14h, mercredi 15 novembre, devant l'Amphipôle à l'Université de Lausanne. Des dizaines d'étudiants sont répartis ici et là dans les grands espaces du gigantesque bâtiment. Pas de panneaux ni de signalisation particulière, rien ne laisse présager la venue du chef d'Etat français dans un peu moins de 24 heures. «Vous en pensez quoi de la visite du président Macron demain à l'Unil?», lançons-nous à la kiosquière. Il n'en fallait pas plus pour susciter son enthousiasme.
Travaillant depuis 2019 à l'Unil, la Française se réjouissait de la venue d'Emmanuel Macron à Lausanne, un événement qu'elle qualifie «d'important». «Vous savez, en Suisse, les politiciens se comportent comme des gens ordinaires, mais chez nous, voir le président ça reste exceptionnel», lance-t-elle avec entrain. «Et puis, vous avez vu toute cette sécurité? On m'a dit qu'il y avait des scanners comme dans les aéroports.» Le sourire aux lèvres, il lui reste un peu moins d'une heure avant l'obligation de fermer son magasin, celui-ci se trouvant dans la «zone rouge» selon la sécurité de l'université.
Non loin du kiosque, on remarque une étudiante concentrée sur ses cours, la venue d'Emmanuel Macron, elle en pense quoi?
Kimeline étudiante française en psychologie ne cache pas son amertume envers le président Macron, qu'elle rend responsable de sa migration. «Je suis venue en Suisse, car il n'était plus possible de trouver une place pour un master en psychologie en France après que Macron a fait passer une loi pour restreindre cet accès. Je ne porte pas d'intérêt à sa venue, mais je comprends ceux qui veulent le voir», l'explication a le mérite d'être claire.
Mais que fait-elle 20 minutes avant le bouclage de la zone par la sécurité? «Je ne savais pas que mon cours était annulé, je n'ai pas reçu les infos, en même temps on ne voit rien de spécial.» On ne va pas lui donner tort sur ce coup, malgré la présence de deux ou trois personnes de la sécurité de l'Unil, pas de policiers en vue, en tout cas, pas pour le moment.
On décide de se diriger vers l'Amphimax et son auditoire Erna Hamburger qui accueillera le chef d'Etat français et notre président Alain Berset. En chemin, on croise Emilie*, étudiante en science politique.
L'étudiante nous explique qu'elle a reçu le mail des inscriptions pour la visite d'Etat durant une présentation et qu'en cinq minutes, toutes les places ont été prises. Elle ne cache toutefois pas son agacement face à ses collègues de cours qui vont «tout faire pour perturber l'événement».
Elle ajoute que ses camarades sont «très énervés» et que certains ont prévu de l'accueillir au son des casseroles et vêtus d'abaya, preuve en est, une image provenant d'un groupe WhatsApp qu'elle tenait à nous montrer.👇🏽
«Certaines personnes en sciences sociales ont dit que c'était de la merde de l'inviter et que l'Université de Lausanne a fait une erreur, surtout dans le contexte actuel. Je ne partage pas cette idée, mais je me tais, car mon opinion est minoritaire dans ma classe», raconte l'étudiante.
On laisse Emilie* retrouver ses cours quand on croise (enfin) des policiers, notamment un service de déminage et des gardes-frontières. Les plaques sont vaudoises et valaisannes. Petite agitation dans l'air, il est 15h, l'Amphimax doit être fermé au public. Ici et là encore, quelques dizaines d'étudiants dans l'Amphipôle qui ne semblent pas plus perturbés par l'organisation.
Célia, étudiante en médecine, révise dans le calme, la visite d'Emmanuel Macron à l'Unil ne lui fait ni chaud ni froid. «C'est juste embêtant, car mes cours auraient dû se dérouler dans l'Amphimax et c'est impossible. On les aura par visio, mais c'est pas génial, en médecine, on n'a pas le temps pour ce type d'événement.» Au moins, ça c'est dit.
*prénom d'emprunt