Tout est parti d’un article publié dans le SonntagsZeitung, ce week-end, où elle exige que les plateformes de réseaux sociaux, le X d’Elon Musk en tête, soient plus transparentes et mieux régulées: «L’UE prend des mesures contre les géants de la technologie depuis longtemps, et nous ne faisons tout simplement rien», affirme la verte Meret Schneider, conseillère nationale.
Une déclaration qui va connaître un regain d’intérêt sur ces mêmes réseaux sociaux, lorsqu’un important site de désinformation allemand, baptisé Disclose.tv, va littéralement la propulser sous les yeux des milieux d’extrême droite européenne: 800 000 impressions en deux jours et des centaines de partages, dont celui du célèbre journaliste UDC pro-Poutine Roger Köppel, qui l’accuse d’être «antidémocratique».
Ce sera le début d’une véritable tempête de haine qui va très vite atteindre les trumpistes américains les plus agressifs.
NEW - Meret Schneider, Green Party member and National Councilor in Switzerland, believes that Elon Musk's X is "endangering democracy" and "if necessary, must be blocked." pic.twitter.com/Uk6G204mWF
— Disclose.tv (@disclosetv) February 17, 2025
L’élue zurichoise âgée de 32 ans n’était pourtant pas la seule intervenante dans cet article qui se voulait une réaction au discours tempétueux de JD Vance à Munich, déclarant une guerre idéologique à l’Europe. Dans son speech, le vice-président de Donald Trump a notamment déclaré que «l’administration Trump craint que d'autres pays envisagent de serrer la vis aux entreprises technologiques américaines». Il n’a pas tort, car la Suisse semble commencer à vouloir montrer (doucement) les dents.
A côté des propos de Meret Schneider, on pouvait notamment lire Angela Müller, directrice générale de l'ONG Algorithm Watch CH, qui attend de pied ferme une nouvelle loi pour plus de transparence, de surveillance et de régulation des plateformes, mais qui «n’est pas encore prête», d’après le conseiller fédéral Albert Rösti, patron du Detec.
Or, lundi, c’est la conseillère nationale verte qui a été prise en grippe par une foule nauséabonde sur X. Des menaces personnelles, violentes et plutôt dégueulasses.
Car après quelques commentaires basés sur les arguments, les trolls anonymes se sont rabattus sur le physique de cette fervente militante de la cause animale, la comparant à certains personnages monstrueux de la pop culture. Une cible manifestement idéale, incarnant pour eux les «dérives» du «wokisme».
La principale intéressée a réagi à ces attaques, en confiant au Tages-Anzeiger qu’elles «ne sont que la pointe de l’iceberg». En message privé, l’élue verte reçoit de nombreuses «menaces de mort et de viol».
Mardi, après les apôtres du soi-disant free speech américain, ce sont les trolls russes qui ont pris le relais. Et la tempête ne montre hélas aucun signe d’apaisement. Une campagne de harcèlement d’autant plus problématique qu’elle vise la santé de Meret Schneider, qui souffre d’anorexie depuis ses plus jeunes années.
Une maladie qu’elle a eu le courage d’évoquer pour la première fois en fin d’année dernière, un mois avant de retrouver le chemin du Conseil national. Et un retour en politique qui l’avait «motivée à demander de l’aide».
La Verte est une pionnière dans la résistance au tout-à-l’égout des réseaux sociaux en Suisse. Ce qui ne l’empêche pas d’avoir toujours entretenu une relation compliquée avec Twitter, puis X. En 2022, elle comparait la migration bruyante des utilisateurs sur la plateforme Mastodon à «ceux qui disent au revoir lors d’un cocktail et qui sont encore là deux heures après».
Un an plus tard, elle se fera carrément bannir de X après un tweet dans lequel elle évoquait la «pendaison des politiciens populistes». Une publication «satirique», s’était-elle défendue à l’époque.
A l’été 2024, Meret Schneider avait dit publiquement «bye bye» à la plateforme d’Elon Musk. Trop «d’injures, de discours de haine et propagande russe». Même si elle restait «consciente» qu’atteindre «les gens sur les réseaux sociaux, c’est important».
Mardi, alors que les menaces contre sa personne ne faiblissent pas sur X, Meret Schneider a pris ses distances, le temps que ça se tasse: «Les amis, amusez-vous bien, je vais m'absenter un moment». Nous avons tenté de contacter la conseillère nationale zurichoise, sans réponse pour l’instant.