Le Conseil fédéral veut économiser 4,6 milliards de francs d'ici 2030. Ce vendredi après-midi, il a présenté les mesures nécessaires pour y parvenir. Le résultat fait froid dans le dos. C'est un massacre, il n'y a pas d'autres termes qui sauraient qualifier les choix budgétaires de nos gouvernants. Pire: c'est un massacre parfaitement stupide.
Il suffit de jeter un coup d'oeil aux secteurs concernés: crèches, prévoyance sociale, politique climatique, infrastructure ferroviaire, recherche scientifique, promotion du sport et aide à la presse. Tout ce qui est important va devoir se serrer la ceinture.
Faut-il vraiment souligner l'importance de ces secteurs pour la population, ainsi que pour l'image et la réputation de notre pays? Réduire les aides pour la promotion du sport, ou les contributions au Fonds national suisse, va pénaliser la Suisse et les Suisses.
Ce n'est pas comme si nombre de ces secteurs se portaient bien. En Suisse romande, une terrible pénurie frappe depuis longtemps les crèches, où les listes d'attente se chiffrent parfois en années. Mais qu'importe, Berne veut économiser près d'un milliard de francs, et tant pis si les parents sont débordés.
Le domaine médiatique, lui, a été frappé de plein fouet par des vagues de licenciements répétées et dévastatrices ces derniers mois. Sa situation est critique; les conséquences, potentiellement catastrophiques. Désert informationnel, propagation de la désinformation, affaiblissement du lien social. Pourtant, là aussi, Berne veut couper.
Et que dire de l'environnement? Des coupes sont également prévues dans la politique climatique, dans l'assainissement énergétique des bâtiments notamment. Or, le parc immobilier génère presque un tiers des émissions de CO2 sur notre territoire. Les catastrophes naturelles de cet été, la multiplication des vagues caniculaires et la succession des records de température montrent tous les jours que le réchauffement climatique est déjà à l'oeuvre.
Tout cela était déjà tragique, mais devient tragicomique lorsque l'on découvre le seul secteur épargné: l'armée. Ce qui est paradoxal, étant donné que l'augmentation des dépenses militaires a directement contribué à affaiblir les finances fédérales.
Surtout, qu'est-ce que l'armée apporte à la population suisse, au-delà d'un service militaire obligatoire, largement impopulaire et anachronique?
Ah oui, bien sûr. Lorsque les troupes de Poutine auront vaincu l'Ukraine, puis envahi la Moldavie, la Pologne, la République tchèque, la Slovaquie, l'Allemagne et l'Autriche, elles trouveront notre armée sur leur chemin. Heureusement que la Suisse sera là pour sauver le continent. Alternativement, on pourra toujours bombarder le Liechtenstein. Ça, l'armée suisse a déjà montré qu'elle savait le faire. En attendant ces futurs exploits militaires, des recrues continuent de mourir pendant leur service.
Ce n'est pas dans l'armée que réside la force de notre pays, mais dans sa population, son bien-être, sa formation et son épanouissement. Franchement, les Suisses méritent mieux qu'une poignée de chars d'assaut et des avions de combat à six milliards de francs.