«Randonnée en courant», «course en montagne» ou encore «expérience de course pour les amoureux de la nature»: le trail running a de nombreuses définitions. Traduite, cette discipline en plein essor signifie tout simplement «courir sur des sentiers». Autrement dit: les chemins étroits avec des obstacles comme des racines ou des pierres ne sont pas seulement gênants, ils sont l'essence de ce concept.
Même si le trail running est souvent assimilé à des courses en montagne, un environnement de haute montagne n'est en aucun cas une obligation. En Suisse, on trouve aussi des trails adaptés aux vallons du Jura ou même sur le Plateau.
Du randonneur soucieux de sa forme physique au coureur de l'extrême endurci, la discipline regroupe un public très varié lors de compétitions de plus en plus nombreuses. Contrairement aux nombreuses courses populaires sur des chemins généralement bien aménagés, les manifestations de trail running comptent beaucoup moins de catégories d'âge, mais davantage de parcours avec différentes distances.
A partir de 15 kilomètres et jusqu'à l'incontournable ultra-distance d'au moins 100 kilomètres, il y en a pour tous les niveaux. Mais rares sont les participants qui font la totalité du parcours en courant.
Après les championnats du monde professionnels qui se sont déroulés du 6 au 10 juin à Innsbruck, les courses populaires de trail running ont débuté mi-juin avec le semi-marathon d'Aletsch. Du Swiss Trailrun Pilatus au Swiss Iron Trail, en passant par le célèbre Eiger Ultra Trail (plus de 3000 participants), on trouve pratiquement chaque semaine jusqu'à la fin de la saison l'une de ces expériences extraordinaires en montagne.
Beaucoup de ces événements ont vu le jour au cours des dix dernières années. Pour l'année 2023, le Guide suisse des courses répertorie pas moins de 53 compétitions sous la rubrique «trail». Mais certaines disparaissent, car la logistique est lourde pour les organisateurs et la clientèle potentielle s'éparpille entre les nombreuses offres.
Comme le nombre de manifestations, celui des participants est en plein essor. Il y a plusieurs raisons à ce phénomène. D'abord, la pandémie de Covid-19: elle a nettement renforcé le besoin, déjà croissant, de faire du sport dans une nature isolée. La recherche d'aventures est également un fait de société observé.
Deux autres facteurs attirent les gens vers le trail running. D'une part, les messages et surtout les images sur les réseaux sociaux. Gabriel Lombriser, entraîneur national suisse et coureur de trail de la première heure, affirme qu'Instagram a exercé une influence importante.
Les nombreuses marques de sport outdoor sont un moteur très important. Certaines séries de courses portent le nom d'équipementiers, les meilleurs coureurs professionnels font même partie d'équipes sponsorisées par des marques, dont elles prennent le nom. Et comme les compétitions en montagne imposent justement des contraintes matérielles aux participants, l'équipement ne se limite pas aux chaussures, mais comprend également des bâtons, des gilets de course, des sacs à dos et même des lampes frontales.
Comme chaque gramme en moins compte, le marché des sports de plein air, lui aussi en plein essor, propose beaucoup de matériel high-tech coûteux qui, depuis longtemps, n'atterrit pas seulement dans les sacs des professionnels. En parlant de l'importance de lâcher du lest: lors des compétitions, nettement moins de 50% des participants courent avec des bâtons sur les distances les plus courtes. Plus le parcours est long et plus les montées sont raides et nombreuses, plus ce pourcentage est, logiquement, élevé.
Chez les professionnels, les meilleurs athlètes ne courent pas forcément sur les distances les plus longues. Chaque organisateur propose au moins un parcours de 100 kilomètres: ces derniers temps, il s'agissait manifestement de surenchérir par rapport aux autres manifestations en proposant une expérience extrême unique. Les participants qui le souhaitent peuvent par exemple parcourir 250 kilomètres et 18 000 mètres de dénivelé lors de l'Eiger Ultra Trail à Grindelwald (BE).
L'Eiger Trail fait partie de la série UTMB qui a, comme point d'orgue, l'Ultra Trail du Mont Blanc en septembre. Cette classique est organisée depuis 2003. Il est possible de valider son billet pour les si convoitées places au départ de l'UTMB lors de 36 compétitions de qualification qui ont eu lieu entre-temps. Ce circuit ne rappelle pas seulement l'Ironman d'Hawaï, il est carrément organisé par Ironman AG.
Les stars de la discipline, elles, se mesurent en revanche le plus souvent sur des parcours de l'ordre du marathon. La catégorie reine est la Golden Trail World Series avec sept manifestations. En Suisse, la classique Sierre-Zinal en fait partie. Ce circuit professionnel a sa propre chaîne de télévision (Golden Trail TV), qui a par exemple lancé il y a un an la série documentaire Chasing Dreams, une production de haut niveau avec de superbes images qui a fait un carton d'audience.
Le trail running ne s'adresse pas uniquement aux sportifs de haut niveau ambitieux. Dans les régions de montagne, cette discipline sert aussi à découvrir la nature et à attirer les touristes. Il existe déjà des livres présentant les plus beaux trails dans les Alpes suisses.
Le projet «graubündenTrailrun», soutenu financièrement par la Confédération et le canton des Grisons, est actuellement en cours pour renforcer les régions de montagne et optimiser le potentiel touristique. Dans ce cadre, des itinéraires sont balisés, des cartes et des descriptions sont distribuées et des guides sont même mis à disposition pour les groupes.
Patrick Bertschi a participé à la conception de la formation de moniteur de trail running pour Swiss Athletics. Il connaît parfaitement ce sport. Selon lui, le besoin de liberté est très important pour de nombreuses personnes. Le trail running attire aussi davantage d'individualistes que les courses sur route traditionnelles.
La formation des moniteurs porte spécifiquement sur la technique de course – sur le terrain, en montée, en descente et par-dessus les obstacles – ainsi que sur la conduite de groupes, mais elle aborde aussi la planification des itinéraires, l'équipement et différents aspects de la sécurité.
Pour les jeunes coureurs de trail, Swiss Athletics propose un camp pour jeunes à Davos, dirigé par Gabriel Lombriser et son épouse Judith Wyder, qui vient de terminer deuxième aux championnats du monde d'Innsbruck.
Le couple organise chaque année un voyage de trail running en Sardaigne. Gabriel Lombriser dresse le portrait sociologique des participants:
Mais, même avec un budget limité, le trail running est accessible en Suisse, où les montagnes et la nature sont abondantes et proches des centres urbains.
Adaptation en français: Yoann Graber