
Dans le conflit entre l'Ukraine et la Russie, sous-estimer Poutine est «une grave erreur», avertissent plusieurs politologues.keystone
La majorité des experts considèrent que la démarche du président russe est folle. Mais ils peuvent se tromper. Deux politologues ont déroulé leurs arguments dans le magazine Foreign Affairs.
Cet article est également disponible en allemand. Vers l'article 23.02.2022, 17:0424.02.2022, 10:26

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Madeleine Albright a été secrétaire d'État américaine dans le gouvernement de Bill Clinton. Elle a aujourd'hui le statut de «Grand Old Stateswoman» de la géopolitique. Dans une chronique publiée dans le New York Times, elle porte un jugement accablant sur Vladimir Poutine:
«Au lieu de faire de la Russie une grande puissance, une invasion de l'Ukraine garantirait à Poutine de vivre dans la honte pour l'éternité. Son pays serait diplomatiquement isolé, économiquement affaibli et face à une alliance occidentale renforcée, stratégiquement vulnérable.»
Dans ce conflit, le fait qu'on ait plus ou moins laissé faire Poutine en 2014 ne devrait pas le rassurer. «Ce serait tout sauf une répétition des événements qui ont suivi l'annexion de la Crimée», a déclaré Madeleine Albright. «Ce serait plutôt un scénario qui rappellerait l'occupation soviétique ratée de l'Afghanistan».

Madeleine Albright.EPA/EPA
«Le fait qu'il dispose d'un arsenal d'armes nucléaires n'aidera pas non plus Poutine», poursuit Albright. Il sera un paria de la politique mondiale, entouré de «personnes comme Bachar-al Assad, Alexandre Loukachenko et Kim Jong-un».
Il y a cependant un «mais», et même un très gros. Les deux politologues Liana Fix et Michael Kimmage livrent une analyse complètement opposée de la situation dans le magazine Foreign Affairs.
Les deux politologues rappellent la guerre civile en Syrie et l'appréciation des événements. Et, à l'époque aussi, on disait que les Russes s'engageaient sur un terrain boueux dans lequel ils allaient s'embourber. Au final, cette supposition s'est avérée être une erreur. «Le gouvernement présidé par Obama n'a pas su anticiper ce qui se passerait si l'intervention russe réussissait», expliquent Liana Fix et Michael Kimmage. Résultat: la Russie est redevenue une puissance à prendre au sérieux au Proche-Orient.
Les deux politologues préviennent également que face à une action militaire russe, les Etats-Unis et leurs alliés ne sont absolument pas préparés à mettre en place un nouvel ordre de sécurité pour l'Europe.
Que se passera-t-il si Poutine met tous les atouts de son côté et gagne? Voici un résumé en sept points:
- L'Otan perdra sa crédibilité. «Toute idée selon laquelle l'Otan pourrait continuer à garantir la paix sur le continent deviendrait un artefact d'un temps révolu», déclarent Liana Fix et Michael Kimmage.
- Les Etats-Unis et l'Europe se retrouveraient dans une guerre économique permanente avec la Russie.
- Les comparaisons avec la guerre froide deviendraient désuètes. «Au contraire, une occupation russe de l'Ukraine ouvrirait une vaste zone de déstabilisation et d'insécurité qui s'étendrait depuis l'Estonie et la Pologne jusqu'à la Turquie et la Roumanie», analysent Liana Fix et Michael Kimmage.
- La position de l'Allemagne en Europe serait considérablement affaiblie. «Parce qu'elles disposent d'une puissance militaire plus forte, la France et la Grande-Bretagne prendraient le contrôle de l'Europe», expliquent-ils.
- Les Etats de l'Est comme l'Estonie, la Lettonie, la Lituanie, la Pologne et la Roumanie devraient accepter davantage de troupes de l'Otan sur leur sol.
- Des millions de personnes fuiraient l'Ukraine. Une guérilla sanglante éclaterait dans les parties du pays qui ne seraient pas immédiatement vaincues.
- La vague de réfugiés donnerait du grain à moudre à l'extrême droite dans toute l'Europe. Et Poutine l'exploiterait à son avantage.
- Les Etats-Unis devraient repenser leur stratégie géopolitique. En effet, le gouvernement Biden voulait se préparer à tenir la Chine en échec. «Un succès de la Russie en Ukraine signifierait que les Etats-Unis devraient à nouveau se tourner vers l'Europe», selon Liana Fix et Michael Kimmage.
Sous-estimer Poutine est donc une grave erreur, avertissent-ils. «Une victoire de la Russie en Ukraine n'est pas de la science-fiction».
On peut aussi faire appel à l'histoire ou à William Shakespeare. Le comportement du président russe fait certes penser à un roi complètement fou, mais comme le disait déjà Polonius dans Hamlet: «De la folie, mais qui ne manque pas de méthode.»
Traduit de l'allemand par Nicolas Varin
En déplacement dans la très conservatrice Caroline du Sud, l'accusé-candidat a fait mumuse avec un Glock à son effigie. Le hic? Aux Etats-Unis, la loi interdit quiconque ayant des ennuis avec la justice d'acquérir une arme.
Le coup est parti tout seul. On parle bien du coup de comm', car personne n'a été blessé (physiquement). Lundi, Donald Trump s'est envolé pour Summerville, histoire d'incarner sa campagne présidentielle dans l'un des Etats les plus racistes du pays, la Caroline du Sud. (Pour dire, ce n'est qu'en 2015 que le parlement de Charleston a daigné retirer le drapeau confédéré de son toit.)