L’homme a de nombreuses casquettes. Il est propriétaire et directeur de la station touristique des Préalpes du Moléson, en Gruyère, qui comprend des remontées mécaniques, quatre restaurants et de nombreux chalets et appartements de vacances. Il est membre du comité des Remontées mécaniques suisses et du Magic Pass, cet abonnement commun à 40 stations.
Bref, Antoine Micheloud a une vision très large de la situation dans la restauration, dans le tourisme et les loisirs. Alors que le Conseil fédéral a décidé de maintenir sa décision de rendre payants les tests Covid dès le 1er octobre (bien qu’il soit prêt à des «ajustements») et de renforcer les contrôles aux frontières dès lundi, Antoine Micheloud analyse la situation dans laquelle se trouvent ses secteurs d’activité. Interview.
Ces annonces du Conseil fédéral, c’est la douche froide?
Antoine Micheloud: Ce n’est finalement pas nouveau, mais je critique le délai qu’on nous laisse: beaucoup trop court. Nous espérions un laps de temps pour laisser aux gens la possibilité de se faire complètement vacciner. Ce n’est pas quelque chose qu’on peut faire en deux minutes…
C’est vrai que s’il faut payer un test pour accéder au restaurant de montagne, ça fait cher la fondue…
C’est clairement dissuasif. En montagne, les loisirs et la gastronomie sont fortement liés. Du moment où il faut un certificat Covid pour manger ou se réchauffer au sommet d’une montagne, les gens ne prendront pas la remontée mécanique pour y accéder. Ce d’autant plus qu’il commence à faire froid en altitude. Les terrasses, c’est bientôt terminé.
Quand même, le Conseil fédéral a annoncé qu’il allait peut-être ajuster le tir rapidement…
Certes, mais le délai est toujours un problème.
Donc vous êtes à nouveau plongé dans l’incertitude… Ca vous pèse?
Vous savez, dans le tourisme, nous naviguons à vue depuis le début de la pandémie. On comprend bien toutes les décisions prises et on salue l’esprit d’ouverture et le soutien des autorités qui ont permis de maintenir les domaines skiables ouverts l’an passé, notamment. Si nous pouvions comprendre qu’en mars 2020, il fallait réagir très rapidement.
Le Conseil fédéral n’a pas abordé la question du certificat dans les remontées mécaniques. Vous la sentez comment?
Imposer le certificat dans les remontées mécaniques aurait de lourdes conséquences sur l’entier du tourisme de montagne. La Confédération doit s’en rendre compte et nous devons à tout prix éviter ça. Dans beaucoup d’endroits, les remontées mécaniques sont un moyen de transport public comme le train ou le bus.
Comme pour la restauration, ce serait nous imposer des contrôles très compliqués à mettre en oeuvre pour les remontées mécaniques. Le problème est le même: la Confédération impose des contrôles aux sociétés pour inciter à la vaccination, mais ce sont des acteurs privés qui assument le coût des contrôles… Dans la restauration, l’hôtellerie ou les remontées mécaniques, nous ne voulons plus entendre que nous pouvons faire notre travail mais que pour ça, nous devons aussi faire la police et, partant, employer du monde en plus. Les autres branches, la construction, la finance n’ont pas de telles contraintes.
Etes-vous confiant?
Il y a actuellement des pourparlers entre les Remontées mécaniques suisses et la Confédération. Nous avons déjà prouvé l’an dernier que les remontées ne sont pas des lieux de diffusion du coronavirus. J’ai donc confiance dans le bon sens des autorités.
Ce vendredi, le Conseil fédéral a également annoncé un renforcement des mesures aux frontières, principalement pour les non-vaccinés ou non-guéris. Un problème?
Dans le fond, je comprends la volonté d’éviter de faire entrer des cas dans le pays. Mais là aussi: il ne faut pas fragiliser la destination «Suisse» en allant trop loin.
De plus, il sera demandé de réaliser un deuxième test entre 4 et 7 jours après l’entrée en Suisse. Il sera aux frais des voyageurs. La Suisse est déjà une destination onéreuse, donc si le touriste introduit encore un test payant dans son budget, il risque de ne pas venir ici.