En fait, tout le monde est d'accord: le Hamas doit être interdit. Après l'attaque terroriste contre des civils, en octobre 2023, qui a fait plus de 1000 morts, les politiques sont d'une rare unanimité: le Hamas est une organisation terroriste et son adhésion ou son soutien doivent être punis par la loi, à l'instar d'Al-Qaïda ou de l'Etat islamique.
Lors de la consultation, la nouvelle norme pénale a reçu de nombreuses tapes dans le dos de la part des partis et des cantons. Plusieurs d'entre eux estiment que l'interdiction est «extrêmement importante». Mais une prise de position attire particulièrement l'attention. En effet, le Ministère public de la Confédération (MPC) se montre critique sur le projet. Il va même jusqu'à dire que la réforme semble «problématique». Ce n'est pas l'interdiction en soi qui est en cause, mais sa mise en œuvre.
La critique porte, entre autres, sur des questions juridiques formelles. Mais aussi de savoir qui est compétent pour les poursuites pénales. Dans le cas d'Al-Qaïda et de l'EI, c'est clair: l'enquête est du ressort du ministère public fédéral. C'est aujourd'hui la règle, entre autres, pour le crime organisé et les délits liés aux explosifs. C'est aussi le cas pour le terrorisme.
Dans la loi proposée sur le Hamas, il manque en revanche une attribution claire. Pour le MPC, c'est une lacune. Après tout, cela a été un «facteur de succès» dans la poursuite des djihadistes de l'EI ou d'Al-Qaïda. Ainsi, les cantons et la Confédération n'ont pas besoin de négocier pour savoir qui mène exactement la procédure.
Pour que le MPC intervienne en lieu et place des autorités cantonales en cas de poursuite pénale pour des délits liés au Hamas, il faudrait que les infractions aient été commises «pour une part importante à l'étranger». Ou alors, les délits devraient avoir été commis dans plusieurs cantons, mais «il ne doit pas y avoir de prédominance claire dans un canton».
Certains cantons s'inquiètent également de la répartition des compétences. Le gouvernement de Bâle-Campagne parle d'une «bifurcation inexplicable». Si une personne se rend au Proche-Orient pour des «motifs djihadistes» et rejoint le Hamas, ce sont les autorités cantonales qui enquêtent. Mais:
De plus, le MPC «dispose désormais d'un grand savoir-faire» dans ce domaine. Or, selon le gouvernement de Bâle-Campagne:
Le gouvernement saint-gallois demande également l'introduction d'une «juridiction fédérale complète» dans la nouvelle loi. Ceci parce que la plupart des cas concernent:
Celles-ci auraient «toujours des répercussions intercantonales et internationales» et ne seraient «ni liées à un lieu ni à un canton». En fin de compte, c'est le hasard qui détermine «l'endroit d'où sont envoyés les messages correspondants». Mais le lieu serait décisif pour les poursuites pénales, car les autorités locales devraient alors commencer leur travail.
Mais il n'y a pas que des critiques sur l'absence de compétence fédérale. Zurich salue expressément le fait que la «compétence qui en découle» reste aux autorités cantonales lorsqu'il existe «un centre de gravité évident des actes poursuivis» dans un canton. Contrairement à de nombreux petits cantons, Zurich dispose d'un ministère public bien doté. Le gouvernement zurichois veut également faire un pas de plus que la grande majorité des autres cantons: l'interdiction ne devrait pas être limitée à cinq, mais à dix ans.
La balle est maintenant dans le camp du Conseil fédéral. Celui-ci décidera après la pause estivale s'il confie l'enquête aux autorités cantonales ou au Ministère public de la Confédération. Une chose est sûre: l'interdiction aura lieu d'une manière ou d'une autre.