Le procureur extraordinaire de la Confédération, Stephan Zimmerli, peut ouvrir une procédure pénale contre Peter Marti, lui-même procureur extraordinaire dans l'affaire Crypto. Le Département fédéral de justice et police (DFJP) a donné son feu vert mardi.
L'autorité de surveillance du Ministère public de la Confédération avait nommé Peter Marti comme procureur extraordinaire de la Confédération en janvier 2021 pour examiner de présumées fuites en lien avec «l'Affaire Crypto». Le magistrat fait maintenant lui-même l'objet d'une plainte, indique un communiqué du DFJP.
Un procureur extraordinaire de la Confédération, Stephan Zimmerli, a été nommé pour examiner les soupçons qui pèsent sur Peter Marti. Conformément au droit sur la responsabilité des employés de la Confédération, une autorisation est requise pour engager des poursuites pénales contre ce dernier.
La secrétaire générale du DFJP a signé cette autorisation. Dans le cas présent, elle l'a fait parce qu'il est impossible d'exclure que les infractions reprochées au magistrat soient réalisées. L'autorisation de poursuite ne dit cependant rien de la culpabilité ou de l'innocence de la personne visée. Cette question relève de la seule compétence des autorités de poursuite pénale, et non du DFJP.
Contacté par Keystone-ATS, Peter Marti a indiqué en soirée qu'il ne commentait ni le communiqué de presse du DFJP ni le fait qu'une personne accusée ait déposé une plainte contre lui en tant qu'enquêteur.
L'ancien porte-parole du conseiller fédéral Alain Berset, Peter Lauener, est au centre de l'enquête sur une fuite d'informations dans «l'affaire Crypto». Ces fuites dans la presse concernent un rapport établi par les commissions de gestion de l'Assemblée fédérale sur l'affaire. Ce sont ces commissions qui avaient porté plainte pour violation du secret de fonction en novembre 2020.
A l'époque, le procureur Marti a ouvert une procédure pénale contre deux employés du DFAE et contre Peter Lauener. Selon le SonntagsBlick, ce dernier avait été placé temporairement en détention préventive en raison d'un soupçon de violation du secret de fonction.
L'affaire Crypto a été révélée en février 2020. La CIA et les services de renseignement allemands (BND) auraient intercepté, durant des dizaines d'années, des milliers de documents via les appareils de chiffrement de l'entreprise zougoise Crypto AG. Grâce à des appareils truqués, la CIA et le BND ont écouté les conversations de plus d'une centaine d'Etats étrangers.
Les deux services de renseignement ont acheté l'entreprise zougoise à parts égales en 1970, en passant par une fondation du Liechtenstein. Le BND a quitté l'opération en 1993. Mais les Etats-Unis auraient prolongé les écoutes jusqu'en 2018 au moins.
Une enquête parlementaire a montré que le renseignement suisse savait depuis 1993 que des services de renseignement étrangers se cachaient derrière Crypto. Il a collaboré avec eux pour collecter des informations sur l'étranger. Problème: les chefs successifs du Département de la défense n'ont pas été informés. Le rapport pointait des lacunes dans la gestion et la surveillance du renseignement et concluait à une coresponsabilité. (ats/jch)