Si vous circulez en France, vous en croiserez certainement. Elles ont quatre roues et un volant. Mais on ne peut pas vraiment parler de voitures. Les Français les appellent «voitures sans permis» (VSP).
La France s'est imposée dans ce domaine: l'année dernière, 31 400 nouvelles immatriculations y ont été enregistrées au total, soit la moitié de tous les véhicules de ce type vendus en Europe (63 000). Ce pays d'ingénieurs et d'automobiles a une longue tradition en matière de «sans permis», en témoignent des marques comme Ligier, Aixam ou encore Renault avec sa Twizy. Les prix sont parfois inférieurs à 10 000 euros (environ 9600 francs), mais peuvent atteindre 15 000 euros.
Souvent, ces VSP constituent un plan de secours pour les automobilistes qui ont perdu les douze points de leur permis de conduire français. Autrefois, elles avaient donc une mauvaise image. Elles offraient aussi une solution aux personnes âgées ayant rendu leur permis. Aujourd'hui, la clientèle s'est considérablement rajeunie. Cela s'explique également par l'âge minimum requis: en France, il est possible de conduire une VSP dès l'âge de 14 ans, après avoir passé un bref examen.
Dans des villes comme Paris ou Lyon, on voit de plus en plus de jeunes au volant de ces véhicules parfois cubiques. Et à la campagne, les parents préfèrent souvent offrir à leurs enfants un VSP à 8000 euros (ou pour un leasing 49 euros par mois) plutôt qu'une moto, jugée dangereuse.
Citroën a été le premier à constater que les VSP étaient devenues tendance chez les jeunes. La marque française bien établie a revisité son Ami et l'a entièrement électrifié. Le concept a immédiatement fait mouche: aujourd'hui, presque toutes les VSP vendues dans l'Hexagone sont électriques, et Citroën détient 57% des parts de marché avec ce seul modèle.
Nous montons dans une Ami et pouvons le confirmer: elle a été pensée pour les jeunes. Son intérieur est pop, avec une suspension dure et rudimentaire. Le tableau de bord ne comporte que quatre boutons: trois pour la transmission automatique et un pour les feux de détresse.
Il existe aussi une version Buggy. Le nôtre arbore un look vaguement tout-terrain et n'a pas de portes, mais deux barres métalliques de chaque côté. On se sent ainsi très proche de l'asphalte et des autres usagers de la route. Avec le vent, il vaut mieux attacher ses bagages légers sur le siège passager. De toute façon, il n'y a pas de place pour une valise. S'il pleut, on fixe la bâche en toile insérée dans le cadre de la porte.
L'Ami n'a aucun mal à suivre le rythme en ville; son moteur électrique accélère presque aussi vite que celui des autres Citroën. La loi interdit aux VSP de rouler à plus de 45 km/h: c'est la principale différence avec les voitures qui nécessitent un permis. Dans le trafic dense de Paris, la vitesse maximale ne représente donc pas un handicap. Nous n'avons été dépassés qu'une seule fois, par le conducteur nerveux d'une voiture de sport qui ne comprenait pas que sur un tronçon limité à 50 km/h, on puisse rouler à 45 km/h.
Le chef de produit «sans permis» pour Citroën, Alain Gouguec, détaille:
Il cite l'exemple d'une retraitée qui fait ses courses ou d'un étudiant qui se rend à l'université la plus proche, alors qu'aucun bus ne dessert son village isolé. Ou simplement une deuxième voiture pour une famille d'agriculteurs.
Les VSP ont l'interdiction d'emprunter les voies rapides et les autoroutes. Malgré tout, le risque d'accident est statistiquement plus élevé pour ces microvéhicules que pour les normaux. La faute en partie à la mauvaise réaction des autres automobilistes, mais aussi à l'inexpérience des jeunes conducteurs. Quand on roule en VSP et qu'on suit le flux de la circulation, on oublie vite qu'on se trouve au milieu de poids lourds et de 4x4 avec une sorte de pot de yogourt. Et le plus souvent sans permis de conduire.
Malgré tout, les ventes grimpent en flèche, et pas seulement en France. Les Italiens achètent des VSP comme la Fiat Topolino ou l'Estrima Biró, à trois roues. L'Espagne et la Finlande apprécient également le concept.
En Allemagne, l'âge minimum pour conduire une VSP est de 15 ans, en Suisse, comme pour les voitures normales, il est de 18 ans. Selon Alain Gouguec, les ventes d'Ami restent pour l'heure «anecdotiques» en Suisse. Peut-être qu'ici, il faut déjà se faire à l'idée de rouler sans permis.
(Traduit de l'allemand par Valentine Zenker)