Selon Bio Suisse, la Suisse importe d'Ukraine 18% des matières premières (colza, soja, tournesol, lin, sans céréales) qui servent à nourrir les poules et les porcs. Mais depuis l'éclatement de la guerre, cette nourriture pour animaux fait désormais défaut. Bio Suisse modifie donc ses dispositions.
Comme l'écrit Bio Suisse dans un communiqué, une réglementation spéciale est entrée en vigueur le 1er avril et sera valable jusqu'à la fin de l'année pour ses produits «Bourgeon». Celle-ci prévoit que 15% des besoins en graines de colza et de lin ainsi qu'en graines de tournesol puissent désormais provenir d'Europe en qualité bio UE ou d'outre-mer en qualité Bourgeon.
Pour les graines de soja, l'autorisation spéciale s'applique même à 40% de la quantité nécessaire. Il y a aussi une adaptation pour les œufs. Au vu de la situation actuelle, ce secteur réduit ses exigences de 100% d'aliments bio à 95%. Les œufs de poules élevées en plein air sont donc toujours conformes au cahier des charges de Bio Suisse.
Bourgeon fait partie des normes bio les plus strictes au monde. Toute l'exploitation doit par exemple être gérée de manière biologique pour que le label de Bio Suisse puisse être attribué. Dans l'Union européenne (UE), seuls certains secteurs de l'agriculture biologique sont autorisés. Ainsi, en Europe, on peut élever des vaches de manière conventionnelle et cultiver du soja de qualité bio à côté, explique David Herrmann, porte-parole de Bio Suisse, à watson.
Les dispositions sont également différentes pour le fourrage. Chez Bio Suisse, la règle est depuis cette année que seuls 5% de l'alimentation peuvent être composés d'aliments concentrés, comme les céréales ou le soja. Pour la norme bio de l'UE, cette proportion est en revanche de 40%.
Il existe d'autres différences au niveau de la transformation des aliments. Bio Suisse impose là aussi des directives plus strictes: il est interdit d'utiliser des additifs qui dénaturent le produit et le rendent moins authentique. Par exemple, on ne peut pas ajouter du jus de betterave à un yogourt à la fraise pour lui donner une couleur plus intense.
Comme l’a dit David Herrmann, la réglementation spéciale concernant la nourriture pour animaux ne devrait pas faire de différence notable. Comme la part de fourrage étranger est fortement limitée dans le temps, les éventuelles différences de qualité ne seront guère perceptibles.
En ce qui concerne les prix, David Herrmann déclare: «L'augmentation des prix dépend de nombreux facteurs. On constate que les prix des produits agricoles augmentent actuellement dans le monde entier – si le fourrage devient plus cher, la viande et les œufs le seront aussi.» La production de lait et de viande de bœuf bio n'est pas touchée par la pénurie.
«Il s'agit d'adapter l'alimentation à la pyramide alimentaire: moins de produits animaliers, ou au moins qu’ils soient issus de l'agriculture biologique», explique David Herrmann. Si on ne consommait pas autant de produits animaliers, le besoin en fourrage serait moins important – et le problème moins dramatique.
Une étude publiée en 2018 par l’Université des sciences appliquées de Zurich à la demande de Greenpeace suggère que la Suisse pourrait pratiquer une agriculture plus durable si elle se limitait à la production de viande de bœuf et de lait. La raison est qu'en Suisse, le bétail dispose de suffisamment de prairies où il peut paître.
Les plus grands changements pour un avenir durable concerneraient l'élevage de poulets et de porcs: selon le nouveau modèle, les terres arables ne sont pratiquement plus nécessaires pour la culture d'aliments pour animaux. En outre, les animaux doivent avoir une double utilité. En d'autres termes, les bovins sont élevés pour la production de lait et de viande et remplissent ainsi deux fonctions, ce qui est plus écologique.
Comme l'écrit Bio Suisse dans son communiqué de presse, la situation actuelle nous montre que nous devons changer radicalement nos habitudes alimentaires si nous voulons moins importer à l'avenir.
Traduit et adapté de l'allemand par Tanja Maeder