Kit McConnell, le directeur des sports du Comité international olympique (CIO), vient d'annoncer la mort de l'une des plus anciennes épreuves olympiques du ski alpin: le combiné va disparaître et laisser place à une épreuve par équipes, en duo; un descendeur et un slalomeur uniront leurs forces. La nouvelle formule entrera en vigueur à partir des JO 2026 de Milan.
Après des épreuves tests lors des derniers Mondiaux juniors à Sankt Anton, la grande première pour les pros est actée à Kitzbühel, sur le circuit de la Coupe du monde en janvier 2024.
Mais derrière cette annonce, c'est un pan du ski qui s'en va, une passion de l'ancien temps qui s'effondre. Pour les amoureux de la tradition, le ski alpin, c'est le combiné. Ce dernier représentait les racines de ce sport.
Cette modification change la nature même du combiné alpin, créé en 1930 à Wengen (BE) et intronisé en 1932 aux championnats du monde de Cortina d'Ampezzo. Surtout, elle rend caducs les récits de nos grands-papas, qui contaient mille épopées des épreuves du ski-club du coin, des championnats nationaux dans les années 50; les plus fières têtes brûlées dévalaient les pistes avec leurs grandes lattes, et les plus fins techniquement usaient de leur toucher pour combler leur retard. Résultat: le plus complet remporte la mise. Mais l'héritage du passé n'est plus, désormais à ranger dans les livres souvenirs.
Le combiné alpin vivotait depuis plusieurs années, graduellement mis de côté par la Fédération internationale de ski (FIS) et les coureurs. En 2022 et 2023, cette discipline traditionnelle continuait à se maintenir sous perfusion, mais les athlètes n'avaient plus vraiment d'yeux pour le symbole de la polyvalence. Il est loin le temps des Pirmin Zurbriggen, Paul Accola, Ivica Kostelic, Michael Walchhofer, Bode Miller, ou encore le duo norvégien mythique Kjetil André Aamodt et Lasse Kjus. La quintessence de la polyvalence a fait son temps, la besogne était trop grande.
Depuis des années déjà, les anciens rappelaient que l'ultraspécialisation était le refrain des nouveaux champions. La quête de la performance et la forte concurrence obligent les techniciens et les spécialistes de vitesse à optimiser leur temps, à cibler au mieux leurs qualités pour performer.
Un argument avancé par les anti-combinés? La logistique est compliquée, avec du matos à empiler dans le bus. Surtout, c'est le temps à disposition qui coince: il y en a peu, chez les descendeurs, pour enchaîner les manches de slalom et se roder ainsi dans une autre discipline que la leur. La cadence affolante du calendrier met aussi à rude épreuve des corps très sollicités par les nombreux voyages.
Mais tous ces obstacles au combiné sont en contradiction avec la philosophie du ski: le grand globe de cristal, attribué au vainqueur du classement général, ne récompense-t-il pas le skieur le plus régulier et polyvalent de la saison? Alexis Pinturault, un irréductible, à l'instar de Marco Schwarz qui commence à percer en vitesse, persiste à jouer les funambules entre les virages courts et les tracés vertigineux. Loïc Meillard essaie lui aussi d'utiliser ses grandes qualités techniques sur des lattes de vitesse. Mais ces derniers amoureux du combiné forment une espèce en voie d'extinction.
L'absence de polyvalence et de reconnaissance pour celle-ci est désormais une évidence, et la disparition du combiné révèle que pour performer, il faut choisir ses batailles pour espérer régner.