La simulation de Robert Mayer peut tout changer dans cette finale
Robert Mayer est tout à la fois: un formidable gardien de but et un acteur talentueux. Il l'a prouvé jeudi à Bienne. Son talent hollywoodien sur une scène en particulier jouera peut-être un rôle crucial dans cette finale.
A la 31e minute, les deux arbitres principaux annulent l'égalisation biennoise à 2-2 d'Etienne Froidevaux. Ils l'avaient pourtant validée dans un premier temps. L'entraîneur de Genève-Servette, Jan Cadieux, demande alors une vérification vidéo. Verdict final: le but est annulé. Le score reste de 2-1 pour les Genevois, parce que l'attaquant seelandais Mike Künzle a déséquilibré le gardien des Aigles, Robert Mayer, dans le territoire de but.
L'action litigieuse en vidéo
❌Der vermeintliche 2:2-Ausgleichstreffer des EHC Biel wird wegen Torhüter-Behinderung aberkannt. Das Bieler Publikum konnte den Entscheid logischerweise nicht wahrhaben. Was denkst du?#PlayoffsUndSuschtNüt I #IchbinFan pic.twitter.com/xwmMtvwOuZ
— MySports (@MySports_CH) April 20, 2023
Les images de la télévision sont claires: Künzle a touché Mayer. Le règlement ne permet pas d'autre décision que l'annulation du but. Voici ce qu'il dit:
Le contact en question – même s'il était accidentel – a eu lieu à l'intérieur du territoire de but et Mike Künzle aurait pu l'éviter. Il n'a pas été poussé dans cette zone par un adversaire et aurait pu quitter celle-ci dans la même direction qu'il y est entré.
De la colère et un héros du soir
Mais ce qui a fait réagir le public biennois, c'est la théâtralité de la chute de Robert Mayer. Elle est trop évidente. C'est vrai, elle ne remet pas en question l'annulation du but. Là-dessus, pas de doute. Mais les arbitres ont quand même pris une mauvaise décision: ils ont oublié de sanctionner le gardien genevois pour simulation (le règlement prévoit deux minutes de pénalité pour ce type d'anti-jeu).
Les Biennois se sont donc vu refuser d'abord un but puis une belle opportunité d'en marquer un en supériorité numérique. Un but qui aurait été très important, probablement décisif. La question est polémique, mais elle est justifiée: cette simulation de Robert Mayer décidera-t-elle du titre de champion suisse? La colère des Biennois est compréhensible. Elle a été matérialisée par des jets d'objets sur la glace. Oui, il y a eu beaucoup d'émotions.
Les Biennois ont certes réussi à égaliser à 2-2 en powerplay dans le dernier tiers-temps (50e). Mais 59 secondes plus tard, ils ont encaissé le 3-2 décisif, sur une réussite de Marc-Antoine Pouliot. Soit l'homme qui se trouvait sur le banc des pénalités lors de l'égalisation seelandaise. Il avait déjà inscrit le 1-1 à la 19e. L'attaquant canadien naturalisé Suisse a porté pendant cinq ans et demi le maillot du HC Bienne. Marié à une Biennoise, il est la réponse servettienne à Damien Brunner. Même âge, même style. Les mêmes mains rapides. La même intelligence de jeu.
Robert Mayer dans ses (belles) œuvres en vidéo
🛑Letzter Halt Robert Mayer! Was für ein Save von Genfs Torhüter! Nach 20 Minuten steht es im vierten Finalduell zwischen Biel & Genf 1:1.#PlayoffsUndSuschtNüt I #IchbinFan I @officialGSHC pic.twitter.com/jhQnDeDiR7
— MySports (@MySports_CH) April 20, 2023
Si le 2-2 de la 31e minute avait compté, le 2-2 (la vraie égalisation biennoise) de la 50e minute aurait déjà été le 3-2 pour Bienne. Dans ce cas, le 2-3 de Marc-Antoine Pouliot n'aurait pas existé. Le HC Bienne aurait gagné et pourrait désormais être champion après une victoire samedi à Genève. Beaucoup de drame, mais aussi, c'est vrai, beaucoup de conditionnel.
Douche prématurée et force de caractère
L'arbitre a aussi fait des siennes dans les rangs des Aigles. A la 17e minute, Marco Maurer, le rugueux défenseur qui assure la sécurité aux côtés du ministre de la défense Henrik Tömernes, a été envoyé à la douche. Sans qu'il ne s'assoie auparavant sur le banc des pénalités, et donc sans que son équipe doive jouer en infériorité numérique.
Que s'est-il passé? Une bousculade anodine devant la cage des Genevois vient de se terminer. Les joueurs s'éloignent de cette zone. C'est alors que Marco Maurer insulte un juge de ligne si violemment (on ne sait pas encore ce qu'il a dit) qu'il est immédiatement renvoyé aux vestiaires. Il n'y a qu'en cas d'insulte grave qu'une sanction aussi lourde est prononcée. Le numéro 47 des Grenat est suspendu pour le prochain match, samedi à Genève. Il n'a pas voulu prendre position après le match, déjà fraîchement douché dans le couloir des vestiaires. «Je ne dis plus rien du tout», a-t-il lâché.
Quelle est la raison purement hockeyistique de la défaite de Bienne? Elle est due en premier lieu aux aléas inhérents à ce jeu imprévisible sur surface glissante.
Les Biennois ont eu suffisamment d'occasions de but pour gagner ce match. Genève aussi, cependant. Les Aigles ont à nouveau dominé (32 tirs à 21). Leur grand mérite? Avoir eu assez d'énergie et de confiance pour surmonter le choc initial (être mené rapidement 1-0 et perdre Marco Maurer) et revenir dans le match.
Des titans et un powerplay stérile
Plus la finale est longue, plus il y a de drames. Plus les titans commettent des erreurs, plus ils sont susceptibles d'en commettre. La stabilité tactique se perd et le jeu devient totalement imprévisible. En demi-finale contre les ZSC Lions, les Biennois marquent 6 buts en 20 minutes de powerplay. Le powerplay est leur grande force. En finale, ils n'ont trouvé qu'une seule fois le chemin des filets en 19:26 minutes de supériorité numérique. Ils ont même encaissé un but jeudi (le 1-2 de Winnik à la 24e) à 5 contre 4. Le jeu de puissance est la plus grande faiblesse de Bienne dans cette série.
En finale des play-offs, la vérité d'hier est l'erreur d'aujourd'hui et peut-être le miracle de demain. Oui, en finale, ce sont les dieux du hockey qui jettent les dés.
Adaptation en français: Yoann Graber
