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Le suicide d'un ministre russe sème la peur au sein de l'élite

Officials carry a portrait and the coffin of former Russian Transport Minister, Roman Starovoyt, during his funeral in Saint Petersburg on July 11, 2025. Russia's former transport minister Roman  ...
Des officiels portent le portrait et le cercueil de l'ancien ministre russe des Transports, Roman Starovoït, le 11 juillet 2025.Image: AFP

Le suicide d'un ministre russe sème la peur au sein de l'élite

Le ministre russe des Transports s'est présumément donné la mort après son limogeage par Vladimir Poutine sur fond d'allégations de corruption. L'élite politique est choquée et redoute de faire les frais de la chasse aux profiteurs.
11.07.2025, 13:5811.07.2025, 13:58
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Les funérailles de Roman Starovoït, ministre russe des Transports âgé de 53 ans, ont eu lieu vendredi, mais dès jeudi matin, plusieurs centaines de personnes, dont des membres du gouvernement et des hauts responsables, ont participé en silence à une cérémonie d'adieux dans la salle funèbre de l'hôpital présidentiel à Moscou, où le corps du défunt était exposé dans un cercueil ouvert.

Family members pay their last respects to former Russian Transport Minister, Roman Starovoyt, at his funeral in Saint Petersburg on July 11, 2025. Russia's former transport minister Roman Starovo ...
Dernier hommage à Roman Starovoït lors de ses funérailles à Saint-Pétersbourg, le 11 juillet 2025.Image: AFP

Si les circonstances de la mort de Roman Starovoït restent floues, les médias russes ont évoqué une enquête pour corruption le visant, assurant qu'il devait être arrêté prochainement. Limogé par le président Vladimir Poutine, il s'est probablement donné la mort, selon les premiers résultats de l'enquête, qui est en cours.

«C'est une grande perte pour nous, très inattendue. Nous sommes tous choqués», a résumé Vassilissa, 42 ans, l'épouse d'un collègue de Roman Starovoït. Cette femme ajoute, les larmes aux yeux:

«Il était tellement actif, joyeux, il aimait énormément la vie. Je ne comprends pas comment cela a pu arriver»

Après avoir déposé devant le cercueil de grands bouquets de roses rouges, des anciens collègues, en costumes sombres, sont repartis très vite dans leurs luxueuses voitures noires.

Dans une ambiance très lourde rappelant les funérailles dans le film culte Le Parrain de Francis Ford Coppola, d'autres personnes interrogées dans la foule ont refusé de parler. Vladimir Poutine n'a pas participé à la cérémonie.

Bouc émissaire

Roman Starovoït avait été gouverneur de la région russe de Koursk, frontalière de l'Ukraine, avant d'être promu ministre à Moscou en mai 2024, trois mois avant que les troupes ukrainiennes ne prennent le contrôle d'une petite partie de ce territoire lors d'une offensive surprise. Une attaque qui avait été un revers pour le Kremlin.

Son successeur à la tête de cette région, Alexeï Smirnov, a lui été arrêté au printemps pour le détournement des fonds destinés à renforcer les fortifications à la frontière. Celle-là même que les Ukrainiens ont traversé facilement, pour n'être repoussés que neuf mois plus tard.

Les autorités «ont essayé de faire de lui (réd: Roman Starovoït) un bouc émissaire», accuse Andreï Pertsev, analyste du média indépendant Meduza, reconnu «indésirable» et interdit en Russie.

L'incursion ukrainienne «s'est principalement produite parce qu'il n'y avait pas assez de soldats pour protéger la frontière», mais c'était «plus facile de rejeter la faute sur un responsable civil», explique-t-il.

L'affaire Starovoït s'inscrit dans une vague récente de répression visant de hauts responsables soupçonnés de s'être enrichis illégalement pendant l'offensive russe en Ukraine. Et selon des analystes, si les scandales de corruption on toujours existé en Russie, la campagne militaire a changé les règles du jeu politique.

Andreï Pertsev estime:

«Il existait des règles auparavant, selon lesquelles les gens savaient: une fois qu'ils montaient suffisamment haut, on ne les embêtait plus. Mais elles ne fonctionnent plus.»

«Guerre sainte»

Alors que Vladimir Poutine promettait régulièrement de s'attaquer à la corruption – étant lui-même accusé de s'être enrichi illégalement par ses détracteurs –, les rares arrestations médiatisées ont été davantage utilisées pour cibler des opposants ou résultaient de luttes internes entre les échelons inférieurs du pouvoir en Russie.

Depuis l'offensive en Ukraine lancée en février 2022, «quelque chose dans le système a commencé à fonctionner de manière complètement différente», souligne la politologue Tatiana Stanovaïa du Centre Carnegie Russie Eurasie, interdit en Russie en tant qu'organisation «indésirable».

Tatiana Stanovaïa, en définissant la nouvelle approche du pouvoir, estime:

«Toute action ou inaction qui, aux yeux des autorités, accroît la vulnérabilité de l'État face aux actions hostiles de l'ennemi doit être punie sans pitié et sans compromis.»

Pour le Kremlin, la campagne en Ukraine est une «guerre sainte» qui a réécrit les règles, confirme Nina Khrouchtcheva, professeure à The New School, une université de New York, et arrière-petite-fille du dirigeant soviétique Nikita Khrouchtchev. Elle résume:

«Pendant une guerre sainte, on ne vole pas, on se serre la ceinture et on travaille 24 heures sur 24»

Signe des temps, plusieurs généraux et responsables de la Défense ont été arrêtés pour des affaires de détournement de fonds ces dernières années. Début juillet, l'ancien vice-ministre de la Défense Timour Ivanov a été condamné à 13 ans de prison.

Cette ambiance, selon Tatiana Stanovaïa, a créé «un sentiment de désespoir» au sein de l'élite politique à Moscou, qui est peu susceptible de s'atténuer. Et d'avertir:

«À l'avenir, le système sera prêt à sacrifier des figures de plus en plus en vue»

(ag/afp)

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