Caitlin Clark reçoit le ballon. Elle pose deux dribbles puis déclenche un tir en suspension. Bien qu'elle soit encore loin de la ligne à trois points, elle marque, évidemment. La basketteuse est une shooteuse de classe mondiale, même à très longue distance.
Ce panier là a néanmoins une saveur particulière. Et pour cause, il a permis à Clark de devenir la femme ayant inscrit le plus de points en NCAA. C'était avant qu'elle ne dépasse «Pistol Pete» Maravich quelques semaines plus tard. Avec un total de 3'830 points, elle est alors devenue la meilleure marqueuse de l'histoire du championnat universitaire, hommes et femmes confondus.
Au-delà de ses qualités de scoreuse, Caitlin Clark est exceptionnelle dans d'autres secteurs. Avec 8,8 passes décisives en moyenne cette saison, elle sait mettre ses coéquipières en valeur. Et par le passé, la native de Des Moines, Iowa, jouait au soccer à un très bon niveau.
Grâce à ses performances avec l'Université de l'Iowa, Clark dispose désormais de cornflakes à son effigie. Elle a également signé des contrats avec de grandes entreprises actives dans le secteur du sport. On pense à Nike et Gatorade. Au total, elle devrait empocher 3,1 millions de dollars rien qu'en 2024. A titre de comparaison, lorsqu'elle évoluera en WNBA (la joueuse effectue actuellement sa quatrième et dernière saison universitaire), son salaire dépassera à peine les 75'000 dollars annuel.
Si les contrats publicitaires de Caitlin Clark explosent, la basketteuse n'est pas la seule à profiter de la grande attention dont elle fait l'objet. L'ensemble du basket universitaire féminin est placé sur le devant de la scène. Là où elle évolue avec les Iowa Hawkeyes, la salle est pleine, souvent à guichets fermés. Le nouveau contrat de télévision négocié par la NCAA est en nette progression. ESPN versera désormais 65 millions de dollars par an pour la diffusion du March Madness au féminin. x12 par rapport aux précédentes éditions.
Le plus étonnant dans l'histoire de Caitlin Clark reste la manière dont elle a été dévoilée au grand public pour la toute première fois. Malgré ses brillantes performances sur le terrain, le sport n'a pas suffi à la faire connaître. Il a fallu une polémique. Celle-ci s'est produite l'an passé, en finale de la March Madness, le tournoi final du basket universitaire américain.
A cette occasion, Clarke était opposée à l'Université de Louisiane, emmenée par Angel Reese. Lorsque le match était plié, et que l'Iowa s'apprêtait à perdre, Reese a nargué son adversaire, avec un geste que Clark avait utilisé lors d'un match précédent. Angel Reese pointait aussi son doigt de manière à signaler que la bague attribuée au champion allait lui revenir. Alors que le geste de Clark n'avait pas été commenté, celui de Reese valait à la joueuse de nombreuses critiques.
Aux US, un débat a alors suivi pour savoir si cette différence de traitement était liée aux couleurs de peau. Reese a ainsi déclaré: «Quand d'autres le font, vous ne dites rien. Et moi au contraire, c'est tout de suite le ghetto». Clark lui a aussitôt apporté son soutien de manière publique, expliquant que ces gestes, et le trashtalk en général, faisaient partie du sport.
En déclarant qu'elle n'avait que du respect pour Reese, et qu'elle était même une grande fan de la joueuse, Clark a coupé l'herbe sous le pied de ceux qui souhaitaient voir naître une rivalité entre les deux.
Si la relation avec Reese est apaisée, Clark n'a pas toujours été aussi fair-play. Son frère s'en est rendu compte lorsqu'elle l'a poussé contre un mur lors d'un match de basket et qu'il a dû être recousu à l'hôpital. Ils n'étaient que des enfants. Pourtant, Caitlin Clark se montrait déjà compétitive. Selon le Washington Post, lorsqu'elle était âgée de 13 ans, ses parents auraient reçu un appel de son professeur de mathématiques. Il estimait que Clark «devait se détendre», car elle était dévastée après n'avoir obtenu que le deuxième meilleur résultat de sa classe à un test.
Cela montre que cette femme a toujours eu des objectifs élevés, et voulu être la meilleure. Elle était également comme ça lorsqu'elle jouait dans une ligue de garçons. Les parents des joueurs adverses n'appréciaient pas. Pour la simple et bonne raison que leurs enfants étaient généralement moins bons qu'elle.
Au collège aussi, la basketteuse ne parvenait pas à se contrôler. Elle était énervée lorsque ses coéquipières commettaient une erreur ou lorsqu'elle estimait que les décisions de l'entraîneur étaient mauvaises. Aujourd'hui encore, elle montre parfois son caractère colérique en s'énervant contre les arbitres ou en jurant après un lancer franc manqué. «Oui, je me mets en colère. Il y a des réactions dans le feu de l'action que je n'aime pas. Mais dans tout ce que j'entreprends, c'est d'abord la passion qui parle», reconnaît-elle.
Caitlin Clark se canalise de plus en plus et est même félicitée pour cela, et tout ce qu'elle fait, par les plus grandes stars de la NBA. Kevin Durant, Steph Curry, Lebron James: tous la surveillent et se montrent élogieux envers elle. Le phénomène Clark ne touche pas seulement le monde du sport. Le rappeur Travis Scott l'a ainsi décrite comme «l'une des plus grandes personnes de l'histoire».
La joueuse quittera bientôt le monde universitaire pour rejoindre la WNBA en mai. Après avoir conduit la NCAA femmes vers des sommets, elle pourrait faire de même avec cette autre ligue. Mais pour l'heure, Clark est en mission. Cette saison constitue son unique et dernière chance de remporter la March Madness. Elle doit pour cela commencer par battre l'Université du Connecticut dans la nuit de vendredi à samedi, en demi-finale.
Adaptation en français: Romuald Cachod.