Zlatan Ibrahimovic est le premier à le dire: il n'est pas arrogant. «Moi, je suis parfait en étant moi-même», lançait-il au micro de Canal+. L'actuel attaquant du Milan AC a toujours clamé que cette arrogance apparente n'était qu'une simple «confiance extrême» en lui.
Vraiment? Le joueur se plaît à parler de lui à la troisième personne, comme un certain CR7, et n'hésite pas à dire que «les Français sont réputés pour leur arrogance», le monde à l'envers... Mais c'est bien connu: chaque phrase de Zlatan contribue à assoir sa légende. C'est sa marque de fabrique, un jeu, une façade, un personnage.
Le fils d'immigrés slaves, parqué dans la banlieue ouvrière de Malmö, a été élevé pour devenir un champion. Déjà décrypté dans un film (I am Zlatan) et aujourd'hui dans un livre (Adrenaline), le gamin de Rosengaard voulait remplacer la tour Eiffel à son passage au PSG. Mais son héritage parisien sera verbal: son nom sera conjugué dans le Larousse.
Personne ne peut régater avec lui. En 2022, il expliquait à la Gazzetta dello sport qu'il ne souhaitait pas arrêter, mais «s'il voyait un joueur plus fort que lui, il se retirerait». Ou encore:
🗨️ "Depuis que j'ai quitté la France, il n'y a plus aucun sujet intéressant (...) Pourquoi ? Parce que vous n'avez pas Dieu."
— CANAL+ Foot (@CanalplusFoot) October 30, 2022
Quand Zlatan Ibrahimovic fait du Zlatan. pic.twitter.com/0vAKPbBBv8
Plus qu'un footballeur, il est devenu une figure. Ses phrases lunaires et le rayonnement qu'elles obtiennent nourrissent sa «confiance extrême». Dans cet entretien accordé à Canal+ le 30 octobre dernier, le Suédois pose un peu plus les bases de son égo.
Avant d'enchaîner face aux rires d'Olivier Dacourt:
Et Twitter s'embrase: les uns le trouvent horriblement prétentieux, l'intimant à se calmer tout de suite, d'autres y voient une énième facétie divertissante. Un numéro d'acteur, un rôle de composition qui colle avec sa prochaine apparition dans Asterix ou encore une récente pub H&M dans laquelle il jongle en short et fait son sport matinal sous les ordres de Jane Fonda.
Pourquoi lui et pas les autres? Au hasard: pourquoi Kylian Mbappé ne peut-il pas se permettre le dixième de cette «confiance extrême» sans être sévèrement réprouvé? Probablement une question d'éducation et d'image. Mbappé est l'étoile du football mondial, un athlète qui pense «fote» et qui mange «fote». Il ne joue pas la comédie: il est le sportif sans le personnage.
Pour Ibra, c'est une image de «bad boy» savamment travaillée, c'est le Chuck Norris du football. Il y a le footballeur et le personnage, la caricature du surdoué qui refuse obstinément l'autorité. Il est l'incarnation même de l'esprit anti-suédois.
Un code social où tout le monde est égal. Sauf Ibra. Lui n'en fera qu'à sa tête, dusse-t-elle dépasser.
Le narcissisme à son paroxysme, un pied de nez à la légende mancunienne Eric Cantona. Une réelle mine d'or pour s'amuser du joueur au grand nez? «Si c'était une mine d'or, je l'aurais déjà dessiné», nous répond du tac au tac Gérald Herrmann, dessinateur de presse et créateur de deux albums sur Roger Federer. Mais le natif de La Chaux-de-Fonds (NE) n'hésite pas à avouer une certaine admiration pour le Suédois. «Je le trouve plus intelligent que la moyenne. Il est dans la maîtrise, il s'est construit un personnage et il réussit à prendre le dessus sur les journalistes, à en jouer, plutôt que l'inverse.»
Avant de poser un regard amusé sur le personnage: «Il a peut-être conscience de faire partie d'une caste, celle des dieux grecques, des demi-dieux. Ces derniers sont pour lui les voisins du dessus, plus proches, plus forts, plus intelligents». Ibra s'est lancé dans une quête individuelle du pouvoir.
Pour le dessinateur, sans être catégorique, Ibra ne «croit pas en son personnage, mais une part enfantine y croit au fond de lui. Il nous montre qu'il est gonflé, mais il n'est pas dupe de son égomanie».