La Chine a lancé mercredi un nouvel exercice militaire de grande ampleur dans le détroit de Taïwan, au lendemain d'importantes manoeuvres simulant un blocus de l'île qu'elle revendique. Les Etats-Unis et l'Union européenne ont condamné cette démonstration de force.
Ces nouveaux exercices, qui n'avaient pas été annoncés, surviennent quelques jours après une tournée en Asie du secrétaire américain à la défense, Pete Hegseth, qui a affirmé que Washington assurerait la «dissuasion» dans le détroit de Taïwan.
Sous le nom de code «tonnerre dans le détroit- 2025A», l'opération vise à tester les capacités des troupes en matière de «contrôle des zones» et de «blocus», a déclaré le porte-parole du commandement du théâtre oriental de l'armée chinoise, dans un communiqué.
Elle comprend des «exercices de tir réel longue portée» et des simulations des «frappes sur des ports et des infrastructures énergétiques clés», a ensuite précisé le porte-parole.
Taipei a condamné ces exercices, et dit avoir repéré 21 navires de guerre – comme lors des manoeuvres de mardi – mais aussi 27 aéronefs et 10 bateaux de garde-côtes chinois aux alentours de l'île, entre 06h08 et 13h30. Il s'agit du nombre le plus élevé de navires de guerre repérés en une seule journée depuis près d'un an.
Le détroit de Taïwan, zone de passage clé pour le transport maritime mondial, est un point de tension majeur entre grandes puissances, en particulier la Chine et les Etats-Unis. Les Etats-Unis sont le principal fournisseur d'armes de Taïpei depuis des décennies, mais entretiennent une «ambiguïté stratégique» quant à leur intervention en cas d'attaque chinoise.
Washington a réagi mercredi en condamnant «des activités militaires et une rhétorique agressives de la Chine», qui «exacerbe les tensions et met en danger la sécurité régionale et la prospérité du monde».
La Chine a multiplié les exercices à grande échelle autour de Taïwan ces dernières années, déployant avions de chasse et navires de guerre pour appuyer sa revendication de souveraineté, rejetée par Taïpei.
Mardi, elle avait mobilisé des forces terrestres, navales et aériennes autour de l'île, entraînant l'envoi d'avions et de navires par Taïpei et le déploiement de ses systèmes de missiles.
L'Union européenne avait mis en garde mardi contre «toute action susceptible d'aggraver les tensions».
Ces exercices constituent «une série de tests de résistance» pour évaluer la force du soutien de Washington à Taïwan et à d'autres alliés dans la région, estime Wen-ti Sung analyste au centre de réflexion américain Atlantic Council.
Ces manoeuvres sont également décrites par les experts comme des répétitions pour un encerclement de l'archipel, un scénario jugé plus probable qu'une invasion totale, plus risquée et plus facile à anticiper.
Pour le professeur Lin Ying-yu, de l'université Tamkang à Taïwan, la Chine cherche à «s'entraîner sur un blocus» de l'île. D'autant que «Taïwan est vulnérable d'un point de vue énergétique et la Chine joue sur cette vulnérabilité», renchérit Dylan Loh, enseignant à l'université technologique Nanyang de Singapour.
La pression est par ailleurs montée d'un cran depuis l'élection du président taïwanais Lai Ching-te en 2024, qui soutient que l'île est «déjà un pays indépendant» et qui a qualifié la Chine de «force hostile étrangère».
Le Commandement du théâtre oriental de l'armée chinoise a publié mercredi une image intitulée «frappes paralysantes» sur le réseau social Weibo, montrant ses forces entourer Taïwan et tirer des missiles en direction de l'île.
Les revendications du Parti communiste chinois sur Taïwan remontent à 1949, lorsque les Républicains chinois s'y sont réfugiés après leur défaite face à l'armée communiste.
L'île principale de Taïwan, peuplée par des peuples autochtones depuis des milliers d'années, a été en partie contrôlée par les Espagnols, les Hollandais, la dynastie chinoise des Qing, puis intégralement par le Japon jusqu'en 1945. (jzs/ats)