Les Mondiaux de biathlon se sont clôturés dimanche en République tchèque et les membres de la délégation française sont rentrés chez eux en sifflotant La Marseillaise. Avec un total de treize breloques (dont six en or), les Bleus ont terminé en tête du classement des nations. Ils n'avaient encore jamais obtenu autant de médailles au cours d’une même édition des Championnats du monde.
Les raisons du succès sont à chercher sur la piste et le pas de tir, mais pas uniquement. Car si les Français ont réussi leurs épreuves à Nove Mesto, c'est aussi grâce à ce qui peut sembler être un détail pour beaucoup, mais qui n'en est absolument pas un quand on dispute une compétition de quinze jours dans un pays étranger: le choix du logement.
Les Tricolores logeaient à l'Hôtel Ski, un trois étoiles plutôt bien noté (8,4/10) sur Booking.com et qui propose des chambres à moins de 100 francs la nuit, petit-déjeuner compris. Mais son grand avantage résidait surtout dans sa localisation, l'établissement étant implanté à seulement 200m du stade.
Les Bleus n'avaient pas besoin de prendre de bus, de subir le trafic ou d'attendre les collègues pour se rendre sur le site de compétition. La partie logistique s'en est trouvée simplifiée, et c'était une préoccupation de moins pour les athlètes et l'encadrement, qui ont pu se consacrer tout entier aux objectifs de performance. Bien sûr, la proximité des chambres avec le stade ne permettait pas vraiment de couper avec la compétition, mais les avantages ont largement compensé ce qui n'était finalement qu'un petit désagrément sans conséquence.
Surtout que les Français étaient la seule nation à loger à l'Hôtel Ski. Cette privatisation officieuse leur a permis de se sentir comme à la maison, une impression renforcée par l'hospitalité dont ont fait preuve les propriétaires de l'établissement, qui diffusaient Radio Nostalgie dans les parties communes.
Au final, il ne fait aucun doute que les conditions d'hébergement ont contribué au succès collectif des Bleus. «Ça fait forcément partie de la réussite», a reconnu Cyril Burdet, le responsable du groupe dames.
Ce n'est d'ailleurs pas la première fois qu'un camp de base transforme une équipe pour le meilleur. En 2010, les footballeurs espagnols étaient devenus champions du monde après avoir posé leurs valises dans une résidence ultra-sécurisée de Potchefstroom, où ils vivaient sous cloche. Protégés en permanence par 27 policiers, ils rejoignaient les terrains d'entraînement en empruntant un long couloir aménagé pour les tenir à distance du public.
Une sorte de bulle dans laquelle les joueurs de tennis se réfugient eux aussi en marge des grands tournois qu'ils disputent chaque saison. A New York, Roger Federer occupait ainsi tout le 16e étage du prestigieux hôtel Carlyle durant l'US Open. Il disposait de tout le confort nécessaire à sa performance, ainsi que des broderies «RF» sur les coussins, selon L'Illustré. Novak Djokovic, quant à lui, a pris l'habitude de se rendre à 38 km de Flushing Meadows, chez un ami dont la résidence et les terrains lui permettent de se déconnecter du tennis et de reprendre contact avec la nature.
Le succès des sportifs qui y logent peut même finir par transformer certains lieux en site de pèlerinage. C'est ce qu'est devenu pour beaucoup l'Hôtel Belvédère de Spiez, où le onze allemand a forgé son «miracle de Berne» (victoire 3-2 en finale du Mondial 1954 face aux redoutables Hongrois).
Une page d'histoire désormais référencée sur le site de l'établissement avec ces mots:
De nombreuses équipes de football continuent d'ailleurs de s'y rendre avant un match important. Le FC Saint-Gall, entraîné par l'Allemand Peter Zeidler, y avait ainsi posé ses valises avant la finale de la Coupe de Suisse 2022. «Quand ils sont petits, tous les Allemands apprennent rapidement deux expressions: l’esprit de Spiez et le miracle de Berne, avait justifié Zeidler dans 24 Heures. Je voulais aller là-bas sans forcément loger dans ce même hôtel. Le hasard a bien fait les choses. Pour deux nuits, cela nous coûte peut-être un peu plus cher qu’ailleurs, mais on pouvait se les payer.» La magie n'avait pas opéré pour Saint-Gall, finalement battu 4-1 par Lugano cette année-là.
Il reste désormais à savoir si l'esprit de l'Hôtel Ski guidera les biathlètes jusqu'à la victoire. Il faudra attendre un peu, mais pas trop longtemps non plus: Nove Mesto étant une étape traditionnelle de la Coupe du monde, on aura des premiers éléments de réponse dès la saison prochaine.