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«Tour de France»: notre avis sur la spectaculaire série Netflix

«Tour de France»: notre avis sur la série spectaculaire Netflix
Netflix s'attaque à la grande caravane du Tour de France avec sa série.Image: Netflix

Le Tour de France sur Netflix, le pitch de la souffrance

L'édition 2022 de la Grande Boucle a été suivie dans les coulisses par les équipes de Netflix et France TV. Une série qui doit plaire aux puristes et aux novices. Pari tenu?
07.06.2023, 16:5507.06.2023, 21:44
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Le peloton avance et tant que vous en êtes, vous vivez. Si vous en sortez, vous mourez. Cette phrase revient encore et encore, pour assoir la difficulté du vélo, cet ode à la souffrance narrée dans ce nouveau documentaire sportif sur la plateforme américaine.

Cette fois-ci, après la F1, le golf, le tennis, Netflix s'attaque à la grande caravane du Tour et son cirque ambulant. Une série de huit épisodes qui a pour but de rameuter de nouveaux fans, de caresser cette idée d'une nouvelle cote de popularité. C'est précisément la même recette (gagnante) que celle utilisée pour Drive To Survive sur la Formule 1; des ressorts semblables et une structure travaillée pour garder l'abonné sous tension, avec un zeste d'émotion pour humaniser ces cyclistes.

Une immersion spectaculaire qui prendra par la main les novices sans perdre les puristes. Le rythme infernal et le récit enserrent ces coureurs propulsés dans une mythique course de trois semaines, des funambules qui foncent à des vitesses approchant les cent à l'heure avec une mince couche de lycra sur le dos.

De l'athlète au directeur sportif, huit équipes participent à ce documentaire (AG2R Citroën, Alpecin-Fenix, EF Education-EasyPost, Groupama-FDJ, Ineos Grenadiers, Bora-Hansgrohe, Jumbo-Visma et Quick-Step Alpha Vinyl) et ouvrent leurs portes (ou entrouvrent) pour cerner les us et coutumes du monde du cyclisme.

Confidences et chutes

L'aspect tactique, les sacrifices, les chutes: QuadBox et Box to Box (derrière Drive to survive, Break Point et Full Swing) profitent de tendre le micro pour arracher quelques confidences. Jonathan Vaughters (ex-coureur chez US Postal) joue le jeu, revient sur son passé de coureur, son travail acharné à la tête de la formation EF-Education EasyPost, pour conjurer le sort du passé. A ses yeux, c'est une manière pour lui «de se racheter de ses erreurs». Il convoque les fantômes du dopage, incarnés par le collant Lance Armstrong, la peur de se faire pincer lors d'un contrôle inopiné:

«J'étais terrifié, je n'en dormais plus. Par contre, pour Lance, ce n'était pas la même histoire. Je crois qu'il dormais comme un bébé»
Jonathan Vaughters

Outre les confessions et les cours d'histoire pour les moins avertis, Vaughters revient au présent, à cette édition du Tour de France 2022 où l'équipe avait mis en place le «projet Stefan». Le solide rouleur suisse Stefan Bissegger était fin prêt, affûté pour se parer de jaune à Copenhague, lieu choisi pour lancer les hostilités. Hélas, la pluie et les routes danoises détrempées en ont décidé autrement: deux chutes et une valise de regrets.

Séquence affolement
sur les pavés

Bissegger à terre, la transition est tout trouvée pour un autre poissard: Primoz Roglic. Face caméra, le Slovène revient sur la défaite mortifiante de 2020 face au rouleau compresseur Tadej Pogacar (absent de ce documentaire):

«Parfois on manque de chance, mais je ne gaspille aucune énergie mentale à y repenser»
Primoz Roglic

On le verra dans cette série traîner ses maux après sa chute sur les pavés, une épaule disloquée en prime.

La chute de Roglic lors du Tour de France 2022

Cette séquence sur les pavés est peut-être l'un des épisodes les plus aboutis, les plus puissants: tout est réuni pour faire comprendre au spectateur la tension qui règne dans le peloton et dans les voitures suiveuses. Comme la série dans sa globalité, tout va à cent à l’heure. Et ce jour-là, chez Jumbo-Visma, les Wout Van Aert, Jonas Vingegaard et le directeur sportif Grischa Niermann ont sué pour rester dans le bras de fer pour le maillot jaune.

Le calme reviendra quand la balade fera un crochet dans les coulisses et l'intimité de certains coureurs. Une partie sera consacrée au portrait de Thibaut Pinot, avec ce je-ne-sais-quoi de poignant, spécialement quand il est raconté par son mentor de toujours, Marc Madiot. Le boss de la Groupama-FDJ en parle comme «un coureur romantique qui est perdu dans le monde moderne». Le grimpeur se livre, fend la carapace pour laisser échapper cette phrase: «Parfois, je me dis que je suis plus aimé que plus fort. Parfois, j’aimerais que ce soit le contraire. Il y a des jours où je préférerais être moins aimé et gagner plus de courses.»

Marc Madiot vit à fond les exploits de ses protégés.
Marc Madiot vit à fond les exploits de ses protégés.Image: Netflix

Des moments de souffrance qui emboîtent le pas au discours (habité) de Madiot, définissant le cyclisme comme une course à la survie. «La souffrance, c'est le coeur du cyclisme.»

C'est là où Tour de France: au coeur du peloton réussit son pari, en rendant le sport comme une exposition à la pression, où chaque coureur repousse les limites de la douleur, encore et encore, avant de pouvoir peut-être lever les bras.

Des couacs sans conséquence

Malgré la qualité évidente, une forme de redondance apparaît. Les discours de Madiot, par exemple, se répètent, ou même des âneries sont dégoisées par Steve Chainel: «Thibaut Pinot porte à bout de bras le cyclisme français depuis dix ans.» Quid de Julian Alaphilippe, Romain Bardet ou encore Arnaud Démare?

Si on se veut très pointilleux, la chronologie laisse à désirer, comme la narration autour du prologue inaugural. Les images font penser que Yves Lampaert, le lauréat, s'était élancé avant Stefan Bissegger. Mais le suiveur relèvera l'incohérence, tout comme d'autres «fissures temporelles» en raison de la structure en épisodes thématiques.

De petits couacs qui n'enlèvent rien à l'immersion tendue (presque suffocante) dans l'univers du cyclisme professionnel, pour saisir pleinement les fondamentaux de la petite reine. Le baisser de rideau formera un final en apothéose, sur les Champs, avec une prouesse de mise en scène pour basculer le spectateur dans la folie des pavés parisiens; la tension d'une arrivée au sprint, vécue et racontée par Fabio Jakobsen et Jasper Philipsen. Un régal pour les fans et un pari réussi pour Netflix.

Tour de France: au coeur du peloton

Vidéo: watson
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