OrelSan, 40 ans, a été le triple lauréat vendredi soir à Paris pour le clip de La quête, la chanson de l'année pour ce même titre et le concert de l'année. Avec douze Victoires, le rappeur normand dépasse désormais les monuments Johnny Hallyday et Alain Souchon, dix trophées chacun. Il n'est plus qu'à une longueur du record de treize trophées, codétenu par -M- et Alain Bashung.
Voilà qui n'arrange pas la situation pour une cérémonie accusée de récompenser les mêmes artistes par vagues. Calogero, président d'honneur des Victoires, a d'ailleurs profité de cette tribune pour tacler certains décideurs de l'industrie musicale et les inciter à aller dénicher davantage de nouveaux talents. Le chanteur s'en est pris, sans nommer personne, aux responsables guidés par des études publicitaires: «On n'enferme pas les artistes. On ne les façonne pas».
Dans la catégorie des habitués, Stromae, 37 ans, a remporté le titre d'artiste masculin de l'année et le prix du meilleur album. Il revient de loin. Après une longue pause causée par un burn-out, l'artiste belge a repris son envol avec l'album Multitude.
Oubliée la dépression, aggravée par les effets secondaires d'un antipaludique, qui avait cloué au sol le musicien longiligne il y a quelques années dans le sillage d'une tournée mondiale épuisante.
Stromae est remonté sur scène en 2022, une première depuis sept ans pour défendre le successeur de son album Racine carrée (2013, celui de la consécration). Avec Multitude, il a retrouvé la recette gagnante.
Une autre Belge, Angèle, 27 ans, a également réalisé un doublé avec la Victoire de l'artiste féminine et le titre de l'artiste féminine à l'album le plus streamé pour Nonante-cinq.
Il y a eu deux séquences émotion dans la cérémonie. Serge Lama a reçu une Victoire d'honneur, la 600e récompense attribuée dans l'histoire de la cérémonie, qui fêtait sa 38e édition. Il a reçu une ovation debout à la veille de ses 80 ans.
«J'étais très ému, car je savais que ce serait mon dernier soir devant un public debout. Cette victoire me fait très plaisir, car elle vient de la profession. C'était le bon moment: je m'en vais...», a confié à la presse celui qui ne chantera plus.
L'autre instant touchant fut November Ultra, sacrée révélation féminine, rappelant en larmes que sa mère lui disait: «Tu sais, les enfants d'ouvriers, c'est rare qu'ils deviennent artistes». Le Belge Pierre de Maere a été sacré révélation masculine.
Ce sont deux nouveaux visages trop rares et on entendra donc sans doute dans les jours à venir le refrain sur les Victoires qui reviennent trop souvent aux mêmes artistes. L'absence de prix spécifique pour des styles musicaux en vogue, comme l'électro ou le rap, a ainsi fait l'objet de nombreuses critiques.
De son côté, le rap, en dehors d'Orelsan, est également sous-représenté dans les catégories reines au regard de la scène francophone bouillonnante et de son hégémonie. Ninho, sacré avec une Victoire d'artiste masculin à l'album le plus streamé, n'était même pas présent pour recevoir son prix. (ats)