
Johanne Gurfinkiel. Genève, 2017.Image: KEYSTONE
Des associations genevoises antisionistes déposent plainte pour diffamation et calomnie contre le secrétaire général de la CICAD, Johanne Gurfinkiel.
16.04.2024, 18:4816.04.2024, 22:36
Des associations membres du collectif Apartheid Free Zone (AFZ) ont annoncé, mardi, à Genève, avoir déposé plainte pour diffamation et calomnie contre Johanne Gurfinkiel, le secrétaire général de la CICAD, la Coordination intercommunautaire contre l'antisémitisme et la diffamation. Cette communication fait suite aux propos tenus le 26 janvier par ce dernier sur la chaîne genevoise Léman bleue. Il y dénonçait l’existence de zones «Judenrein», sans juifs, analogie avec la politique nazie d’extermination des juifs.
Le secrétaire général de la Cicad réagissait à une déclaration d’AFZ, un collectif marqué à gauche, regroupant des associations culturelles, sociales et syndicales. Sur son site, AFZ s’engageait «à rejeter [à Genève] les projets culturels, académiques ou sportifs [israéliens] visant à détourner l’attention du crime d’apartheid». Pour AFZ, Israël est un Etat d’apartheid comme l’était l’Afrique du Sud.
Dans un communiqué publié peu après ses déclarations sur Léman bleu, Johanne Gurfinkiel écrivait:
«Imaginer qu'à Genève, ville des Droits de l'Homme, des lieux de culture censés favoriser l’échange entre artistes, intellectuels ou sportifs deviennent le théâtre de leur exclusion fait froid dans le dos. Une censure et un boycott qui touchent non seulement les Israélien-nes, mais également ceux qui coopèrent avec eux. Comment qualifier l’attitude de ces lieux culturels, centres sociaux, organismes sportifs, étudiants, humanitaires ou syndicaux qui s’associent à un tel appel?»
Johanne Gurfinkiel
Dans un temps marqué par une forte recrudescence des actes antisémites en Suisse après l’attaque du Hamas le 7 octobre dans le Sud d’Israël et la riposte israélienne à Gaza, le secrétaire général de la Cicad entendait protester contre la volonté d’AFZ de ne pas accueillir des juifs israéliens, au prétexte d’un lien avec l’Etat d’Israël.
«Monstrueux»
Travailleur social, Thomas Vachetta est membre du mouvement anticapitaliste Solidarités qui participe à la mobilisation en faveur des droits des Palestiniens. Il juge «insupportable le rapprochement opéré en janvier par le secrétaire général de la CICAD entre AFZ et l’entreprise nazie d’extermination des juifs».
«L’emploi du terme Judenrein par Monsieur Johanne Gurfinkiel est monstrueux, il banalise l'horreur de la Shoah. L'accusation d'antisémitisme des lieux genevois membre d'AFZ est mensongère. Mon fils est juif. Et comme d'autres, il fréquente ces lieux membres d'AFZ sans jamais y avoir rencontré une quelconque hostilité.»
Thomas Vachetta
Thomas Vachetta ne s’en cache pas, il est favorable à «la transformation de l’actuel Etat d’Israël en un Etat binational laïque et démocratique où juifs et Arabes vivraient en paix».
«Je me suis rendu plusieurs fois en Israël et dans les territoires palestiniens. Les actes vexatoires contre les Palestiniens sont permanents, il y a là un véritable politique d’apartheid. L’Etat d’Israël est un Etat par les juifs et pour les juifs dans lequel les citoyens arabes sont exclus d'un certain nombre de droits. Il faut qu’à l’avenir Israël et Palestine soient réunis dans un seul Etat où l'égalité de droit serait la norme. Quant au slogan du Jourdain à la mer, je le comprends justement comme une aspiration à un ensemble unitaire.»
Thomas Vachetta
Le Genevois appuie la décision d’AFZ de boycotter Israël et ses représentants, sportifs ou artistes dépendant du soutien de l’Etat hébreu.
«Nous avons agi pareillement en Europe avec l’Etat d’apartheid sud-africain et personne ne nous a accusés de "racisme anti-blanc"»
Thomas Vachetta
De son côté, Johanne Gurfinkiel dit ne «pas regretter» son expression «Judenrein».
«Dans les faits, la déclaration d'AFZ vise à créer un cordon sanitaire dont les artistes, universitaires et sportifs, au prétexte d'être israéliens, seraient rejetés, quel que puisse être leur engagement politique ou idéologique. Il s'agit là d'une pratique discriminatoire inacceptable.»
Johanne Gurfinkiel
«L’antisionisme est un antisémitisme»
Est-ce à dire qu’on ne peut pas être antisioniste?
«Je n’ai pas à entrer dans les subtilités de l’antisionisme. Ce que je sais, c’est qu’aujourd’hui, être antisioniste, c’est être contre l’existence d’Israël. Je rappelle que pour l’IHRA, l'Alliance internationale pour la mémoire de l'Holocauste, dont la Suisse fait partie, l’antisionisme est un antisémitisme. En portant plainte, AFZ peut avoir pour objectif de compliquer la tâche de la CICAD dans sa lutte contre l'antisémitisme à l'égard des mouvements se disant antisionistes.»
Johanne Gurfinkiel
La plainte visant Johanne Gurfinkiel pourra déboucher sur un procès comme sur un classement sans suite.
PNL annonce son retour
Video: twitter
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