Ce mois-ci, des cerveaux américains se sont penchés sur la couleur politique de l'intelligence. Vaste sujet, n'est-ce pas? Ne vous inquiétez pas, l'article est très court et la conclusion de leur travail semble sans appel: une personne intelligente serait irrésistiblement attirée par les idées de gauche. Voilà. Mais, attention, ça ne veut pas dire qu'il suffit de se croire de gauche pour devenir intelligent. (Faut pas pousser.)
Vous allez nous dire que les «libéraux» au pays de Jeff Bezos n'ont rien à voir avec nos «libéraux» bien de chez nous, mais ce n'est pas le moment de chipoter. L'Université du Minnesota en est persuadée, avec quelques points de Q.I. de plus, paf, nous voilà soudain «plus socialement libéraux et moins autoritaires». A ce stade, pas mal de blagues populistes nous montent au cerveau, mais restons concentrés parce que l'étude se veut sérieuse. Et notamment parce que son ampleur n'a rien d'une vaste plaisanterie.
Ces chercheurs américains ont étudié pendant des mois plus de 200 familles, pour accoucher d'un tel affront politique. Sous leur microscope, tout un tas de choses comme l'«orientation politique, l'autoritarisme, l'égalitarisme, le libéralisme social et le conservatisme fiscal». Mais pourquoi tant d'effort? On vous abandonne à cette justification toute scientifique:
Oui, on parle bien des «capacités cognitives». Autrement dit, l'habilité qu'à notre cerveau de «nous permettre d'être en interaction avec notre environnement». Une compétence qui ne requiert pas forcément dix ans à Harvard. Parce qu'on vous voyait venir avec vos grands chevaux, les bras chargés de «ouais, mais l'intelligence, ça veut tellement rien dire, genre, ma sœur elle a une belle intelligence émotionnelle». Sans doute!
Tenez, à propos de fratrie, les chercheurs du Minnesota avaient tout prévu. Pour être en mesure de se concentrer uniquement sur les influences génétiques, ils ont calé une sourdine sur l'éducation et les facteurs environnementaux:
Vous l'aurez compris, à environnement et éducation identiques, un jeune être humain intelligent «était plus susceptible de pencher vers des convictions politiques de gauche que son frère ou sa sœur moins intelligente». Attention (bis), l'étude ne dit pas que seul un bon le Q.I. vous expose au risque d'intégrer le Parti socialiste. Et le patron de cette bande de chercheurs semble tout à fait conscient d'avoir lâché une bombe inutile et incontrôlable: «Il est très tentant de tirer des conclusions sur la véracité d’une idéologie en se basant sur l’intelligence de ses partisans». Ben tiens.
Tobias Edwards parlait-il d'Elon Musk sans oser le nommer? Mystère et boule de gomme. De notre côté, ne sachant pas trop quoi faire de cet afflux d'intelligence en provenance de la gauche, on a décidé de glisser un résumé de l'étude dans le fil WhatsApp de Philippe Nantermod, un peu comme une patate chaude sur une journée déjà bien chargée. Sa réaction fut évidemment à la hauteur d'un doux provocateur de droite:
– «Je peux vous citer?»
– «Oui, oui. Et vous pouvez rajouter qu'à droite, on mange comme des cochons.»
Tout en nous excusant de l'avoir dérangé pour si peu, une question, soudain, envahit nos capacités cognitives: faut-il être de gauche pour faire un bon chercheur en psychologie de l'université du Minnesota? Le mieux, ce serait encore de la poser à une intelligence artificielle, histoire d'éviter le crispation politique.