Se sentant injustement attaqué, le groupe a fait corps. C’est donc à la fois malgré les tags et grâce à eux que le PLR Lionel Voinçon a été élu syndic de Payerne, dès le premier tour, face à son adversaire socialiste, Nicolas Schmid. La psychologie n’est jamais tout d’un bloc. Il reste qu’il n’aura jamais été écrit de telles insanités en toute bonne conscience depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, dans une petite ville, chez nous.
La réprobation – essentiellement les médias, tant le gouvernement vaudois et sa présidente ont fait preuve d’une prudence de soutane – a rempli son office: resserrer les liens de la communauté. On peut tout à fait penser que c’est moins par approbation d’écrits antisémites et racistes que Lionel Voinçon, l’un des tagueurs, a été brillamment élu, que parce que ne pas l’élire eût été reconnaître une faute morale. Peut-être aurions-nous aussi voté Voinçon si nous avions été payernois. Parfois, l’ancrage fait loi.
Mais, sachons-le: nous sommes ici dans une spécificité suisse. Dans un autre pays, le candidat impliqué dans une telle affaire n'aurait pas été investi par son parti. Quand on a été épargné par la guerre, on ne se sent visiblement pas tenu au respect de la même morale.
Ce faisant, Payerne a une nouvelle fois évacué un tourment. Mais cette fois-ci la justice est sur le coup. Elle ne lâchera rien.
On a appris cette semaine que la Cicad, la Coordination intercommunautaire contre l’antisémitisme et la diffamation, allait entamer un travail de mémoire avec la municipalité de Payerne sur le meurtre du marchand de bétail Arthur Bloch, tué pendant la guerre parce qu’il était juif. C'est une bonne chose, mais il faut s'attendre à un regain d’antisémitisme chez ceux qui verront dans cette démarche l’abdication de braves élus face au pouvoir de «qui vous savez».
Sévèrement battu, le socialiste Nicolas Schmid avait choisi de ne pas évoquer les tags durant sa campagne. Sûrement pour ne pas se mettre les Payernois à dos et peut-être aussi pour ne pas être l’objet de menaces. On ne gagne rien à se taire face au silence imposé. A ce propos, qu'ont dit les humoristes romands des Brandons de Payerne?