Sur son tibia droit, un tatouage qui ne passe pas inaperçu: le visage de Poutine rattaché à des pattes d'araignée. Au-dessus de la «bête humaine», on peut lire «Big Brother is Watching You». Une référence directe au roman de George Orwell «1984» dans laquelle «Big Brother» est un personnage fictif qui a fondé un État totalitaire et exercé un pouvoir total sur la population. Un personnage qui trouve son inspiration dans le dictateur soviétique Joseph Staline.
Sur l'autre jambe, la jeune femme porte un bracelet électronique. Il limite sa liberté. En effet, Olesya Krivtsova est assignée à résidence.
Elle est accusée d'avoir discrédité l'armée russe, notamment sur les réseaux sociaux où la jeune femme s'est montrée critique à l'égard de la guerre lancée par la Russie en Ukraine. A seulement 19 ans, Olesya a été arrêtée à deux reprises et risque jusqu'à dix ans de prison.
Tout aurait commencé par un post Instagram. En octobre dernier, Krivtsova se serait exprimée de manière critique sur les réseaux sociaux au sujet de l'explosion survenue sur le pont de Crimée faisant trois morts. Une explosion que le Kremlin a qualifiée d'«acte terroriste».
L'étudiante aurait également tenu des propos critiques à l'égard de la guerre dans un groupe de discussion à l'université. Puis quelques jours plus tard, la police aurait fait irruption dans l'appartement de la jeune femme, comme le rapporte CNN. Les agents, qu'Olesya soupçonne de faire partie du groupe Wagner, l'auraient menacée avec une masse, un instrument connu pour être utilisé lors d'intimidations au sein de l'organisation paramilitaire.
Dans une vidéo tristement célèbre, que la jeune femme a déjà visionnée, les mercenaires ont exécuté un militant avec leur arme totem. La description de ce drame indique simplement «Le traître a reçu le châtiment traditionnel de Wagner».
A 19 ans, Olesya Krivtsova a été déjà emmenée au poste de police à deux reprises, deux fois pour le même motif. En mai dernier, elle avait déjà reçu un avertissement pour avoir distribué des affiches contre la guerre. L'étudiante est désormais assignée à résidence, dans l'appartement de sa mère dans la région d'Arkhangelsk, située au nord de la Russie. Chacun de ses faits et gestes est scruté dans les moindres détails et tous les moyens de communication lui ont été interdits. La mère soupçonne sa fille d'avoir été trahie par un camarade d'université.
La jeune femme risque jusqu'à dix ans de prison pour avoir discrédité l'armée russe et justifié le terrorisme. Son nom figurerait désormais sur la liste des terroristes, aux côtés des membres de l'EI, d'Al-Qaida ou des taliban.
Arrêtée le 26 décembre dernier, la jeune femme attend toujours son procès. Son avocat, Alexei Kichin, pense que le jugement prendra la tournure d'un simulacre avec un objectif: dissuader les autres voix de s'élever contre la guerre.
Les critiques se seraient de toute façon déjà tues dans la région d'Arkhangelsk. La mère de l'accusée a déclaré à CNN:
La télévision nationale s'évertue à discréditer l'étudiante. Le président local du parti communiste, Alexander Novikov, a notamment déclaré qu'Oleysa Krivtsova devait être envoyée sur le front du Donbass pour voir de ses propres yeux le combat militaire.
Son cas n'est pas le premier du genre. Selon l'observateur indépendant des droits de l'homme OVD-Info, au moins 61 personnes ont été inculpées en Russie pour apologie du terrorisme sur Internet, dont 26 cas ont abouti à une condamnation.