Jusqu'à présent, les troupes russes en Ukraine pouvaient se sentir en sécurité à environ 80 kilomètres derrière la ligne de front, mais cela semble désormais terminé. Ce n'est que lundi que le gouvernement américain a confirmé que sa dernière livraison d'armes à Kiev contenait également des missiles de type AGM-88 HARM.
Ces «tueurs de radars» procurent à l'Ukraine une portée nettement plus grande. Et ils sont apparemment déjà en service.
C'est ce qui ressort d'images diffusées sur les canaux Telegram russes, qui montreraient les restes d'un AGM-88 près des positions russes en Ukraine. L'endroit exact où le projectile serait tombé n'est pas documenté. L'authenticité des images n'est pas non plus confirmée, mais elles coïncident avec les indications du gouvernement américain et fournissent de précieuses informations aux spécialistes.
#Ukraine: Apparently, the Ukrainian army may have received American AGM-88 anti-radar missiles - fragments were reportedly found at Russian positions.Earlier, the Minister of Defense of Ukraine reported that the army would receive unnamed anti-radar missiles. pic.twitter.com/FCU8QR9lA4— 🇺🇦 Ukraine Weapons Tracker (@UAWeapons) August 7, 2022
«Grâce aux images, nous savons, désormais, que les Ukrainiens ont reçu la variante D de l'AGM-88», commente l'ex-soldat et expert en armement Thomas C. Theiner sur Twitter. Cette variante peut également être guidée vers la cible à l'aide de satellites GPS, même si celle-ci n'émet plus d'ondes radio, selon l'expert. «Cela signifie que même si les Russes désactivent leurs radars, ils n'ont aucune chance d'échapper à l'AGM-88». Ce qui n'est pas clair jusqu'à présent, c'est la manière exacte dont les Ukrainiens lancent leurs missiles.
Pour atteindre sa portée maximale de 150 kilomètres, l'AGM-88 est idéalement tiré depuis un avion de combat. «Tiré depuis les airs, le missile peut capter bien mieux les signaux radars ennemis et déterminer ainsi la direction ou même la position exacte», écrit l'expert en armement Tyler Rogoway dans la site spécialisé The Drive:
Thomas C. Theiner avance des arguments similaires. Il estime plausible que les Ukrainiens utilisent l'AGM-88 en mode programmé, le missile étant fixé sur une cible avant le tir:
Le missile se dirigerait alors de façon autonome vers la zone cible, scruterait le signal radar ennemi et le suivrait jusqu'à sa source.
Au vu d'une défense aérienne russe «très active» même près de la ligne de front, Tyler Rogoway estime, toutefois, plus probable que les Ukrainiens tirent des AGM-88 depuis des rampes de lancement au sol.
Tyler Rogoway imagine même le scénario suivant: des avions ukrainiens provoquent et forcent les positions de défense aérienne russes à allumer leurs radars les rendant vulnérables aux missiles AGM-88. «Hormis les attaques de drones et d'artillerie, la défense aérienne russe n'a pas été beaucoup perturbée jusqu'à présent», écrit Tyler Rogoway, qui commente:
Mardi matin, une attaque présumée dans la région de Kherson – à plus de 150 kilomètres derrière les lignes russes – a déclenché des spéculations sur une autre utilisation possible du missile. Selon des témoins oculaires, un dépôt de munitions russe aurait été touché à Henitchesk, au nord de la Crimée.
It is reported about the detonation of Russian ammunition somewhere near Novooleksiivka and Genichesk, Kherson region. If the information is confirmed ~ 150 km to the front line.#Kherson #Ukraine pic.twitter.com/hSzuUpmhH2— Special Kherson Cat 🐈🇺🇦 (@bayraktar_1love) August 9, 2022
Ces dernières semaines, des dizaines d'attaques de ce type ont été menées loin derrière les lignes russes, vraisemblablement par des lanceurs de missiles à longue portée comme le Himars américain ou le Mars II allemand.
Or, les munitions livrées jusqu'à présent à l'Ukraine pour ces systèmes d'armes ont une portée maximale d'environ 80 kilomètres. On ne sait donc absolument pas qui ou quoi a déclenché l'explosion si profondément en territoire occupé par la Russie.