrôler l'âge de tous ses utilisateurs, au nom du respect de la confidentialité.
Antigone Davis indique: «Si nous détectons que quelqu'un a certainement menti sur son âge, nous intervenons». Cette dernière ajoute:
Selon la dirigeante, il serait plus simple et plus efficace que le contrôle de l'âge ait lieu au niveau du système d'exploitation mobile des smartphones, c'est-à-dire Android (Google) ou iOS (Apple).
«Ils disposent d'informations significatives sur l'âge des utilisateurs», argumente-t-elle, et pourraient donc «les partager avec toutes les applications utilisées par les adolescents».
Pas sûr cependant que ce renforcement de protections existantes suffise à rassurer les gouvernements et organisations inquiètes. Matthew Bergman estime:
Cet avocat a fondé en 2021 une organisation pour défendre les «victimes des réseaux sociaux» en justice. Elle représente notamment 200 parents dont un enfant s'est suicidé «après y avoir été encouragé par des vidéos recommandées par Instagram ou TikTok».
Matthew Bergman cite aussi les nombreux dossiers où des jeunes filles ont développé des troubles alimentaires graves. Meta empêche déjà la promotion de régimes extrêmes sur ses plateformes, entre autres mesures prises ces dernières années.
«Ce sont des petits pas, dans la bonne direction, mais il y a tellement plus à faire», juge l'avocat.
Selon Matthew Bergman, il suffirait que les groupes rendent leurs plateformes moins addictives – «et donc un peu moins rentables» – sans perdre leurs qualités pour les utilisateurs, pour communiquer ou explorer des centres d'intérêt.
En juin, le médecin-chef des Etats-Unis a appelé à obliger les réseaux sociaux à afficher des informations sur les dangers courus par les mineurs, comme les messages de prévention sur les paquets de cigarettes.
Auditionné par le Congrès fin janvier, le patron de Meta Mark Zuckerberg avait présenté de rares excuses aux parents de victimes, se disant «désolé pour tout ce que vous avez vécu». (lal/ats)