Mardi, un drame a touché de plein fouet une école de recrue: touché d'une balle dans la tête, un soldat décède à quelques mètres de ses camarades. Les premières conclusions de la justice militaire tendent vers l'hypothèse du suicide.
J'ai pu entendre pas mal de choses ces derniers jours, autour de la machine à café et après l'annonce initiale qu'un accident de tir avait eu lieu. Cette «armée de stagiaires», une «bande de rigolos» qui ne sert à rien. Une cible un peu facile à chaque accident et qu'on compare — sans trop rien en savoir — à l'image qu'on peut se faire de l'armée américaine ou française. Jusqu'à l'annonce de l'hypothèse du suicide.
On peut reprocher un certain nombre de choses à l'armée suisse. Qu'il s'agisse des affaires liées au F-35 ou à la gestion de ses finances, ou encore son administration. Lors de mes recherches, je suis d'ailleurs tombé face à un mur d'incompétence: quand le dernier accident de tir a-t-il eu lieu? On ne sait pas. Quelle est l'ampleur des décès au sein de l'armée ces dernières années? On ne sait pas. Quand l'armée aura-t-elle la bonne idée de mettre sur place un «bureau des accidents»?
C'est d'autant plus dommage pour l'institution, car les chiffres — fournis par la Suva — parlent en sa faveur: depuis 2001, seuls trois militaires ont perdu la vie lors d'un accident de tir, dont le dernier en 2005 à Saint-Maurice. Depuis bientôt vingt ans, l'armée a formé 400 000 personnes au tir, sans raté majeur. Malgré quelques blessés, on se dit qu'il y a là quelque chose qui fonctionne au sein de l'armée suisse.
Il faut dire que tant pour les commentateurs que les recrues elles-mêmes, l'armée peut parfois ressembler à une grande colonie de vacances. Mais nos soldats qui randonnent dans la forêt en habits de camouflage ont de vrais flingues dans les mains. Et comme me l'a indiqué un important formateur de tir au sein de l'armée, qui tenait à remettre l'église au milieu du village:
Des articles ont rappelé le mantra des quatre règles de sécurité, dont la première est presque philosophique: une arme est toujours considérée comme chargée. On a pu lire que le départ du coup à Bremgarten n'aurait pas dû avoir lieu, car une arme chargée dans un véhicule, c'est interdit. Soit une indication contraire à la première règle.
Un fusil, ça n'est pas un bâton magique qui fait du feu et du bruit dans un stand de tir et qui devient inoffensif à sa sortie. La tradition militaire suisse nous l'a enseigné, il s'agit de ne pas l'oublier.