Alexander Kilde a partagé dimanche matin une photo depuis l'hôpital avec la légende: «rafistolé». Le Norvégien (31 ans) s'est moins gravement blessé que ce que l'on craignait lors de sa chute dans le mythique Ziel-S près de l'arrivée de la descente du Lauberhorn.
Il ne reste que des contusions. Le petit ami de Mikaela Shiffrin a déjà été opéré de sa coupure au mollet et de son épaule déboîtée. Dans sa publication Instagram, il ajoute:
Trois fois en trois jours, l'hélicoptère de sauvetage a survolé la zone d'arrivée à Wengen. Jeudi, c'est Marco Kohler qui a été amené à l'hôpital. Diagnostic? Un genou totalement fichu. Vendredi, Alexis Pinturault se déchirait les ligaments croisés, du genou également. Et samedi, c'était donc au tour de Kilde. Après les accidents de ses confrères, Marco Odermatt s'est montré très amer à la TV:
C'est la réponse du crack nidwaldien à la question que beaucoup se sont posée ce week-end dans la station bernoise: le calendrier était-il trop chargé?
La plupart des acteurs de la Coupe du monde ont une opinion claire. «Oui», tranche Markus Waldner, directeur des courses de la Fédération internationale de ski (FIS). La réponse est la même chez Urs Näpflin, chef du comité d'organisation de Wengen. Christian Schwaiger, l'entraîneur de l'équipe allemande, surenchérit:
Par «choses vraiment graves», on comprend facilement: des morts.
Quand il s'agit de trouver un coupable à la situation actuelle, un nom apparaît rapidement: Johan Eliasch. Le Suédois est président de la FIS depuis juin 2021 et n'a depuis lors qu'un seul objectif: rendre le ski plus grand et plus global. Sa devise: toujours plus. Son modèle? Le football. Mais tous les skieurs et leurs staffs ne partagent pas cette vision des choses.
Certes, personne ne veut nommer Eliasch directement. Mais son nom se lit entre les lignes. A Val d'Isère, Marco Odermatt a parlé de «clowns à la FIS». Markus Waldner, le directeur des courses de la FIS, a aussi exprimé ses craintes après le Lauberhorn et ne veut plus prendre de risques:
13 descentes ont été fixées cet hiver en Coupe du monde, pour 45 courses au total. Christian Schwaiger, le coach allemand, ne décolère pas:
La Coupe du monde existe depuis 1967. La plupart des saisons, beaucoup moins de courses ont été organisées que cette année. Mais cet hiver ne constitue pas un record isolé. Lors de la saison 1985/86, 13 descentes avaient eu lieu. Pour l'exercice 2015/16, 46 courses étaient même fixées: 44 se sont déroulées, dont 11 descentes. Et il y a également déjà eu trois courses de vitesse à Wengen: en 2022, la station bernoise a accueilli deux descentes et un super-G.
La critique de la FIS envers les athlètes n'est-elle ainsi pas justifiée? La fédération estime que ces derniers ne prennent pas en compte leur marge de manœuvre et leur responsabilité personnelle quand ils attaquent le calendrier. Après tout, il n'y a aucune obligation de participer à une course, chacun est libre de définir son planning. La chute d'Alexander Kilde n'est-elle pas liée à sa propre volonté de se surmener? Odermatt répondrait à cette question ainsi, comme il l'a fait à Val d'Isère:
Cette façon de penser est compréhensible. Pour les skieurs, l'enjeu est de taille. Et notamment au niveau financier.
D'ailleurs, Markus Waldner souligne régulièrement que ce sont les athlètes qui demandent des courses de remplacement. Le président de Swiss Ski, Urs Lehmann, appuie:
Qui est donc à blâmer? La réponse n'est pas aussi simple. Il faudrait un dialogue. Le mécontentement des athlètes vis-à-vis de la FIS est palpable. Des cracks du circuit comme Odermatt ou Kilde n'hésitent pas à exprimer leur opinion. Ils méritent d'être applaudis pour cela. Mais la FIS est-elle à l'écoute?
Il serait souhaitable que l'instance faîtière associe plus clairement les skieurs à la planification du calendrier. En même temps, ceux-ci doivent prendre conscience que leurs revendications sont contradictoires. Pour l'instant, ils critiquent beaucoup et proposent peu. Une solution ne peut toutefois être trouvée qu'ensemble. Toutes les parties devraient donc s'asseoir autour d'une table.
Adaptation en français: Yoann Graber