Israël a mis vendredi sa menace à exécution contre la Syrie en bombardant les abords du palais présidentiel à Damas. Le chef de la minorité druze, qui avait dénoncé un «génocide» du pouvoir syrien, avait réclamé «une intervention immédiate de forces internationales».
Le plus influent chef religieux druze en Syrie, cheikh Hikmat al-Hajrin, avait accusé jeudi soir le régime du nouveau président syrien Ahmad al-Chareh de mener une «campagne génocidaire injustifiée» visant des «civils» de sa communauté, après des affrontements confessionnels en début de semaine, qui ont fait plus de 100 morts, selon une ONG.
Israël avait aussitôt menacé de répondre «avec force» si Damas ne protégeait pas cette minorité religieuse. Quelques heures après, à l'aube vendredi, «des avions de combat ont frappé les environs du palais» présidentiel à Damas, a annoncé l'armée israélienne sur le réseau social Telegram.
«C'est un message clair envoyé au régime syrien. Nous ne permettrons pas que des forces [syriennes] soient dépêchées au sud de Damas ou menacent de quelque manière que ce soit la communauté druze», ont martelé dans un communiqué le premier ministre israélien Benyamin Netanyahou et son ministre de la défense Israël Katz.
Des heurts à proximité et au sud de Damas entre combattants druzes et groupes armés liés au pouvoir sunnite du président Ahmad al-Chareh illustrent l'instabilité persistante en Syrie, près de cinq mois après le renversement de son prédécesseur Bachar al-Assad, issu de la minorité alaouite.
«Nous ne faisons plus confiance à une entité qui prétend être un gouvernement [...] Un gouvernement ne tue pas son peuple en recourant à ses propres milices extrémistes, puis, après les massacres, en prétendant que ce sont des éléments incontrôlés», avait dénoncé le cheikh druze.
L'ONU a exhorté «toutes les parties à faire preuve d'un maximum de retenue» et la diplomatie américaine a fustigé «les dernières violences et la rhétorique incendiaire» antidruzes «répréhensibles et inacceptables».
Des combats cette semaine à Jaramana et Sahnaya, où vivent des chrétiens et des Druzes, ainsi qu'à Soueïda, ville à majorité druze, ont réveillé le spectre des massacres qui avaient fait au début mars plus de 1700 morts, en grande majorité des membres de la minorité alaouite, dans l'ouest du pays.👇
Ces violences avaient été déclenchées par des attaques de militants pro-Assad contre les forces de sécurité du nouveau pouvoir.
Mercredi, l'armée israélienne avait frappé près de Damas, en forme «d'avertissement» contre un «groupe extrémiste qui se préparait à attaquer la population druze de la ville de Sahnaya», selon Netanyahou. Les Druzes sont une minorité de l'islam chiite. Ses membres sont répartis entre le Liban, la Syrie et Israël.
Les combats en Syrie ont été déclenchés lundi soir par une attaque de groupes armés affiliés au pouvoir contre Jaramana, après la diffusion sur les réseaux sociaux d'un message audio attribué à un Druze et jugé blasphématoire à l'égard du prophète Mahomet. L'authenticité du message n'a pas pu être vérifiée.
Les autorités syriennes ont accusé des éléments échappant à son contrôle d'avoir provoqué les violences.
Selon un bilan de l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), une ONG basée à Londres, ces affrontements ont fait 102 morts, dont 30 membres des forces de sécurité et combattants affiliés, 21 combattants druzes et 11 civils à Jaramana et Sahnaya. Dans la province de Soueïda, 40 combattants druzes ont péri, dont 35 dans une embuscade, d'après l'ONG.
A Jaramana, des accords entre représentants des Druzes et du pouvoir avaient permis de rétablir le calme mardi soir, de même mercredi soir à Sahnaya à 15 km au sud-ouest de Damas où des forces de sécurité ont été déployées. Le pouvoir syrien avait réaffirmé son «engagement ferme à protéger toutes les composantes du peuple syrien, y compris la communauté druze».
Dès la chute de Bachar al-Assad le 8 décembre, renversé par une coalition de factions rebelles islamistes dirigée par Chareh après plus de 13 ans de guerre civile, Israël a multiplié les gestes d'ouverture envers les Druzes, cherchant, selon l'analyste indépendant Michael Horowitz, à se ménager des alliés dans le sud syrien à un moment où l'avenir de ce pays reste incertain. (jzs/ats)