Dans les années à venir, le peuple suisse sera amené à se prononcer sur deux initiatives populaires concernant la protection animale. Il y a deux semaines, la chancellerie fédérale a validé deux textes: l'un souhaitant interdire l'importation de foie gras, l'autre celle de la fourrure. Ces initiatives sont portées par l'association à but non lucratif Alliance Animale Suisse.
Comme le montre un sondage représentatif réalisé par watson, une large majorité de la population suisse est favorable à l'interdiction de l'importation de produits en fourrure issus de mauvais traitements envers les animaux. En revanche, le pays est divisé culturellement en ce qui concerne le foie gras.
Le sondage a été réalisé du 23 au 27 février en collaboration avec l'institut de recherche sociale DemoSCOPE. 6248 personnes y ont participé, ce qui le rend représentatif.
«Je n'avais pas réalisé à quel point le foie gras est profondément enraciné dans l'ADN des Romands», reconnaissait l'UDC Martin Haab l'année dernière. Sa motion, demandant l'interdiction de l'importation du foie gras, avait suscité de vives discussions au Parlement. Finalement, les élus n'avaient adopté qu'une obligation de préciser le mode de production.
Le fossé linguistique se retrouve de manière saisissante dans notre sondage. Alors que 89 % des Suisses alémaniques soutiennent une interdiction d'importation de foie gras («Plutôt oui» et «Oui»), 65% des Romands rejettent cette proposition («Non» et «Plutôt non»).
L'analyse par parti politique révèle plusieurs conclusions intéressantes. A droite, plus de la moitié des électeurs du PLR - 56% - sont contre la proposition («Non» et «Plutôt non»). A l'inverse, l'UDC soutient l'interdiction à 61%.
Mais le soutien le plus fort en faveur d'une interdiction d'importation du foie gras vient de l'électorat de gauche: les Verts (94%) et le PS (85%) sont largement pour. Tout comme les Vert'libéraux (87%).
Le sondage montre également que les opinions sont bien établies. A l'exception des électeurs du PLR, aucun parti n'a un score combiné de «Plutôt non» ou «Plutôt oui» dépassant les 10%.
Les participants ont été interrogés sur les raisons de leur soutien ou de leur opposition à l'initiative et ont pu classer six arguments différents par ordre d'importance.
Les résultats sont impressionnants en ce qui concerne le principal motif en faveur de l'interdiction d'importation de foie gras. Pour tous les partis politiques, le bien-être animal est au centre du débat, aucun parti n'affichant un score inférieur à 86 %. Toutes les autres raisons sont d'une importance mineure.
A l'inverse, les deux principales raisons de rejeter l'initiative sont d'ordre libéral. Les sondés estiment qu'une interdiction d'importation du foie gras ne devrait pas figurer dans la Constitution et que tout ne devrait pas être réglementé par l'Etat.
L'initiative sur la fourrure demande que l'importation de produits en fourrure provenant d'animaux maltraités soit interdite. Cela inclut toutes les fourrures provenant des fermes qui ne respectent pas les normes suisses. Et, selon les initiants, aucun producteur de fourrure étranger ne les respecte.
La Suisse importe environ 350 tonnes de fourrure par an, dont la moitié provient de Chine. Environ 1,5 million d'animaux seraient maltraités, étant gazés, tués par électrocution ou écorchés vivants. Alliance Animale Suisse souligne que l'initiative pour l'interdiction de la fourrure est conforme aux obligations commerciales internationales de la Suisse.
Le sondage Watson montre qu'une majorité de la population suisse soutient une interdiction d'importation de la fourrure. Cependant, l'approbation en Suisse alémanique, à 93% («Plutôt oui» et «Oui»), est nettement plus élevée qu'en Romandie (71%).
Les Romands sont également moins définitifs dans leur choix. 24% d'entre eux ont choisi les options «Plutôt non» et «Plutôt oui», contre seulement 6% chez les Alémaniques.
L'analyse par affinité politique montre que l'initiative bénéficie du soutien de tous les partis politiques. Le soutien est le plus fort chez les électeurs des Verts, où 97% disent «Plutôt oui» ou «Oui». Le soutien est le plus faible chez le PLR, avec 71%.
C'est également du côté de ce parti qu'on trouve la plus forte opposition avec 28% de «Non» et «Plutôt non». Près d'un quart de l'électorat UDC se dit aussi contre une interdiction (23%).
Pour ceux qui soutiennent l'initiative, la raison la plus fréquemment évoquée, quel que soit le parti politique, est le fait qu'elle réduit la souffrance animale.
Viennent ensuite «La fourrure est inutile» et «La fourrure provient de pays peu respectueux des animaux». Le fait que la fourrure ne soit plus à la mode joue un rôle mineur pour les participants au sondage.
Les deux initiatives populaires ont été lancées par l'association à but non lucratif Alliance Animal Suisse, créée par plusieurs organisations de protection des animaux.
La proximité thématique des deux initiatives se reflète dans les résultats du sondage. Environ 73% des participants soutiennent à la fois l'initiative sur la fourrure et celle sur le foie gras. Si l'on tient compte des personnes ayant choisi «Plutôt oui» pour l'une ou l'autre initiative, le taux d'approbation atteint même près de 77%.
7,5% des participants au sondage rejettent clairement les deux initiatives populaires («Non»).
(Traduit de l'allemand par Tim Boekholt)