L'Arabie saoudite va accueillir ce mardi une réunion préparatoire entre hauts responsables russes et américains en vue d'un sommet entre les présidents russe et américain sur l'Ukraine. Le conseiller à la Sécurité nationale du président américain, Mike Waltz et l'envoyé spécial pour le Moyen-Orient Steve Witkoff, représenteront les Etats-Unis.
C'est un nouveau rebondissement dans l'offensive diplomatique Américaine dans cette guerre après les propos de JD Vance, le vice-président américain. L'expert en Europe de l'Est, Alexander Dubowy, analyse ce que les récentes déclarations du président américain et de son vice-président impliquent pour les perspectives de paix en Ukraine.
JD Vance a à peine évoqué la Russie et l'Ukraine dans son discours. Récemment, les Etats-Unis ont envoyé des messages contradictoires à Poutine, oscillant entre flatteries et menaces. Que peut-on attendre de la politique américaine envers la Russie sous Trump?
JD Vance a adressé un avertissement clair à la Russie dans le Wall Street Journal, avant de nuancer ses propos. Même chose avec le secrétaire à la Défense, Pete Hegseth, qui a d'abord exclu une adhésion de l'Ukraine à l'Otan avant de rectifier le tir. Ce qui est surprenant, c'est la réaction des médias.
Pourquoi?
La panique ambiante est déconcertante. Beaucoup des initiatives de Trump étaient prévisibles. Les détails de son plan de paix restent flous, et il n'y a pas de menace imminente sur l'Otan.
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Mais la rhétorique de Trump inquiète.
On observe déjà un net durcissement du ton. Washington veut que l'Europe investisse davantage dans sa propre sécurité. Ce n'est pas nouveau: cette demande date déjà des présidents américains précédant Trump. On en parle depuis près de 20 ans, mais peu de choses ont changé.
Lors de son discours à Munich, Vance a vivement critiqué l'Europe, tout en affirmant que les Etats-Unis et l'Europe restaient une équipe soudée. Est-ce encore le cas?
L'Europe a besoin des Etats-Unis pour dissuader la Russie, et les Etats-Unis comptent sur l'Europe pour freiner l'influence grandissante de la Chine.
Trump envoie des signaux positifs à Poutine. Pourquoi?Pour Washington, la véritable menace, ce n'est pas la Russie, mais la Chine. Trump reproche à Biden d'avoir poussé Moscou dans les bras de Pékin. Il veut détacher la Russie de la Chine, et, dans l'idéal, en faire un allié.
Est-ce réaliste, compte tenu des crimes russes en Ukraine?
Non, c'est impossible:
Poutine est en guerre contre l'Occident. Ses objectifs en Ukraine n'ont pas changé depuis le premier jour de l'invasion: instaurer un gouvernement pro-russe à Kiev, réduire drastiquement l'armée ukrainienne, faire reconnaître l'annexion de la Crimée et de quatre autres régions, et imposer une neutralité à l'Ukraine sur le modèle finlandais pré-1991. Le fait que Washington envisage des discussions sur un pied d'égalité flatte sans doute Poutine.
Trump et Poutine pourraient-ils conclure un accord attribuant ces territoires à la Russie?
Un accord sur l'Ukraine sans l'Ukraine est impossible. Trump ne pourra pas décider à leur place. Personne ne peut contraindre l'Ukraine à un suicide politique.
Que peut-on attendre d'une rencontre Trump-Poutine?
Pas grand-chose. Mais Trump semble vouloir alterner caresses et menaces envers la Russie. Il a besoin de leviers de pression. Et il en a deux: durcir les sanctions contre Moscou, surtout dans le secteur énergétique, et renforcer l'armement de l'Ukraine. Il a déjà laissé entendre qu'il pourrait y recourir. Il ne veut pas perdre la face.
A quoi pourrait ressembler un accord?
Un gel des combats sur la ligne de front, un renoncement de Kiev à rejoindre l'Otan. Un échange de territoires pourrait être évoqué: par exemple, les zones reprises par l'Ukraine dans la région de Koursk contre celles occupées par la Russie à Kharkiv. Mais le véritable enjeu est ailleurs.
Où exactement?
Dans les garanties de sécurité.
Les États-Unis ne veulent pas offrir ces garanties, les laissant aux Européens. Sont-ils en mesure de le faire?L'Europe ne voudra pas assumer seule cette responsabilité. En 2022, les négociations de paix ont échoué, entre autres, à cause du refus occidental d'apporter ces garanties.
C'est pourquoi je reste sceptique sur les perspectives de paix. Cela pourrait aussi expliquer les messages contradictoires des États-Unis. Washington a peut-être sondé le terrain et réalisé que la situation était bien plus complexe que prévu. Si les Etats-Unis comprennent que la Russie n'est pas prête à faire de concessions, alors Trump devra agir et sortir le fouet.
Traduit de l'allemand