Il n'y a pas si longtemps, la Suisse se préparait sérieusement à une pénurie de gaz. En effet, la guerre en Ukraine a bouleversé l'approvisionnement en gaz de l'Europe et les effets se font encore sentir.
La fourniture en gaz pour la période de chauffage qui s’achève semble assurée. Cependant, les réserves ont diminué très rapidement ces derniers temps: les niveaux de remplissage se situent actuellement entre 25 et 30%. La cause principale: un hiver plus froid que l’année précédente. Cela ne pose pas de problème immédiat, mais la situation pourrait se compliquer l’hiver prochain.
Dès le 1er avril, les fournisseurs de gaz européens doivent commencer à reconstituer leurs stocks. Mais, selon Daniela Decurtins, directrice de l’Association suisse de l’industrie gazière, les incitations économiques à le faire sont insuffisantes. Elle déclare:
Résultat: les prix du gaz atteignent leur plus haut niveau depuis deux ans.
L’une des principales raisons réside dans les nouvelles directives de l’Union européenne (UE). Bruxelles impose désormais des niveaux minimums de stockage pour l’hiver prochain. D’ici le 1er novembre, les réserves devront être remplies à 90%. Or, le processus de remplissage prend du temps, ce qui entraîne une ruée sur le gaz en été et donc une hausse des prix.
Face à cette situation, l’UE débat actuellement de la possibilité d’assouplir ces règles ou de trouver des alternatives.
La Suisse adopte son approche habituelle: elle observe. Elle peut toutefois le faire avec une certaine sérénité, puisque l’actuelle ordonnance sur le stockage du gaz est valable jusqu’en septembre 2026. Comme le confirme Marianne Zünd, de l’Office fédéral de l’énergie, les fournisseurs suisses sont tenus de constituer une réserve couvrant 15% de la consommation annuelle.
L’Office fédéral pour l’approvisionnement économique du pays a également déclaré début mars:
Oui. Lors de la dernière session parlementaire, la Suisse a approuvé un accord de solidarité sur le gaz avec l’Italie et l’Allemagne. Cet engagement financier, d’un montant de 1,3 milliard de francs suisses, garantit que les trois pays pourront s’entraider en cas de pénurie. C’est un point crucial pour la Suisse, car elle ne dispose d’aucune réserve de gaz sur son territoire.
Des projets en ce sens existent depuis longtemps. Actuellement, un projet de stockage souterrain est à l’étude à Oberwald (VS), mené par la société Gaznat, qui gère le réseau de transport de gaz en Suisse romande. Cependant, selon Daniela Decurtins, le principal obstacle reste le financement. L’investissement pour ce projet est estimé à 400 millions de francs.
L’année 2025 pourrait être décisive: Albert Rösti, ministre suisse de l’Energie, prévoit d'une part une table ronde sur le stockage de l’énergie. D'autre part, un projet de loi sur l’approvisionnement en gaz, maintes fois annoncé et repoussé, devrait enfin être présenté. Ces initiatives pourraient donner un nouvel élan aux discussions sur les réserves saisonnières de gaz. Toutefois, leur rentabilité pour la Suisse reste incertaine.
A court terme, aucun. Au contraire, plusieurs fournisseurs d’énergie ont même annoncé une baisse des prix du gaz: Groupe E en Suisse romande, IWB dans la région de Bâle ainsi que les services industriels de Berne, qui réduiront leurs tarifs en avril.
Une nouvelle a priori positive pour les consommateurs, mais il faut rester prudent: les fournisseurs d’énergie signent généralement des contrats à long terme, ce qui signifie que les fluctuations du marché mettent du temps à se répercuter sur les prix finaux. On a déjà observé ce phénomène au début de la guerre en Ukraine.
Traduit et adapté de l'allemand par Tanja Maeder