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Ukraine: la Suisse empêche l'Espagne de livrer des armes à Kiev

En juin dernier, le Danemark avait demandé à la Suisse de transférer des chars à l'Ukraine. Berne avait dit non.
En juin dernier, le Danemark avait demandé à la Suisse de transférer des chars à l'Ukraine. Berne avait dit non.Image: KEYSTONE

Berne empêche l'Espagne d'aider Kiev et ça énerve en Suisse

L'Espagne voulait transmettre du matériel de guerre suisse à l'Ukraine, mais la Confédération refuse. Ce n'est pas la première fois que la loi suisse suscite l'incompréhension, y compris chez des représentants de l'industrie de l'armement helvétique.
12.01.2023, 12:0012.01.2023, 12:06
Chiara Stäheli / ch media
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La discussion sur la réexportation de matériel militaire suisse s'est enrichie d'un nouveau chapitre: comme l'a annoncé mardi après-midi la ministre espagnole de la Défense Margarita Robles, le pays ne peut pas livrer certains biens militaires à l'Ukraine en raison de l'absence d'autorisation de la Suisse.

Selon divers médias espagnols, dont le portail d'information Europapress, Robles a vivement critiqué la législation helvétique lors d'une réunion des ambassadeurs espagnols à Madrid. Elle respecte certes la neutralité suisse, mais elle empêche actuellement l'Espagne de «participer à une défense légitime contre l'invasion russe injuste, illégale et cruelle» en Ukraine. Robles a annoncé qu'elle ferait prochainement des démarches auprès de Berne.

Pas de réexportation vers des pays en guerre

Cela n'a pas encore été fait jusqu'à présent: interrogé à ce sujet, le Secrétariat d'Etat à l'économie (Seco) a indiqué qu'il n'avait reçu «à ce jour aucune demande par le canal officiel pour une transmission de matériel de guerre suisse par l'Espagne à l'Ukraine». Si une telle demande devait arriver dans les prochains jours, le Seco tient à disposition la réponse suivante:

«En raison du principe d'égalité de traitement prévu par le droit de la neutralité et la loi sur le matériel de guerre, une transmission de matériel de guerre suisse à l'Ukraine ne peut pas être autorisée.»
Secrétariat d'Etat à l'économie

La raison en est ce que l'on appelle la déclaration de non-réexportation, qui est ancrée dans la loi sur le matériel de guerre. Elle prévoit que tous les pays qui achètent des armes ou des munitions à la Suisse s'engagent à ne pas transmettre les biens militaires à un Etat tiers sans autorisation. Toute exportation vers des pays impliqués dans un «conflit armé international» reste interdite selon la loi, car elle n'est pas compatible avec la neutralité suisse.

L'Allemagne en sait quelque chose

Les autorités suisses ont déjà rejeté des demandes similaires l'année dernière. En avril, le gouvernement allemand a adressé deux demandes à la Suisse: il souhaitait mettre à disposition de l'Ukraine, d'une part, des munitions fabriquées en Suisse pour le char Gepard et, d'autre part, plusieurs chars à roues de fabrication helvétique. En juin, le Danemark a également demandé l'autorisation de transférer 22 chars à l'Ukraine. Le Seco a rejeté ces deux demandes en se référant à la neutralité et à la loi sur le matériel de guerre.

L'insistance de la Suisse sur ses lois n'est pas sans conséquences: comme l'a récemment rapporté le Tages-Anzeiger, le gouvernement allemand veut par exemple devenir indépendant de l'industrie suisse de l'armement. Le passé a montré que l'on ne pouvait pas compter sur la Suisse en tant que partenaire d'armement en temps de guerre.

Un assouplissement de la loi demandé

Les représentants de l'industrie suisse de l'armement craignent ce découplage. Ils remettent en question la neutralité de la Suisse: la Suisse peut-elle se permettre de renoncer à exporter des biens d'armement? Ou la neutralité peut-elle être interprétée de manière à ne pas mettre en danger l'industrie de l'armement?

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Thierry Burkart prône un assouplissement de la loi sur le matériel de guerre.Image: sda

Le président du PLR Thierry Burkart est le premier à prôner un assouplissement de la loi sur le matériel de guerre. Il a déposé une motion à ce sujet en juin dernier. Burkart propose que tous les pays exportateurs ne soient plus obligés de signer une déclaration de non-réexportation. Les Etats qui «partagent les valeurs suisses et disposent d'un régime d'exportation d'armes aussi strict» devraient à l'avenir renoncer à une telle déclaration et pouvoir disposer librement du matériel de guerre acquis en Suisse. Outre de nombreux pays européens, les Etats-Unis, l'Australie et le Japon devraient en faire partie.

Le Conseil fédéral rejette la motion. Et ce parce que l'assouplissement de la loi ne permet pas d'exclure la transmission de matériel de guerre suisse «à des destinataires finaux indésirables». Début février, l'affaire sera à l'ordre du jour de la Commission de la politique de sécurité du Conseil des Etats.

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