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La lutte contre les féminicides manque d'argent en Suisse

Des femmes manifestent avec des torches lors d'un rassemblement pour demander un plan national contre les violences sexistes et sexuelles suite a la 25eme victime de féminicides cette année le je ...
Manifestation pour demander un plan national contre les violences sexistes et sexuelles suite à la 25e victime de féminicide, en octobre 2021 à Genève.Image: KEYSTONE

«Quel prix est-on prêt à payer pour sauver la vie d'une femme en Suisse?»

Onze féminicides ont été recensés dans le pays depuis le début de l'année. Comment expliquer un tel chiffre, malgré une plus grande visibilité du fléau? Eléments de réponses.
27.03.2025, 18:5427.03.2025, 18:54
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  • 14 janvier 2025 à Vouvry (VS). Elle aurait eu 30 ans.
  • 16 janvier 2025 à Bienne (BE). Elle aurait eu 31 ans.
  • 25 janvier 2025 à Berne. Elle aurait eu 44 ans.
  • 26 janvier 2025 à Lodrino (TI) Tessin. Elle aurait eu 21 ans.
  • 7 février 2025 à Schönenwerd (SO). Elle aurait eu 40 ans.
  • 10 février 2025 à Pratteln (BE). Elle aurait eu 33 ans.
  • 17 février 2025 à Bülach (ZH). Elles auraient eu 68 et 49 ans.
  • 12 mars 2025 à Obermumpf (AR). Elle aurait eu 55 ans.
  • 25 mars 2025 à Emmenbrücke (LU). La femme a atteint l'âge de 40 ans, l'âge de sa fille n'est pas connu.

Depuis le début de l'année, onze féminicides ont été recensés en Suisse, relaye le site Stop Femizid. «Un chiffre qui donne le vertige», réagit Jessica Jaccoud, conseillère nationale (PS), et qui soulève des questions. Pourquoi les choses n'évoluent pas? Et qu'est-ce qui est mis en place dans le pays pour éradiquer ce fléau?

Discours VS action

«Lorsqu'on veut éradiquer un problème, il faut mettre les moyens financiers», répond Martine Lachat Clerc, directrice de Solidarité femmes Fribourg, un centre d'aide aux victimes de violence, ainsi qu’à leurs enfants.

«La volonté d'action des politiques manque de concrétisation»
Martine Lachat Clerc, directrice de Solidarité femmes Fribourg.

Si elle reconnaît que la problématique est considérée comme «prioritaire» au sein de la classe politique, elle martèle que «les discours ne suffisent pas». Parmi les besoins actuels cités, il y a l'augmentation des places dans les maisons d'accueil. Car si la Suisse compte 216 chambres au total, et que le nombre de maisons d'accueil pour les femmes victimes de violences a augmenté ces dix dernières années, toutes les places sont prises. De plus, certains cantons ne disposent pas de ces structures.

Lena John, co-directrice de la Fédération Solidarité femmes de Suisse, l’organisation faîtière des maisons d’accueil, précise que d'après la Convention d'Istanbul, il faudrait une chambre familiale pour 10 000 habitants.

«En Suisse, nous avons 0,24 chambres pour 10 000 habitants»
Lena John, co-directrice de la Fédération Solidarité femmes de Suisse.

Comment expliquer ce manque de moyens alloués? «Les féminicides ont longtemps été gardés sous silence et on se rend compte aujourd'hui de l'ampleur du fléau, ainsi que du coût pour mettre en place un plan d'action», estime Martine Lachat Clerc. Et d'ajouter:

«La Suisse est lente. Notre mentalité fait que nous n'osons pas nous mouiller. Chaque féminicide est un de trop. Les choses ne bougent pas assez vite»
Martine Lachat Clerc, directrice de Solidarité femmes Fribourg.

Tous concernés

En revanche, parmi les progrès observés ces dernières années, Martine Lachat Clerc et Jessica Jaccoud mentionnent la plus grande visibilité, notamment dans les médias, de la problématique, et insistent sur la nécessité de poursuivre dans cette direction:

«Ces violences doivent être sorties du huis clos. Elles ont trop longtemps été cantonnées dans la sphère privée et invisibilisées. Nous sommes tous concernés et c’est collectivement que nous devons faire cesser ce fléau pour sauver la vie des femmes de ce pays.»
Jessica Jaccoud, conseillère nationale (PS).

La conseillère nationale, avocate de profession, explique que désormais, les femmes qui viennent la voir pour dénoncer les violences infligées par leur partenaire ou ex-partenaire tiennent un discours différent: «Elles veulent agir pour elles et pour éviter que d'autres femmes ne soient victimes du même auteur.» Et d'ajouter:

«Ce phénomène de solidarité entre femmes est nouveau. Il est né de ce travail collectif autour de la visibilité de la problématique»
Jessica Jaccoud, conseillère nationale (PS).

350 millions demandés

Début 2025, et en réaction aux onze féminicides, le Parti socialiste a lancé une pétition qui exige que Conseil fédéral prenne des mesures immédiatement. 350 millions de francs sont demandés «pour assurer la sécurité des femmes et lutter contre la violence sexiste, domestique et sexuelle». «Nous voulons à présent être entendues et protégées», peut-on notamment lire dans le texte.

Selon Jessica Jaccoud, «la Confédération doit investir dans la prévention, la sensibilisation de la société, ainsi que l'accompagnement des victimes et des auteurs afin de sortir de cette spirale». Elle reconnaît qu'il «faudra du temps avant que ces actions ne déploient leurs effets, mais que cela représente un investissement à long terme.» Et de poser la question suivante:

«Quel prix est-on prêt à payer pour sauver la vie d'une femme en Suisse?»
Jessica Jaccoud, conseillère nationale (PS).
La première grève féministe de Suisse le 14 juin 1991
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La première grève féministe de Suisse le 14 juin 1991
La première grève des femmes* de Suisse avait impliqué plus de 500 000 femmes à travers le pays.
source: keystone
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Ce 14 juin, elles dénoncent le sexisme en politique
Video: watson
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