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En 3 points, le résumé de la COP27 où la Suisse en sort mitigée

La COP27 se termine sur un bilan contrasté

Après des négociations longues et difficiles, la COP27 s'est terminée dimanche à l'aube sur un bilan contrasté. Un texte très disputé sur l'aide aux pays pauvres affectés par le changement climatique a été adopté, mais pas une baisse des gaz à effet de serre.
20.11.2022, 11:2420.11.2022, 17:01
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La Suisse tire un bilan mitig
La Suisse tire un bilan mitigé de la COP27 qui s'est achevé dimanche à Charm el-Cheikh en Egypte. Si la création d'un fonds pour le climat a été jugée positive, les causes du changement climatique n'ont été que très peu abordées.Image: sda

Ouverte le 6 novembre à Charm el-Cheikh en Egypte, la conférence de l'ONU sur le climat a pris fin à l'aube avec plus d'un jour de retard, devenant l'une des COP les plus longues de l'histoire. «Ca n'a pas été facile», mais «nous avons finalement rempli notre mission», a souligné son président égyptien Sameh Choukri.

La COP27 qui s'est terminée dimanche n'a permis de faire que de légers progrès en matière de politique climatique, selon Franz Perrez, chef de la délégation suisse. Les regrets helvétiques se portent notamment sur le programme de travail pour la protection du climat.

Une déclaration finale fruit de nombreux compromis a été finalement adoptée, appelant à une réduction «rapide» des émissions mais sans ambition nouvelle par rapport à la COP de Glasgow en 2021. L'Union européenne s'est dite elle «déçue».

«Nous devons drastiquement réduire les émissions maintenant, et c'est une question à laquelle cette COP n'a pas répondu»
a regretté le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres

Mis sur la table à Glasgow en 2021 lors de la COP26, ce programme doit offrir un plan de travail concret pour la protection du climat. En Egypte, les Etats se sont mis d'accord sur un calendrier allant jusqu'en 2026 pour appliquer ce programme.

Des regrets suisses

La Suisse, de son côté, regrette que ce dernier «n'engage pas spécifiquement les pays qui émettent le plus de gaz à effet de serre» selon un communiqué de l'Office fédéral de l'environnement (OFEV) publié dimanche peu après la clôture de la conférence de l'ONU.

L'OFEV annonce que la Confédération s'engagera pour que ces pays apportent également leur contribution afin que l'objectif de 1,5 degré puisse encore être atteint.

La Suisse constate aussi le peu d'avancée concernant l'abandon du charbon et la réduction des subventions pour le pétrole et le gaz naturel. L'OFEV précise également que des «mesures concrètes visant à orienter les flux financiers mondiaux vers l'objectif de 1,5 degré ont été rejetées par un groupe de pays en développement».

La conseillère fédérale Simonetta Sommaruga a également considéré que cette COP «n'est pas un succès» si l'on regarde les mesures concrètes. Le Premier ministre britannique Rishi Sunak a quant à lui appelé à en «faire plus».

Fonds pour les pays vulnérables

Les critiques émises après la première semaine de négociations étaient donc justifiées. Il y a maintenant eu des progrès, notamment avec ce fonds «pertes et dommages» dans les pays vulnérables, a déclaré dimanche le négociateur suisse Franz Perrez.

La Suisse a joué un rôle important dans les discussions sur la création de ce fonds. Il fait partie d'une «grande mosaïque» de décisions. Il s'agit maintenant d'en élaborer les détails selon le négociateur.

La délégation helvétique regrette néanmoins que «des questions importantes n'aient pas été clarifiées». L'OFEV parle notamment de la répartition des fonds, de la gestion du fond ou encore des pays qui allaient y contribuer.

L'Office fédéral de l'environnement précise encore que:

«La Suisse s'engagera pour que ces questions soient clarifiées le plus rapidement possible»
l'Office fédéral de l'environnement

Une résolution «historique»

Cette édition a en revanche été marquée par l'adoption d'une résolution qualifiée d'historique par ses promoteurs, sur la compensation des dégâts causés par le changement climatique déjà subis par les pays les plus pauvres.

La question des «pertes et dommages» climatiques des pays pauvres avait failli faire dérailler la conférence, avant de faire l'objet d'un texte de compromis de dernière minute. Même si le texte laisse de nombreuses questions en suspens, il acte le principe de la création d'un fonds financier spécifique.

«Les pertes et dommages dans les pays vulnérables ne peuvent désormais plus être ignorés même si certains pays développés avaient décidé d'ignorer nos souffrances»
Vanessa Nakate, jeune militante ougandaise

Le ministère sud-africain de l'Environnement a salué un «progrès» mais réclamé «une action urgente» pour «assurer le respect des obligations des pays développés».

Contributions suisses

Comme l'a annoncé le président de la Confédération Ignazio Cassis lors de son discours à la cérémonie d'ouverture de la COP27, la Suisse contribuera aux fonds existants pour le financement climatique.

Sous réserve de l'approbation du Parlement, elle versera:

  • 155,4 millions de francs au Fonds pour l'environnement mondial,
  • 11,8 millions au Special Climate Change Fund (SCCF),
  • et 16 millions au Least Developed Countries Fund (LDCF).

Ces deux derniers fonds se concentrent sur les mesures d'adaptation dans les pays les moins avancés et les petits Etats insulaires en développement.

En outre, la Suisse versera 8 millions de francs supplémentaires au programme de financement et d'assurance contre les risques de catastrophe de la Banque mondiale. Enfin, la Confédération contribuera à hauteur de 4 millions de francs à l'initiative CREWS, qui assure un mécanisme de financement répondant aux besoins des PMA et des PEID.

Le WWF Suisse attend maintenant des actes

Pour le WWF Suisse, le résultat de la conférence de l'ONU sur le climat ne constitue qu'un consensus minimal. Le fonds pour les dommages causés aux pays pauvres est une lueur d'espoir dans une conférence globalement décevante. Les actes doivent maintenant suivre.

Les décisions prises lors de la conférence de Charm el-Cheikh sont bien en deçà des attentes, a-t-il indiqué dimanche dans un communiqué. L'accord sur le fonds pour les «pertes et dommages» climatiques des pays pauvres est également trop vague.

Le nouveau fonds, réclamé depuis de nombreuses années, n'a pas encore été mis en place. Son financement n'est pas clair ni même les modalités de distribution de l'argent.

La contribution suisse au financement climatique n'augmente que très peu, constate le WWF. En ce qui concerne le financement international du climat, la Suisse doit passer de la parole aux actes et doubler ses versements afin d'assumer sa part.

Pour le WWF, la conférence est devenue un lieu de rencontre important: les développeurs de solutions innovantes dans le domaine du climat et les contributeurs financiers se rencontrent, s'inspirent et signent des projets de mise en œuvre concrets.

Pour Greenpeace, la Suisse est dépassée

La conférence de Charm el-Cheikh a montré très clairement que la politique menée par la Suisse sur les questions climatiques est totalement dépassée face aux enjeux actuels, a estimé Greenpeace à l'issue des négociations. Berne doit faire nettement mieux.

«La Suisse aime se donner le beau rôle sur les questions climatiques. Elle ne s’en donne toutefois pas les moyens.»
Georg Klingler, expert climat chez Greenpeace Suisse dans un communiqué.

La Confédération a soutenu en Egypte l'objectif de 1,5 degré. Mais elle refuse d’adapter ses propres objectifs ou de réguler sa propre place financière. Elle ne s'engage pas non plus pour un soutien financier pour les pays les plus pauvres faces aux coûts exorbitants de l’adaptation, de l’atténuation et des pertes et dommages.»

«Tant que notre pays se montrera incapable de s’engager pleinement pour la protection du climat, il nous sera impossible d’influencer positivement le résultat des discussions au sein de la convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques.»
Greenpeace

La Suisse doit s'engager plus fermement pour le financement des pertes et des dommages. Elle doit augmenter ses objectifs de réduction des émissions et cesser de s’appuyer sur la compensation de ses émissions dans d'autres pays pour gonfler ses chiffres.

Berlin en demi-teinte

L'Allemagne a estimé dimanche que «l'espoir et frustration» se mêlent dans les résultats atteints par la conférence sur le climat COP27 en Egypte. La France a regretté «le manque d'ambition climatique».

«Nous avons fait une percée en matière de justice climatique - avec une large coalition d'Etats après des années de stagnation», a salué sur Twitter la cheffe de la diplomatie Annalena Baerbock. Mais «le monde perd un temps précieux sur la trajectoire de 1,5 degré» à cause du manque d'ambition dans la réduction des émissions de gaz à effet de serre, a souligné la ministre écologiste.

«Une alliance de pays riches en pétrole et de grands émetteurs» a mis «des obstacles inutiles» à des progrès sur la question des émissions, selon la ministre.

«En ce qui concerne les pertes et dommages, nous avons ouvert un nouveau chapitre lors de cette COP. Et nous avons pu faire en sorte que l'aide parvienne aux pays les plus vulnérables, nous innovons en termes de financement et nous voulons aussi responsabiliser les grands émetteurs d'aujourd'hui»
Annalena Baerbock, la cheffe de la diplomatie allemande

Elle s'est également réjouie de «l'alliance progressiste entre États à travers différents continent»: «plus personne ne peut se cacher derrière les vieux contrastes Nord-Sud», a-t-elle souligné.

Progrès malgré la crise, selon Paris

De côté français, on saluait dimanche des avancées pour les pays les plus vulnérables mais tout en regrettant «la manque d'ambition climatique» de la COP27.

«Aucune avancée n'a été obtenue sur la nécessité de faire des efforts supplémentaires de réduction des gaz à effet de serre et sur la sortie des énergies fossiles. C'est une vraie déception»
Agnès Pannier-Runacher, la ministre française de la Transition énergétique,

Ce sommet «répond toutefois aux attentes des pays les plus vulnérables avec une avancée forte: la création de nouveaux outils de financement pour les pertes et dommages liées aux catastrophes climatiques».

«Si l'accord de la COP27 n'est pas à la hauteur des ambitions que portaient la France et l'Union européenne, il préserve toutefois l'essentiel: il rappelle l'objectif de limiter le réchauffement climatique à 1,5°C et appelle les pays à des efforts supplémentaires dès 2023», selon le communiqué du ministère français de la Transition énergétique. «Réaffirmer cet objectif était essentiel, dans un contexte mondial de crise climatique et énergétique», souligne le texte.

Trajectoire de +2,4 degrés

Le texte sur les réductions d'émissions a été également très disputé, de nombreux pays dénonçant un recul sur les ambitions définies lors de précédentes conférences. Notamment sur l'objectif le plus ambitieux de l'accord de Paris, contenir le réchauffement à 1,5°C par rapport à l'ère pré-industrielle, toutefois réaffirmé dans la décision finale.

Les engagements actuels des pays signataires ne permettent pas de tenir cet objectif, ni même celui de contenir l'élévation de la température à 2°C par rapport à l'ère pré-industrielle, quand les humains ont commencé à utiliser en masse les énergies fossiles responsables du réchauffement climatique.

Ces engagements, en admettant qu'ils soient intégralement tenus, mettraient au mieux le monde sur la trajectoire de +2,4°C à la fin du siècle et, au rythme actuel des émissions, sur celle d'un catastrophique +2,8°C.

Or, à près de 1,2°C de réchauffement actuellement, les impacts dramatiques se multiplient déjà. L'année 2022 en a été l'illustration, avec son cortège de sécheresses, méga-feux et inondations dévastatrices, impactant récoltes et infrastructures.

Les coûts s'envolent également: la Banque mondiale a estimé à 30 milliards de dollars le coût des inondations qui ont laissé un tiers du territoire pakistanais sous l'eau pendant des semaines et fait des millions de sinistrés.

Les pays pauvres, souvent parmi les plus exposés mais généralement très peu responsables du réchauffement, réclamaient depuis des années un financement des «pertes et dommages».

Remis à la COP28

Accusé par certains de manque de transparence dans les négociations, l'Egyptien Choukri a affirmé qu'il n'y avait eu «aucune mauvaise intention» et qu'il était «parvenu à éviter qu'une partie ou une autre ait à reculer».

La bataille ne s'achèvera toutefois pas avec l'adoption de la résolution de Charm el-Cheikh puisque celle-ci reste volontairement vague sur certains points controversés. Les détails opérationnels doivent être définis pour adoption à la prochaine COP, fin 2023 aux Emirats arabes unis, promettant de nouveaux affrontements. Notamment sur la question des contributeurs, les pays développés, Etats-Unis en tête, insistant pour que la Chine en fasse partie.

L'émissaire américain pour le climat John Kerry a annoncé travailler à faire grimper la contribution américaine à 11 milliards de dollars, ce qui ferait de Washington «le premier contributeur unique de l'économie du climat». Un porte-parole du département d'Etat a cependant souligné que l'accord ne mentionnait aucun point contraignant.

Autre sujet qui a secoué la COP: les ambitions de réductions d'émissions. De nombreux pays ont estimé que les textes proposés par la présidence égyptienne constituaient un retour en arrière sur les engagements d'en relever régulièrement le niveau pris à Glasgow.

«Cette COP a affaibli les obligations pour les pays de présenter des engagements nouveaux et plus ambitieux»
a regretté Laurence Tubiana, architecte des accords de Paris de 2015.

Sans compter la question de la réduction de l'usage des énergies fossiles, à l'origine du réchauffement mais à peine mentionnées dans les textes sur le climat. Le Britannique Alok Sharma, président de la COP26, a affirmé qu'un point sur les fossiles avait été «édulcoré au dernier moment». Le charbon avait été cité en 2021 après de rudes échanges mais à Charm el-Cheikh les «suspects habituels», selon l'expression d'un délégué, s'y sont une nouvelle fois opposés pour le pétrole et le gaz. Arabie saoudite, Iran ou Russie sont les plus souvent cités.

Le développement des renouvelables fait cependant l'objet d'une mention inédite aux côtés des énergies à «basses émissions», expression généralement appliquée au nucléaire. (ats/myrt)

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source: keystone / str
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