Le parking de cet hôtel turinois est en pleine effervescence. Plusieurs véhicules sont stationnés. Un mécanicien nettoie une voiture, quand d'autres s'affairent à régler les vélos au millimètre. La scène est courante à un jour du départ du Tour d'Italie. Mais cette fois, une chose a changé: le logo de l'équipe Tudor Pro Cycling Team est présent partout.
La formation helvétique participe à sa toute première course de trois semaines. «C'est un moment privilégié. Le premier Grand Tour est bien sûr une étape importante», se réjouit Fabian Cancellara, le propriétaire de l'équipe. Sa Pro Team compte encore sur les invitations pour venir sur les plus grandes épreuves du calendrier. Mais elle a déjà tout d'une grande - elle intéresse fortement les organisateurs des trois plus grandes épreuves par étapes (Giro, Tour de France et Vuelta).
Il est bon de rappeler que la formation de Cancellara - sponsorisée par l'horloger genevois Tudor - n'a que deux ans d'existence. Le Bernois avait en effet annoncé la création de son équipe en marge du Tour de Romandie 2022. Aujourd'hui, ce Giro est l'occasion pour la marque Tudor de présenter une nouvelle montre de luxe, idéale pour les sportifs grâce à son poids défiant toute concurrence. Cette aventure italienne vient à point nommé pour en faire la promotion.
Nouvelle venue sur les Grands Tours, Tudor a actuellement fort à faire. Voici d'ailleurs ce que dit le CEO de l'équipe Raphael Meyer à ce sujet, sur le ton de la plaisanterie: «On dit que nous sommes d'abord une entreprise de logistique, qui fait ensuite des courses de vélo». Il n'a pas véritablement tort. Les 21 étapes du Giro ne mettent pas que les cyclistes à rude épreuve. L'équipe est venue avec 20 assistants et huit chauffeurs, et tous sont à pied d'œuvre.
La veille du départ, l'ambiance n'est pas agitée. Les roues sont toutes parfaitement alignées dans le camion des mécaniciens. Ces derniers ne chômeront pas durant les trois semaines de course - ils adapteront les vélos au jour le jour, selon les conditions météorologiques et le profil des étapes.
En Italie, chaque coureur dispose de quatre vélos classiques, en plus de deux machines de contre-la-montre. Et lorsque l'on connaît le coût d'un cycle professionnel de la marque BMC - l'équipementier de la formation helvétique (environ 15'000 francs), il y en a pour un joli pactole.
Desimpelaere et trois autres techniciens sont chargés de veiller à ce que les coureurs disposent du meilleur matériel. Il y a toujours un mécanicien dans chaque véhicule de direction, pour effectuer des réparations, si nécessaire. Le travail quotidien comprend également le nettoyage, et cela vaut aussi bien pour les vélos que les véhicules.
Cette propreté s'applique aussi au bus de la formation. «C'est le domicile des gars lorsqu'ils sont en voyage», explique le CEO de l'équipe, Raphael Meyer. Les coureurs sont amenés au départ dans ce bus. Et aussitôt l'étape terminée, ils y remontent dedans, pour se doucher et prendre une collation. De l'extérieur, il ressemble à un bus ordinaire, à la seule différence qu'il est décoré aux couleurs de l'équipe. Mais à l'intérieur, les différences sont grandes.
Il y a huit sièges confortables dans la zone avant, tous fixés individuellement près des fenêtres. A l'arrière, se trouve un salon cosy. C'est là que se regroupe l'équipe pour le briefing. Il y a également deux douches et deux toilettes. Elles sont certes étroites, mais restent largement suffisantes.
A côté du bus de l'équipe, se tient un véhicule qui s'apparente à un food truck. Mais le camion-cuisine de l'équipe Tudor est bien mieux que cela. Il permet de préparer des mets qui répondent aux besoins des athlètes de haut niveau. Deux chefs accompagnent l'équipe sur ce Giro. Si les coureurs dorment à l'hôtel, ils n'y mangent pas - ce serait trop risqué. «Avant, il y avait toujours des problèmes avec les hôtels», explique Bram Lippens, l'un des deux chefs de l'équipe Tudor.
Lors d'une course de trois semaines, l'alimentation est cruciale. C'est pourquoi un nutritionniste accompagne la formation helvétique sur ce Giro, en plus des deux chefs. Il veille à ce que les coureurs mangent suffisamment. L'époque où un copieux petit-déjeuner suffisait pour performer est révolue depuis longtemps. Les cyclistes doivent faire le plein de calories pour ne pas perdre leur énergie. Ils s'appuient pour cela sur des gels, des barres ou des poudres. «Parfois, le cyclisme, c'est aussi des mathématiques», explique Wallis. Les pros consomment environ 1000 kilocalories par heure. Ils doivent donc ingurgiter environ 120 grammes de glucides par heure pour tenir le rythme en course.
Tous les détails comptent pour performer dès une première participation au Giro, et ça, Tudor l'a bien compris. C'est pourquoi l'équipe s'appuie sur un staff expérimenté. Près de la moitié du personnel a déjà connu un Grand Tour. Les coureurs sont encore plus avertis.
Seul le Vaudois Robin Froidevaux, 25 ans, fait ses débuts sur le Giro d'Italia. Avec Matteo Trentin, Alberto Dainese et Michael Store, l'équipe compte trois coureurs de renom, ayant levé les bras à plusieurs reprises sur les courses à étapes. Tudor espère qu'ils feront de même cette année en Italie.
A long terme, les rêves de l'équipe Tudor sont encore plus grands. Le PDG Raphael Meyer a déclaré il y a quelques semaines que sa formation ferait tout pour porter un jour le «Rose» - en l'honneur de Gino Mäder. Le Saint-Gallois, décédé au Tour de Suisse, aurait dû courir pour Tudor cette saison. Son rêve était de triompher sur le Tour d'Italie.
Lorsque le Giro a débuté samedi par une étape de 140 kilomètres conduisant le peloton de Venaria Reale à Turin, de nombreux supporters se tenaient sur le bord de la route. Ils se faisaient entendre, surtout dans la montée de Superga, là où Tudor avait aussi ses propres fans. Mais l'exploit ne s'est pas produit lors de cette grande première. Michael Storer, le meilleur chez Tudor, s'est classé 30e. «Nos chances viendront», prévient Cancellara. Le Bernois a sans doute raison. Après tout, après 4 étapes, le même Storer pointe à une honorable 12e place au général.