Cette saison 2008 démente avait trouvé un vainqueur dans la bataille après un sprint final grandiose, jusque dans l'ultime tour.
Pour rembobiner, Felipe Massa rafle le Grand Prix du Brésil, à la maison, avant que la joie intense de la gagne ne laisse place à la mine défaite: Lewis Hamilton dépasse Timo Glock dans le dernier tour pour arracher la cinquième place d'un Grand Prix totalement fou. Le Britannique est sacré champion du monde, avec un seul point d'avance sur Massa.
Après la folie de Sao Paulo, rien d'irrégulier à relever. Le mal se niche bien avant, lors du Grand Prix de Singapour lorsque Nelson Piquet Jr., pilote de Renault, s'encastrait dans le mur. L'histoire du crashgate est lancée et fait rugir autre chose que les moteurs. Le 30 juillet 2009, Nelson Piquet Jr. témoigne auprès de la Federation internationale de l'automobile (FIA) et explique: «Pat Symonds, en présence de Flavio Briatore (réd: respectivement ingénieur et directeur de l'écurie Renault), m'a demandé si j'étais prêt à sacrifier ma course pour l'équipe en "provoquant une voiture de sécurité".»
L'idée: permettre à Fernando Alonso, lui aussi pilote Renault et l'un des favoris pour le titre mondial, de remporter la course. Comment? L'Espagnol, après un passage au stand, est bon dernier. Avec l'arrivée de la voiture de sécurité, les autres pilotes en profitent pour aller se ravitailler en carburant. Alonso, lui, a le temps de dépasser tous ses concurrents et se glisse jusqu'en première position derrière la voiture de sécurité. L'Espagnol remportera ce Grand Prix faussé, notamment au détriment de Felipe Massa (qui était parti en pole position).
Plus tard, l'affaire éclate et l'écurie Renault avoue la tricherie. Briatore et Symonds ont donc fait pencher la balance du côté d'Hamilton au détriment de Massa pour le titre suprême. Flavio Briatore, directeur de l'écurie au moment des faits, est exclu à vie.
Quinze ans ont passé et le scandale appartient aux souvenirs embarrassants du sport automobile. Mais voilà que Bernie Ecclestone en a remis une petite couche dans une interview au mois d'avril. Des aveux rapportés par le site spécialisé F1-insider.
L'ancien manitou de la F1 s'est même confessé et a exprimé des regrets, concédant qu'ils «auraient dû annuler la course à Singapour dans ces conditions».
Que faire? Les destitutions sont légion dans le sport. Les cyclistes tels que Lance Armstrong, Bjarne Riis, Alberto Contador, Floyd Landis se sont vu retirer des victoires sur le Tour de France. Même rengaine pour le Russe Sergey Bakulin, ancien champion du monde du 50 km marche, destitué de son sacre en 2011.
Felipe Massa demande désormais que la situation soit étudiée. Le lésé cherche à savoir s'il est possible de faire bouger les lignes. Saisir le Tribunal arbitral du sport (TAS)? Celui-ci n'est responsable que de la FIA lorsqu'il s'agit d'affaires de dopage.
Contacté, le TAS assure que le pilote brésilien n'est pas passé à l'action.
Selon l'avis d'un avocat spécialisé contacté, les éventuelles chances de succès dépendront des arguments avancés. Mais elles sont minces, sachant que les protestations ne peuvent être soumises que jusqu'à quatorze jours après la course en question. Ferrari, à l'époque, n'avait pas déposé protêt.
Surtout, les règles de la FIA stipulent que le classement du championnat du monde est fixé dès que la cérémonie de remise des prix a eu lieu en fin d'année. Point barre. Mais Massa s'est montré prêt à saisir le TAS. «Tout ce qui m'intéresse, c'est que la justice corrige la situation», explique l'ancien pilote Ferrari dans Motorsport.com. Il prend également en exemple le cas de Lance Armstrong.
Mais Felipe Massa n'a rien décidé mais clame haut et fort qu'il aurait claqué le championnat du monde si l'épisode du «crashgate» n'avait eu lieu.
Et si le TAS ne peut rien faire, la dernière chance d'obtenir réparation serait de déposer une plainte auprès de la Cour d'appel internationale (CAI). Mais si pour lui justice doit être faite, Massa, retiré des circuits de F1 depuis 2017, se dit «totalement heureux» et que si le titre 2008 lui revenait, «cela ne changerait rien» à sa vie.