Les choses sérieuses commencent mardi: le Conseil national entame ses délibérations budgétaires pour l'année 2025. Ce n'est pas inhabituel – lors de chaque session d'hiver, le Parlement doit approuver le budget élaboré par la Confédération. Mais cette année, il ne s'agit pas d'une affaire de routine, mais d'un débat extrêmement animé. La raison en est simple: le Conseil national et le Conseil des Etats veulent donner à l'armée nettement plus d'argent que le Conseil fédéral. Mais tout le monde sait que le compte n'y est pas. D'où viendra donc l'argent? Avant le grand débat qui durera certainement plusieurs jours, nous clarifions les questions les plus importantes.
Les partis bourgeois souhaitent augmenter les dépenses de l'armée plus fortement que le Conseil fédéral – ils estiment que l'armée a besoin de quatre milliards de francs supplémentaires au cours des quatre prochaines années. Les dépenses de l'armée s'élèveraient ainsi à 1% du produit intérieur brut (PIB) en 2030. Les commissions des finances des deux Chambres sont d'avis que l'année prochaine, l'armée devrait recevoir 530 millions de francs de plus que ce que prévoit le Conseil fédéral.
La Commission des finances du Conseil national souhaite économiser dans d'autres domaines. Elle refuse de financer l'argent supplémentaire par des recettes supplémentaires. C'est surtout l'aide au développement qui doit être saignée. La commission veut y économiser 250 millions de francs. A cela s'ajoutent des coupes transversales dans le personnel (70 millions de francs) et les prestations externes (35 millions). Des économies sont également prévues dans le domaine de l'asile (105 millions), la part du lion revenant à la fermeture déjà annoncée des centres fédéraux d'asile.
Les coupes dans la coopération au développement sont très controversées. En effet, l'aide à l'Ukraine doit également être financée par cette enveloppe au cours des quatre prochaines années; 1,5 milliard des 11,3 milliards de francs au total sont réservés à cet effet. Il reste donc déjà moins d'argent pour le reste du monde. Les œuvres d'entraide critiquent le fait que les économies se fassent sur le dos des plus pauvres. Les critiques de la gauche ont été d'autant plus vives.
La Commission des finances du Conseil des Etats a entendu les protestations. Elle souhaite donc renoncer à des coupes radicales dans la coopération au développement. Seuls 30 millions de francs devraient être économisés dans ce domaine. Le conseiller aux Etats UDC et président de la commission Jakob Stark a justifié cette décision par le fait que l'aide à l'Ukraine devra également être financée par ce pot commun au cours des quatre prochaines années. Pour les années suivantes, la commission prévoit de plafonner les dépenses de l'aide au développement. C'est également ce que prévoit le Conseil fédéral dans son paquet d'allègement budgétaire.
C'est dans le domaine de l'asile que la Commission des finances du Conseil des Etats prévoit les économies les plus importantes. Comme sa commission sœur, elle estime qu'il faudra 85 millions de francs en moins pour les centres fédéraux d'asile. Elle prévoit en outre 100 millions de francs de moins pour les aides sociales, qu'elle justifie par la baisse du nombre de demandeurs d'asile. Les politiciens des finances du Conseil des Etats veulent également des économies plus importantes pour le personnel fédéral, les investissements pour les constructions et la logistique ou les conseillers externes.
Non. La Commission des finances du Conseil des Etats a réfléchi au-delà du budget de l'année prochaine. Elle présente un nouveau chemin de croissance ralentie pour les dépenses de l'armée. Avec ce plan, les dépenses ne devraient pas atteindre 1% du PIB d'ici 2030, mais d'ici 2032. C'est un compromis. Le Conseil fédéral ne veut atteindre cet objectif qu'en 2035, le Parlement en 2030.
Les politiciens des finances du Conseil des Etats estiment qu'il faut des recettes supplémentaires pour l'armée. Ils souhaitent adapter la clé de répartition des recettes provenant de l'imposition minimale de l'OCDE. Actuellement, 75% des recettes supplémentaires reviennent aux cantons et 25% à la Confédération. Désormais, les recettes supplémentaires devraient aller pour moitié à la Confédération et pour moitié aux cantons.
Si l'une des chambres – c'est-à-dire le Conseil national ou le Conseil des États – rejette deux fois le budget lors du vote global, on en arrive à un budget d'urgence. Depuis 1872, cela s'est produit sept fois. Dans un tel cas, le Parlement doit, selon l'administration des finances, débattre en décembre d'un budget transitoire pour le premier trimestre 2025. Il est établi ad hoc par le Conseil fédéral. Sans décision fédérale, l'administration est incapable d'agir. Le budget normal serait ensuite débattu en mars 2025.
La dernière fois que cela s'est produit, c'était en 1975, à cause de recettes supplémentaires déjà budgétées qui ont été supprimées suite à une décision populaire. Cela a failli se produire en 2016 également. Le budget n'a été adopté que d'extrême justesse lors du premier vote global du Conseil national – par 79 oui, 75 non et 40 abstentions. Le conseiller national saint-gallois Markus Ritter, qui était alors responsable de l'affaire pour le Centre, ne revient pas volontiers sur cette expérience: «J'ai vieilli de cinq ans et j'ai failli avoir une crise cardiaque».
Traduit et adapté de l'allemand par Léa Krejci