Quand on reçoit le champion d'Europe en titre, c'est forcément un match spécial. D'autant plus quand on est un club suisse et qu'on n'est, par conséquent, pas systématiquement qualifié chaque année pour la Ligue des champions. Pas étonnant donc qu'on ait assisté mercredi soir au Wankdorf à des scènes inhabituelles, voire même lunaires. Comme celle, par exemple, qui a eu lieu à la fin de la conférence de presse d'après-match de Pep Guardiola. Flashback.
Le coach-star de Manchester City prend congé de l'assistance, file vers la sortie mais est stoppé par un homme d'une cinquantaine d'années – au bénéfice d'une accréditation – qui lui demande un selfie. Le technicien accepte poliment, mais le staff de City douche vite les espoirs des trois ou quatre autres journalistes qui s'impatientent de faire, eux aussi, une photo avec le Catalan. «Guys! Guys! No, please!», peste la petite délégation mancunienne contre cette brochette d'opportunistes.
Autant dire que les entraîneurs de Super League qui viennent défier YB ne suscitent jamais autant de ferveur... Même le pourtant réputé coach de Leipzig Marco Rose était à des années-lumière de recevoir pareil accueil le 19 septembre dernier lors de la première journée de cette Ligue des champions.
Guardiola n'était bien sûr pas le seul Citizen à focaliser autant d'attention. Au bord du terrain, on a pu voir plusieurs pancartes artisanales réclamant leur maillot à Haaland, Akanji et Cie, toutes dans les secteurs réservés aux spectateurs bernois.
Ceux-ci ont d'ailleurs été bien plus actifs que les quelques milliers de fans de City. Pourtant plein, le parcage visiteur est resté étonnamment très discret, et ce malgré la victoire. C'est à peine si on a entendu trois ou quatre débuts de chants de toute la rencontre (avant et après-match compris), tout de suite étouffés par les décibels des fans bernois. Etonnant pour une cohorte britannique... On a aussi été surpris à l'extérieur du stade de croiser si peu de maillots des Skyblues, qui comptent pourtant une large communauté de fidèles sur toute la planète.
Le public de Young Boys a, lui, parfaitement répondu aux attentes que suscitait ce match de l'année en Suisse. Les titulaires des précieux sésames – 24 Heures évoquait des billets se négociant à plus de 160 francs pour une place debout et 500 pour la catégorie 1 – n'ont pas boudé leur plaisir. Dès l'échauffement, le kop titillait méchamment nos tympans et déployait une banderole géante encourageant les siens. Il remettait ça lors de l'entrée des équipes, avec un superbe tifo.
Contrairement au premier match contre Leipzig, dont le coup d'envoi juste après la sortie du boulot (18h45) pouvait justifier une certaine apathie pendant les premières trente minutes, les fidèles du Wankdorf se sont égosillés dès le début.
Sans pour autant que l'enceinte bernoise se transforme en chaudron turc ou grec, les hurlées collectives sur chaque récupération de ballon ou semblant d'occasion des «jaune et noir» nous rappelaient la particularité de ce match et de l'adversaire. Même le speaker, d'habitude très solennel, y allait de sa petite fantaisie à la 25e minute: juste après un arrêt miraculeux du gardien Anthony Racioppi, il scandait le nom du Genevois comme quand il annonce les buteurs.
Malheureusement, cette effervescence n'a pas permis à YB de créer l'exploit. Mais si ses supporters arrivent à se convaincre que le dernier duel de groupe à la maison le 28 novembre contre l'Etoile rouge Belgrade est un autre «match de l'année», ils pourraient donner un petit avantage à leur équipe.
Histoire de rêver d'un printemps européen (en Champions ou Europa League), avec de nouvelles ambiances grandioses. Et peut-être d'autres célèbres entraîneurs à protéger en salle de presse.