Depuis le 7 octobre, des images de l'attentat du Hamas voyagent sur différents écrans géants de la planète. Monté et proposé par l'armée israélienne, ce film a déjà été visionné par des journalistes et des diplomates (sur une base militaire non loin de Tel-Aviv), mais aussi par une centaine de parlementaires français au coeur de l'Assemblée nationale, mi-novembre. Tous sont ressortis humainement «choqués», «dégoûtés».
Et alors que le parlement européen a, lui aussi, eu droit à sa séance d'effroi, dans la foulée et dans son hémicycle bruxellois, la Chambre belge des représentants avait refusé de se prêter à l'exercice.
C'est désormais au tour de Genève d'accueillir la projection de ces 44 minutes et 43 secondes d'atrocités, sans filtre, durant lesquelles il est diffusé des meurtres, des actes de torture et des viols, sans censure, ni mise en perspective. Une démarche permise par l'ambassade d'Israël à Berne et coordonnée par la section genevoise de l'association Suisse-Israël. Date de la séance: le 1ᵉʳ décembre prochain.
👉Suivez en direct la guerre entre Israël et le Hamas👈
Les députés du Grand Conseil ont été conviés personnellement à découvrir «ces images extraites des téléphones et des GoPro des assaillants du Hamas, des portables des victimes des attaques ainsi que des secouristes».
Joint par téléphone, Victor Gani, président de la section genevoise de l'association, confirme que les élus du bout du lac ont reçu l'invitation «ce week-end», par e-mail. Lundi à mi-journée, l'association pouvait déjà compter sur une «quinzaine de confirmations». Le président nous précise que s'il n'a pas encore lui-même regardé ces images, le vice-président sera présent dans la salle, le 1er décembre.
A Paris, la plupart des élus de tout bord ayant assisté au montage proposé par l'armée israélienne, se sont dits «traumatisés» par ce qu'ils ont vu à l'écran et une cellule psychologique d'urgence avait été mise en place pour l'occasion. Une telle précaution est également prévue à Genève, à en croire Victor Gani.
Les élus genevois vont-ils s'infliger un peu moins d'une heure de violences crues, sur un écran? Parmi ceux qui ont bien voulu nous répondre, Caroline Marti, cheffe du groupe socialiste au Grand Conseil genevois, nous confie que, «personnellement», elle ne se rendra pas à cette projection et qu'«aucun mot d'ordre au niveau du groupe» n'a été prononcé à ce sujet.
Idem du côté du PLR, qui ne souhaite pas avancer groupé. Le patron de groupe au Grand Conseil, «à titre personnel», décline l'invitation: «Je ne pense pas que le fait de voir de telles images sur un écran puisse modifier ma perception des horreurs qui se déroulent là-bas.» Les Verts genevois, eux, et après concertation, nous confient qu'ils vont «poliment refuser cette invitation, dans l'optique de ne pas prendre parti et en faveur d'un appel à la paix et au cessez-le-feu».
Pour le Vert David Martin, «la guerre des images et de l'information pousse à entrer dans une hiérarchisation de l'horreur à des milliers de kilomètres des affrontements». Il y a ensuite l'aspect personnel et émotionnel, une fois dans la salle, lorsqu'il s'agit d'appréhender et de digérer un tel film, en tant qu'être humain, sachant que «ça s’est réellement produit» et «que ce n'est pas un film d’horreur».
Le député et président du MCG, François Baertschi, déclinera lui aussi l'invitation, mais à cause d'un «emploi du temps déjà très chargé le 1er décembre». Attrapé au bout du fil lundi, l'élu genevois considère que visionner ce film «n’est pas nécessaire pour être bouleversé par ce qui se passe au Proche-Orient».
D'autres séances sont-elles prévues ailleurs en Suisse? Pour l'heure, l'ambassade d'Israël à Berne, qui a insufflé la proposition genevoise, n'a pas répondu à nos multiples sollicitations.