Alors que le hall du bâtiment Geopolis de l'Unil est toujours occupé par les militants propalestiniens, un invité de marque arrive en fin d'après-midi mercredi. Carlo Sommaruga, conseiller aux Etats genevois (PS) et défenseur de la cause palestinienne. Il est, en effet, et président du groupe parlementaire Suisse-Palestine.
Carlo Sommaruga, pourquoi êtes-vous venu en personne à l'université de Lausanne?
Quand le mouvement a commencé, ils sont venus vers moi pour me demander mon soutien. Aujourd'hui, en séance à Lausanne, je veux leur témoigner ma solidarité et participer à une vidéo pour le collectif. Il me semble important d'apporter mon soutien au mouvement universitaire qui s'exprime en Suisse et dans d'autres pays. Depuis toujours, l'université a été un lieu où les dysfonctionnements de la société ont été dénoncés.
Il y a eu des mobilisations universitaires contre la guerre au Vietnam et aujourd'hui c'est contre la guerre à Gaza.
Vous pensez que ce type de manifestation est légitime?
Tout à fait. Aujourd'hui des femmes et des enfants meurent sous les bombes. Aujourd'hui, des bébés meurent à la naissance ou de faim quelques jours après. La population civile est ciblée. L'armée israélienne a tué des dizaines de milliers de civils et détruit systématiquement les infrastructures, bombarde les hôpitaux, les écoles, les églises et les mosquées.
Cette mobilisation est plus que légitime face à cette situation.
Vous êtes connu pour être un fervent défenseur de la cause palestinienne, pour quelles raisons?
Vous savez, je viens d'une famille qui pendant la guerre s'est engagée à sauver des juifs. J'ai toujours vécu dans ce narratif en faveur d'Israël. Quand je suis allé pour la première fois en Palestine en 2004, comme parlementaire, je suis revenu tellement choqué par l'occupation et le regard déshumanisant porté par l'armée israélienne sur les Palestiniens et je me suis dit que ce n'était pas possible de rester les bras croisés. Aujourd'hui en tant que politicien engagé à Berne, je fais en sorte que les droits et la dignité du peuple palestinien soit pris en compte. Notamment pour que la Suisse soutienne financièrement l'UNRWA, seule organisation qui peut assurer l'aide humanitaire à Gaza.
Est-ce que c'est le rôle d'un conseiller aux Etats que de venir soutenir ce genre de mobilisation?
Oui parce que je considère que cette cause est juste.
Ce qu'ils pensent n'est pas minoritaire. Je peux vous dire qu'il y a de nombreuses personnes qui m'arrêtent dans la rue pour me remercier de défendre la dignité et les droits du peuple palestinien et pour mon soutien à l'UNRWA. Cette question dépasse les clivages politiques.
Vous savez que votre présence va donner de la visibilité au mouvement?
Oui et c'est mon objectif. Par ma présence, je veux éviter que ce mouvement soit ostracisé. Je veux souligner la légitimité de ce mouvement.
Vous ne craignez pas la radicalisation du mouvement?
Ce qu'ils font ici à l'Unil c'est pacifique. Ils n'entravent personne, cela ne perturbe pas les cours. Regardez où ils sont installés, ils sont dans un hall. L'université doit vivre avec ça. On a eu Mai 68, on a eu le mouvement antiguerre du Vietnam, je ne vois pas pourquoi on se montre choqué par ce mouvement. Ce qui me choque au contraire, c'est de voir que dans certains cantons, on appelle la police pour évacuer les espaces universitaires.
Comment jugez-vous le positionnement des universités à ce sujet?
Prétendre, aujourd'hui, que les universités doivent rester neutres et qu'elles peuvent continuer à collaborer avec des institutions universitaires qui soutiennent le gouvernement israélien ou qui directement ou indirectement fournissent un appui ou des prestations à l'armée israélienne, c'est prendre parti. Les universités ne peuvent rester silencieuses face à ces massacres de civils et cette guerre de nature génocidaire, surtout lorsque ceux qui les commettent et la conduisent se réclament de nos valeurs.