Quatre jours après l'attaque terroriste du Hamas contre Israël, le Conseil fédéral avait annoncé son intention de faire interdire le Hamas. Afin de se déterminer sur la mise en œuvre, le gouvernement a nommé le 11 octobre une «Task force Proche-Orient» de haut vol composée de représentants de nombreux départements et unités administratives.
Six semaines plus tard, lors de sa séance de mercredi, le Conseil fédéral a décidé d'inscrire l'interdiction du Hamas dans une loi fédérale dans le cadre d'une procédure ordinaire. D'ici fin février, il entend élaborer un projet dans ce sens, qui sera d'abord mis en consultation, puis soumis au Parlement.
En vertu de la loi sur la transparence, la Schweiz am Wochenende a pu consulter les procès-verbaux des réunions de la Task force. Les documents remis par le Département fédéral des affaires étrangères (DFAE) sont en partie caviardés.
Cela signifie qu’il est impossible de savoir comment le Service fédéral de renseignement (SRC), représenté au sein de la Task force, évalue la situation sécuritaire sur place. Pas un mot non plus sur les mesures de protection prises par le Centre de gestion de crise (KMZ) du DFAE pour le personnel diplomatique suisse dans la région.
Les comptes-rendus donnent néanmoins un aperçu des réflexions du groupe. Lors de la quatrième séance des conseillers le 2 novembre, par exemple, alors que les travaux sur l'interdiction du Hamas étaient déjà relativement avancés, il était question du risque sécuritaire lié à une telle mesure:
Il est courant que le contenu et le timing des décisions du Conseil fédéral soient également évalués en fonction de leur perception internationale. Les préoccupations sécuritaires mentionnées sont en revanche à souligner pour une autre raison: selon des articles concordants du Blick et du Tages-Anzeiger, le ministre des Affaires étrangères Ignazio Cassis avait déjà demandé une interdiction du Hamas par droit d'urgence lors de la séance du Conseil fédéral du 15 novembre. Les procès-verbaux de la taskforce le montrent: une conférence de presse était déjà prévue pour ce jour-là.
Mais le 15 novembre, c'est aussi le jour de la fête nationale palestinienne. Interrogée, la Chancellerie fédérale ne révèle pas si c'est aussi pour cette raison que le Conseil fédéral a reporté sa décision d'une semaine supplémentaire. Elle rappelle simplement que les délibérations du gouvernement sont confidentielles. Elle ne donne pas non plus de détails sur d'éventuelles mesures de sécurité préventives autour de la décision d'interdire le Hamas.
Autre élément contenu dans les procès-verbaux: le 2 novembre, la Task force a suggéré de «rédiger un message à l'attention de la communauté juive dans le cadre de la montée de l'antisémitisme». La phrase qui suit est caviardée.
Exactement une semaine plus tard, le 85e anniversaire de la «Nuit de cristal» de 1938, les pogroms du régime nazi dans toute l'Allemagne, Ignazio Cassis publiait une tribune dans la NZZ, Le Temps et le Corriere del Ticino.
Pour la Chancellerie fédérale, le Tessinois s'est inquiété de la montée de l'antisémitisme. Son département a soumis la proposition d'une condamnation publique à la Task force «afin de garantir une procédure coordonnée au niveau interdépartemental». Après avoir reçu un feu vert, Cassis aurait alors rédigé sa tribune.
Traduit de l'allemand par Valentine Zenker