C'est une question qui fait l'objet de très nombreux fantasmes, d'un côté et de l'autre de la frontière: la rémunération des frontaliers français en Suisse. Surtout si l'on considère le fait que leur nombre ne cesse d'augmenter et n'a jamais été aussi élevé. Fin 2024, l'Office fédéral de la statistique en dénombrait plus de 236 000 - soit plus de la moitié de tous les frontaliers actifs en Suisse.
Un rapport diffusé la semaine dernière par l'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales (Urssaf) avance quelques chiffres. La publication porte sur les frontaliers français actifs en Suisse affiliés à la sécurité sociale de leur pays d'origine. Il s'agit de quelque 152 500 personnes, soit 68% de tous les frontaliers recensés en 2022, année de référence du rapport.
Verdict? Leur revenu annuel moyen s'élevait à 55 472 euros (environ 53 000 francs) en 2022. Ce chiffre comprend les salaires, les pensions, ainsi que toute autre source de revenus (revenus immobiliers, capitaux mobiliers, revenus fonciers nets, dividendes, rentes viagères, plus-values mobilières ou immobilières, etc).
Les montants varient sensiblement en fonction du département, comme on le voit dans la carte ci-dessous:
Les frontaliers domiciliés dans l'Ain touchent les revenus les plus élevés, soit 61 991 euros en moyenne, suivi par ceux habitant en Haute-Savoie (60 419 euros). Dans d'autres départements, les valeurs sont nettement moins importantes. C'est notamment le cas du Territoire de Belfort: les frontaliers qui y habitent gagnent en moyenne 43 924 euros par an.
«Les niveaux les plus importants se situent près de la frontière, et notamment dans les départements les plus proches des lieux de travail suisses», commente l'Urssaf. La proximité avec Genève jouerait un rôle important, selon le rapport:
En effet, les départements affichant les revenus moyens les plus élevés abritent une plus grande part de frontaliers actifs dans un secteur à forte rémunération. Dans le Territoire de Belfort, par exemple, près de la moitié des frontaliers travaillent dans l'industrie manufacturière, contre 12% dans l'Ain et en Haute-Savoie.
A noter que les femmes gagnent nettement moins que les hommes: leur revenu moyen, tous départements confondus, est inférieur de près de 21% - soit une différence de plus de 10 000 euros par an. Les frontaliers les mieux lotis sont les hommes domiciliés dans l'Ain, qui touchent une rémunération annuelle de 66 369 euros.
On pourrait finalement se demander si les frontaliers français sont mieux rétribués que leurs compatriotes qui habitent dans la même zone et qu'y travaillent. Bien qu'une valeur équivalente à celle calculée par l'Urssaf ne soit pas disponible pour le reste des travailleurs français, la réponse est oui. C'est qu'affirme l'Institut national de la statistique (Insee) dans une enquête diffusée l'année dernière.
Les frontaliers travaillant dans une métropole étrangère «perçoivent en moyenne des revenus d’activité nettement plus élevés que ceux exerçant en France», écrit l'Insee. Et d'ajouter:
Ainsi, le salaire des frontaliers habitant dans les départements les plus proches de Bâle et de Genève est respectivement 2,58 et 2,72 fois plus élevé que celui perçu par les travailleurs non frontaliers exerçant dans les mêmes régions, selon l'Insee.
Les salariés frontaliers proches du Luxembourg, de l'Allemagne et de Monaco gagnent également davantage que les non frontaliers, bien qu'en moindre mesure. Le ratio se situe autour de 1,5.