On sait que les femmes sont moins bien payées que les hommes en Suisse. Les derniers chiffres de l'Office fédéral de la statistique, relatifs à 2022, font état d'un écart salarial moyen de 9,5%. Six salariés percevant un bas revenu sur dix sont des femmes, tandis que les hommes représentent 75% des salariés gagnant plus de 16 000 francs par mois.
Ces inégalités se retrouvent également au sommet de la pyramide, c'est-à-dire chez les cadres. Les hommes sont surreprésentés dans les postes à responsabilité, gagnent plus et perçoivent des bonus plus élevés par rapport aux femmes dans la même position. C'est ce qui ressort d'un vaste rapport réalisé par l'association Advance et l'Université de Saint-Gall, diffusé ce mardi. Et qui permet de chiffrer l'ampleur de cet écart.
«Qui détient le (vrai) pouvoir?», se demandent les auteurs de l'étude. La réponse simple tient en deux mots: les hommes. «Dans l'ensemble», note le rapport, «près des trois quarts des postes de pouvoir sont occupés par des hommes». La part de femmes diffère selon le niveau hiérarchique - et diminue au fur et à mesure que celui-ci augmente.
Ainsi, on retrouve 38% des femmes chez les cadres inférieurs en 2024 en Suisse. Un pourcentage qui chute à 23% chez les cadres moyens et à 22% chez les cadres supérieurs. Soit environ une personne sur cinq. «Les chiffres parlent clair», commente Advance.
Advance ajoute que «tous les postes de cadres ne se valent pas». Les positions avec responsabilité en matière de direction, de personnel et de budget comportent des niveaux de pouvoir et d'influence plus importants, et sont, par conséquent, mieux rémunérées. Sans surprise, les femmes y sont «fortement sous-représentées».
Le dirigeant-type d'une entreprise suisse est un homme de plus de 50 ans. Il s'agit d'une population qui «joue le jeu du pouvoir (principalement) à la manière masculine, ce qui rend encore plus difficile l'accès et la participation des femmes», estiment les auteurs du rapport.
En effet, poursuit Advance, «environ 90% des femmes aspirent à des postes de cadres, mais reçoivent moins de soutien». Un constat qui se reflète dans les chiffres: plus de six promotions à des postes de pouvoir sur dix concernent des hommes. L'écart est particulièrement large chez les 31-50 ans.
Ces inégalités se traduisent par un «énorme écart salarial», affirme Advance. Encore une fois, ce dernier augmente avec le niveau hiérarchique. De 9% chez les cadres inférieurs, il passe à 18% chez les cadres moyens et supérieurs.
«L'importance de l'écart de pouvoir entre les genres se manifeste de manière impressionnante dans les bonus», poursuit Advance. Ces derniers «sont l'expression du pouvoir, de l'influence et de l'estime», explique la recherche. Les employés occupant des postes considérés comme influents et critiques pour la réussite de l'entreprise reçoivent généralement des bonus plus élevés.
Or, l'écart moyen se monte à 54%, ce qu'Advance n'hésite pas à qualifier de «stupéfiant».
Etant donné que 55% des cadres supérieurs ont plus de 50 ans, plusieurs milliers de postes seront à pourvoir dans les cinq à dix années à venir, indique Advance. «Il s'agit d'une formidable opportunité pour commencer à combler le fossé du pouvoir», estime l'organisation, qui appelle à «transformer la formule du pouvoir».
Cela nécessite «une profonde évolution culturelle, sociétale et organisationnelle», admet Advance. Pas sûr que cela se produira de sitôt. Par rapport à l'année dernière, la part de femmes occupant un poste de cadre a augmenté entre 0 et 2%, suivant le niveau hiérarchique.