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Andrew Tate

Hannah Pearl Davis déteste les «femmes modernes»

Andrew Tate a laissé un grand vide dans le garage numérique des masculinistes. Et Hannah Pearl Davis, 26 ans, en a bien profité.
Andrew Tate a laissé un grand vide dans le garage numérique des masculinistes. Et Hannah Pearl Davis, 26 ans, en a bien profité.twitter/montage: fred valet

Hannah Pearl Davis, la masculiniste qui déteste les «femmes modernes»

Elle est bénie sur Youtube et régulièrement bannie sur TikTok. L'Américaine de 26 ans a profité des déboires judiciaires en Roumanie de son misogyne de mentor, Andrew Tate, pour muscler son audience. Parcours d'une jeune réactionnaire très agressive, qui cajole la testostérone et malmène les féministes.
26.03.2023, 08:0526.03.2023, 18:54
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«Les femmes d'aujourd'hui sont-elles égoïstes et privilégiées?», «les mères célibataires sont-elles narcissiques?», «que faire des mensonges du féminisme?», «pourquoi les Occidentales sont de bonnes épouses?», «les femmes d'aujourd'hui se mentent-elles sur leur propre poids?». Comme beaucoup de pourvoyeurs de contenus aujourd'hui, Hannah Pearl Davis ne coupe pas les cheveux en quatre lorsqu'il s'agit de coiffer un débat.

Aux extrêmes, gauche ou droite, progressiste ou conservateur, internet se fout pas mal de la nuance ou du contradictoire. Ça papote entre gens qui postillonnent la même opinion, dans des micros branchés dans la plus féroce des connivences. Cette Américaine de 26 ans est-elle vraiment aussi anti-féministe, masculiniste et réactionnaire qu'elle le prétend all day long? C'est en tout cas le créneau qui lui a offert ses véritables premiers émois d'audience, il y a un an.

En mai 2022, la dame est passée d'un modeste vivier de 25 000 abonnés à plus de 500 000 groupies sur Youtube. Des hommes, pour la plupart, qui ont trouvé en cette agressive gourou de la testostérone une voix qui les aime, les comprend et passe son temps à les défendre. Un public qui est grosso modo le même que celui des (nombreux) mâles alpha des plateformes, Andrew Tate en tête. Depuis ses gros tracas judiciaires en Roumanie, où l'homme est notamment accusé de trafic sexuel, Hannah Pearl Davis a manifestement comblé un vide: près d'un million et demi de fans sont désormais pendus à ses lèvres.

Un temps, Pearl a aussi bénéficié du couple qu'elle formait avec Oneya Johnson, aka la star @angryreactions sur TikTok.
Un temps, Pearl a aussi bénéficié du couple qu'elle formait avec Oneya Johnson, aka la star @angryreactions sur TikTok.

Comme beaucoup de proto-youtubeurs, JustPearlyThings a commencé à se filmer en parlant d'elle, de son quotidien, de ses grosses tristesses et de ses petites joies. En 2020, pas la moindre trace de propos violents, clivants, militants. Des anecdotes ordinaires, comme cette fois où papa avait eu la bonne idée d'acheter un toboggan gonflable pour la piscine.

Sauf qu'il faut souvent être fâché et à contre-courant pour connaître une ascension fulgurante sur la bande passante. (Ou consentir à se dénuder, mais c'est une autre histoire.) En empoignant la guerre des genres, celle qui a grandi en banlieue de Chicago entourée de neuf frères et sœurs (et presque autant de pièces dans la maison), a rapidement compris qu'il y avait de quoi se faire du fric. Ces premiers succès, Pearly les obtiendra en bricolant des quiz de rupture sur TikTok, en mode «donne-moi des détails sur ton couple et je te dirai pourquoi on t'a largué».

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C'est en déballant les chagrins d'amour de milliers d'internautes qu'elle saisira l'immense potentiel polémique de la joute sexuelle entre hommes et femmes. Nous sommes en 2021, elle compte encore réussir ses examens dans le digital media management, mais parle déjà de business et bichonne son blase sur toutes les plateformes. Puis vinrent la mode des podcasts et son brassage de punchlines à plusieurs.

Une année plus tard, Pearl commence à fricoter avec les voix masculines les moins fréquentables de Youtube. Un certain Ben Shapiro va attirer son regard. Ce journaliste, podcasteur et avocat californien, ultra-conservateur pro-Trump, se montre toujours un poil susceptible lorsque les médias généralistes l'assimilent à l'alt-right américaine. C'est en tout cas un gueulard de première, en guerre contre tout ce qui tutoie de près ou de loin le progressisme.

Ce radicalisme aura un impact décisif sur la jeune Pearl qui, depuis, s'est lancée à corps perdu dans une croisade contre les «femmes modernes». Entendez par là, celles qui ne respectent pas leur époux, font des gosses toutes seules et se fringuent comme des garçons.

«Beaucoup d'entre vous sont des femmes de merde. Vous méritez que votre homme vous trompe»
Hannah Pearl Davis dans une vidéo récente sur Youtube, visionnée à plus de 3,5 millions de reprises. Son propos? «Vous ne cuisinez pas pour votre homme, vous le rabaissez, vous le harcelez tout le temps. Vous ne le traitez pas comme un homme.»

Un exemple qui situe bien le prisme emprunté dans chaque vidéo. Il y a quelques semaines, une grappe de femmes «indépendantes», réunies autour de Miss Pearl, exposaient pléthore de regrets pour avoir osé privilégier une carrière professionnelle et négliger leur foyer. Dans le lot, une dame de confession musulmane, des jeunes, des moins jeunes, une femme noire, une blanche. Là encore, personne n'a le même quotidien, mais tout le monde est d'accord: «Maintenant on veut de vrais hommes».

Une femme dans le public:

«Je n'avais jamais vu de musulmanes travailler autant d'années, ce n'est pas ordinaire»

La réponse de la femme musulmane:

«C'est vrai. J'étais programmée sur un mode occidental, être une femme forte, gagner son propre argent. Je dénigrais finalement la réalité de ce que doit être une famille: l'homme est le chef, il doit avoir le dernier mot. Et moi je dois me concentrer sur les enfants, les nourrir et faire en sorte que tout le monde se sente bien à la maison. C'est comme ça.»

Récemment, Hannah Pearl Davis s'est mise en tête qu'il fallait défendre Andrew Tate et douter de la justice roumaine en ce qui concerne l'enquête qui est tombée dru sur son mentor. Par l'intermédiaire de nombreuses prises de parole à haute valeur polémique, l'influenceuse évoque carrément un «coup monté par les féministes». Logique, elle les déteste et les accuse de harceler les hommes et de «détériorer la qualité de vie des femmes».

Mais ne la traitez surtout pas de misogyne. Pearl «aime profondément les femmes. La misogynie, c'est la haine des femmes». Et il semblerait qu'elles le lui rendent bien. Si les mâles sont nombreux à suivre ses émissions en ligne, ses congénères l'élèvent en héroïne qui «ose dire les choses comme elles sont».

«Beaucoup de femmes me suivent parce qu'elles aussi voient qu'il y a un gros problème aujourd'hui avec les féministes»

Interrogées par Insider, plusieurs créatrices de contenus considèrent que Pearl est «l'exemple typique de ces filles qui ont parfaitement intégré le patriarcat». Cité par le même média, un sociologue spécialisé dans les nouvelles technologies rappelle enfin que «même les gens bien intentionnés peuvent se complaire dans la propagation de propos clivants ou haineux, si le succès est au rendez-vous».

On ne saura probablement jamais si Hannah Pearl Davis est une véritable masculiniste ou une simple influenceuse qui a pigé que promouvoir le mâle alpha est plus rentable que de causer mode ou gaming. Reste que la ligne éditoriale de cette «Andrew Tate au féminin» ne risque pas de s'adoucir de sitôt. Et c'est plutôt cocasse, sachant que sa maman a longtemps siégé au conseil d'administration de l'Organisation des nations unies femmes (ONU femmes), aux Etats-Unis, la branche onusienne qui soutient ardemment les programmes d'égalité des sexes.

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