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Pourquoi la Russie censure Facebook, mais pas Whatsapp

Pourquoi Whatsapp a survécu à la censure russe. watson
Facebook et Instagram sont désormais interdits en Russie, mais pas Whatsapp.Image: shutterstock

La Russie a de bonnes raisons de censurer Facebook, et pas Whatsapp

Les applications de Meta ont été bloquées en Russie car menant des activités «extrémistes». A une exception près: Whatsapp, qui présente de féroces arguments en sa faveur. Sauf qu'un nouveau concurrent, bien connu du public occidental, pourrait bientôt changer la donne.
26.03.2022, 15:5908.05.2023, 12:11
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La décision a eu l'effet d'une bombe. Au cours de ces dernières semaines, un tribunal de Moscou a interdit Facebook et Instagram d'opérer dans le pays. Comme de nombreux médias occidentaux déjà bannis du territoire, leur société mère Meta a été jugée coupable d'actions «extrémistes». Le représentant du Service fédéral de sécurité de la Fédération de Russie, Igor Kovalevsky a expliqué durant l'audience relayée par l'agence de presse russe Tass que les activités de la société fondée par Mark Zurckerberg étaient «dirigées contre la Russie et ses forces armées».

Ce jugement a de quoi interroger. Car parmi les principales propriétés de la société américaine, une seule est passée entre les gouttes: Whatsapp. Le tribunal a estimé que la célèbre application mobile «manquait de fonctionnalités» pour diffuser publiquement des informations.

«Pourquoi seuls certains des produits de Meta sont considérés comme extrémistes? Ce n'est absolument pas rationnel», a réagi Kevin Rothrock, rédacteur en chef de l'édition anglaise du média russe Meduza. Pour d'autres pourtant, ce positionnement erratique se justifie à travers deux principaux arguments.

Soumis au succès

Le Kremlin semble avoir été forcé de capituler face au succès national de Whatsapp. Comme le démontre Statista, qui a analysé le nombre mensuel moyen d'utilisateurs des applications de Meta en Russie au cours du mois de janvier 2022, la plateforme de messageries instantanées rafle la palme d'or. Elle dépasse Instagram puis Facebook avec près de 84 millions de personnes l'exploitant. C'est un peu plus d'un Russe sur deux.

Pour Alena Epifanova, chercheuse au Conseil allemand des relations étrangères citée dans le magazine américain Wired, interdire l'accès à un tel mastodonte de la communication induirait un contrecoup politique trop important. Le but de l'Etat est ainsi de diminuer au plus possible les dommages collatéraux, a-t-elle déclaré, ajoutant qu'en Russie, l'application numéro 1 était «politiquement neutre»:

«L'Etat ne veut pas risquer un tollé auprès des personnes qui ne sont pas vraiment politisées, mais utilisent WhatsApp pour leur vie privée»
Alena Epifanova, chercheuse au Conseil allemand des relations étrangèreswired

Equivalent inexistant, enfin...

La popularité de Whatsapp n'est pas l'unique explication qui justifie l'inconsistance de la décision du tribunal de Moscou. Leonid Volkov, cofondateur du groupe de défense des droits numériques russes s'étant entretenu avec Wired, a pointé le fait qu'il n'existe, à ce jour, aucune alternative compatible à l'application gratuite.

Lorsque Facebook et Instagram ont été interdits, Mark Zuckerberg, fondateur de Meta, a confirmé ne pas vouloir supprimer certains messages hostiles à l'armée et aux dirigeants russes.
Lorsque Facebook et Instagram ont été interdits, Mark Zuckerberg, fondateur de Meta, a confirmé ne pas vouloir supprimer certains messages hostiles à l'armée et aux dirigeants russes.keystone

En prohibant l'utilisation d'Instagram et Facebook, Whatsapp - dont l'audience surpasse celles des deux autres entreprises de Mark Zuckerberg - pourrait conduire ses utilisateurs à faire de la plateforme de messageries la nouvelle et unique force informative dans le pays. En ce sens, comme conclut Leonid Volkov: «WhatsApp pourrait ne pas rester longtemps sans remplaçant russe». D'ailleurs, une autre application de messagerie, bien connue des Occidentaux, semble monter dans les statistiques.

Solution par et pour les Russes

Cette application, c'est Telegram. Une création russe ayant déjà fait ses preuves à l'international. Depuis quelques semaines, en Russie, elle semble se positionner comme le nouveau refuge numérique de ceux anticipant déjà la mort de Whatsapp sur le territoire. Dans un article de Reuters datant du 21 mars, l'opérateur de téléphonie mobile Megafon a signalé, d'après ses propres analyses:

«La popularité du service Telegram a augmenté dans le contexte des restrictions d'accès aux autres messageries et réseaux sociaux»
Megatron

«Telegram est passée de 63% au cours des deux premières semaines de mars, contre 48% au cours des deux premières semaines de février», a poursuivi l'opérateur. Alena Epifanova a indiqué qu'en réaction, ICQ, une autre messagerie russe appartenant à VK Group, le groupe détenant également Telegram, était actuellement mise en place par le Kremlin lui-même: «Je pense que cela fait partie d'un projet plus vaste visant à [remplacer] chaque plateforme de médias sociaux ou messagerie instantanée américaine par un service contrôlé», a-t-elle signalé en estimant que l'ICQ avait de fortes chances d'être un échec.

Quand les app de rencontre sont détournées de leur fonction première

Le Kremlin poursuit sa répression contre les personnes et les entreprises qu'il juge problématiques. Au début du mois de mars, le Parlement russe a adopté une loi imposant une peine pouvant aller jusqu'à 15 ans d'emprisonnement pour diffusion intentionnelle de «fausses» informations sur l'armée. (mndl)

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