«On a vu des énormes flammes, c'était impressionnant», raconte Gunel Abdurkadir, propriétaire d'Evrim Kebab à Morges. En effet, le panneau publicitaire lumineux accroché sur le bâtiment de la Migros de Morges a été totalement ravagé par les flammes en ce mardi 1 juillet. A voir ce qu'il en reste, on peut comprendre l'étonnement du patron du Kebab.
Les origines du sinistre ne sont pas encore connues, mais une question revenait sans cesse dans les discussions avec les témoins.
Les propos du patron du Kebab sont corroborés par les témoins que nous avons rencontrés. «Ils ont mis en temps fou, ils sont juste là pourtant», commente une morgienne attablée au Kebab. En effet, la caserne des pompiers se trouve à 400 mètres du lieu du sinistre, de quoi nourrir les conversations.
Alors que notre discussion semble intéresser les autres clients qui acquiescent en silence, nous avons voulu savoir si l'intervention des pompiers était particulièrement «lente» comme le disent nos témoins ou si l'enjeu était ailleurs.
«Le temps paraît toujours plus lent quand on attend les secours», concède le commandant Houlmann, qui ne se montre pas surpris pas notre question. Pour preuve, il tient à nous donner le temps exact entre l'alarme à le premier véhicule de pompiers sur place.
Le commandant du SIS Morget nous rappelle qu'il existe un standard de sécurité cantonal en matière de service de défense contre l’incendie et de secours et que le délai d'intervention est de 15 à 18 minutes au maximum dans les régions urbaines et entre 20 et 23 minutes au maximum dans les régions extra-urbaines.
Quant à la distance entre le lieu du sinistre et la caserne des pompiers, Nicolas Houlmann souligne qu'à 21h, il n'y a pas de pompiers volontaires en caserne et qu'il sont, pour la plupart, à leur domicile. Du côté de l'ECA, Florian Cuche, chef des opérations défense incendie et de secours rappelle les conditions d'engagement des pompiers volontaires.
Florian Cuche précise toutefois que 80% des interventions doivent respecter ces standards de sécurité en matière d'incendie, mais que parfois, certaines zone sont trop éloignées et que les interventions peuvent prendre plus de 23 minutes, ce qui n'est pas le cas de Morges qui se trouve en zone urbaine. Mais alors, comment expliquer cette perception éronée du temps d'intervention des secours par la population? La réponse se loge dans notre cerveau.
Catherine Briod de Moncuit, psychothérapeute, nous explique que dans un incident critique, la perception du temps est altéré. «Chez certaines personnes le temps sera arrêté, pour d'autres raccourci, mais il peut aussi être rallongé.» La psychothérapeute raconte que le point commun entre toutes ces personnes, c'est le fait d'avoir été témoins de l'événement et de s'être senties impuissantes.
La spécialiste des traumatismes ajoute pour les victimes, le temps est toujours altéré et pour le témoin qui aurait attendu les secours, cela paraît interminable. «Dans les incidents critiques, si le témoin peut faire quelque chose, comme réguler la circulation par exemple, il ne va pas avoir la même perception du temps que celui qui attend l'ambulance», note la psychothérapeute.
Le commandant du SIS Morget conclut avec compréhension: «Nous étions dans les temps sur cette intervention, mais je conçois qu'en tant que témoin de ce type d'événement, les 10 minutes peuvent paraître bien longues».